En janvier 2023, la douane allemande interceptait des nouilles de riz illégales. Ces nouilles, en provenance de Thaïlande, étaient en effet produites à partir de riz transgénique, lequel est interdit à l’importation dans l’Union européenne. L’Allemagne a donc informé la Commission européenne de ce nouvel incident et le Système d’alerte rapide pour les denrées alimentaires et aliments pour animaux (RASFF pour le sigle anglais) a ainsi émis une alerte [1]. Les Pays-Bas sont le point d’entrée de ces nouilles illégales, mais le RASFF précise qu’elles ont été distribuées dans d’autres pays européens : Autriche, Belgique, France [2], Allemagne, Hongrie, Irlande, Luxembourg, Roumanie, Espagne et Royaume Uni…
Le 16 mai 2023, c’est au tour de l’Espagne d’informer le RASFF de la détection de farines de riz génétiquement modifié non autorisé en provenance, cette fois-ci, d’Inde [3].
En 2021, 500 tonnes de farine de riz transgénique en provenance d’Inde avaient déjà été interceptées dans l’Union européenne [4]. Elle met en garde contre le fait que ces essais ont conduit à une « contamination et à des fuites » qui ont atteint la chaîne alimentaire. La Coalition demande au gouvernement indien l’arrêt de tous les essais en champs de riz génétiquement modifié. La Commission européenne avait, elle aussi, écrit aux autorités indiennes en 2021. D’après le journal Down To Earth, elles ont nié les allégations et leur responsabilité [5]. La Commission demandait également au gouvernement indien l’identification de l’entreprise qui avait exporté les brisures de riz (grains de riz brisés). En effet, les notifications faites via le RASFF ne révèlent pas les noms commerciaux et l’identité des entreprises concernées.
Quant à la Thaïlande, visée dans la notification allemande, la situation semble différente. Interrogé par Inf’OGM, Piyasak Chaumpluk, biologiste à l’Université Chulalongkorn, à Bangkok, affirme qu’aucun essai en champs avec du riz génétiquement modifié n’a été implanté en Thaïlande. Pour lui, « étant donné que le riz est une culture très importante en Thaïlande, notre pays n’autorisera jamais, au grand jamais, la culture de riz OGM, quel qu’il soit ». Il nous liste ensuite les quelques cas de présences illégales d’OGM dans son pays : du maïs, de la papaye, du soja… Il continue : « si le cas des nouilles est avéré, je pense que cela est dû à l’importation de farine de riz, et non de grains de riz. En effet, certaines entreprises thaïlandaises ont étendu leurs activités dans des pays de l’Asie du Sud-Est, de sorte qu’il est possible d’importer de la farine de riz de chaque site vers le Royaume ».
Une telle information semble anodine, voire anecdotique… Cependant, ce phénomène interroge. Actuellement, un seul riz transgénique est autorisé à la culture : il s’agit du riz doré, génétiquement modifié pour contenir plus de bêta-carotène, autorisé en juillet 2021 aux Philippines [6]. Cependant, ce riz doré n’est toujours pas cultivé à grande échelle dans ce pays. Autrement dit, aucun pays ne cultive officiellement et commercialement du riz transgénique.
Des cultures illégales avaient été découvertes, aux États-Unis et en Chine, en 2006, mais les autorités de ces pays avaient, officiellement, tout mis en œuvre pour endiguer la contamination génétique [7].
La recherche sur le riz financée par la Fondation Gates
Le premier investisseur de l’Institut international de Recherche sur le Riz (IRRI) est la Fondation Bill & Melinda Gates. D’après le site de la Fondation, elle a versé plus de 197 millions de dollars à l’IRRI entre 2007 et 2019. L’IRRI a reçu, en 2019, 63,8 millions de dollars de subventions, dont une part importante via le CGIAR (Consultative Group on International Agricultural Research, ou Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale)(27%), des gouvernements nationaux (Inde, Japon, Chine, Allemagne, etc.) (32%). 24 % proviennent de fondations « philantropiques » [8]. A noter encore que le CGIAR a, lui aussi, bénéficié d’aides de la Fondation Gates (4,9 millions de dollars en 2020, 9,9 millions en 2019, 5,2 millions en 2012…) et des centres de recherche du CGIAR ont aussi pu reverser de l’argent à l’IRRI…
La Fondation Gates a également soutenu d’autres structures impliquées dans le développement de variétés modernes de riz :
- l’Institut bangladeshi de Recherche sur le Riz a reçu une aide de près de quatre millions de dollars à deux reprises, en 2015 et 2019 [9] ;
- l’organisation Program for Appropriate Technology in Health (PATH) a reçu, en 1999, cinq millions de dollars et, en 2005,535 000 dollars « afin de prévenir la malnutrition en Asie, en Amérique latine et dans une partie de l’Afrique en enrichissant le riz en micronutriments essentiels » [10] ;
- l’Université d’Oxford a reçu, en 2015, près de six millions de dollars et, en 2019, près de 15 millions de dollars pour « développer des variétés de riz à haut rendement pour les petits exploitants agricoles par l’introduction de caractères photosynthétiques C4 » [11] ;
- Africa Rice Center a reçu, en 2019, près de cinq millions de dollars pour « intégrer les efforts publics de sélection du riz en Afrique dans un système moderne et efficace de développement des variétés qui met au point des variétés à rendement plus élevé, préférées par le marché et tolérantes au stress, et qui permet leur livraison aux petits producteurs africains » [12] ;
- Chinese Academy of Agricultural Sciences a reçu plus de huit millions en 2016 pour « accroître la productivité et les revenus des petits exploitants agricoles en développant et en fournissant des variétés de riz à haut rendement, tolérantes au stress et résistantes aux maladies aux agriculteurs d’Afrique subsaharienne et d’Asie du Sud » [13] ;
- African Agricultural Technology Foundation a reçu, en 2018, 4,4 millions de dollars « pour soutenir le développement de programmes de sélection de riz hybride et de technologies de production de semences à l’usage du secteur privé » [14].
Quelle part de ces subventions a été utilisée pour travailler sur des variétés de riz génétiquement modifié ? Impossible de le savoir, mais la Fondation Gates ne s’est jamais cachée d’être un ardent promoteur des biotechnologies, végétales, animales et vaccinales [15].