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Vénus verte : la laitue OGM qui ne brunit pas

Par Christophe NOISETTE

Publié le 09/07/2019

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L’entreprise Intrexon [1] a annoncé début juin 2019 qu’elle allait commencer les ultimes essais en vue de la commercialisation aux États-Unis d’une laitue, de type romaine, qui ne brunit plus. Cette laitue nommée GreenVenus™ a, selon ses promoteurs, « une durée de conservation améliorée  » (elle se conserverait ainsi jusqu’à deux semaines) ce qui permettrait de « réduire le gaspillage alimentaire ». Le hic : elle est génétiquement modifiée…

Outre sa conservation améliorée et le fait qu’elle ne brunisse pas, Intrexon dans son communiqué, se félicite également que sa laitue « génétiquement éditée » [2], selon les termes de l’entreprise, ne sera pas « soumise à la réglementation en tant que produit fabriqué par génie génétique par l’USDA » en vertu de la partie 340 du règlement étasunien concernant les plantes génétiquement modifiées [3]. Intrexon espère mettre sur le marché cette laitue d’ici deux ans. La décision de l’USDA, considère l’entreprise, «  facilite grandement [leurs] efforts pour étendre [leur] plateforme de génétique de précision à d’autres légumes ».

Pas besoin d’évaluation pour cette laitue « presque » naturelle !

L’USDA a répondu à la demande d’Intrexon en février 2019. Elle a rendu publique la réponse à la demande de dérégulation de cette laitue mais le texte est en grande partie “caviardé”. Malgré tout, nous pouvons déterminer dans la correspondance entre Intrexon et l’USDA que la laitue a été modifiée par transgenèse pour exprimer une enzyme qui coupe l’ADN. Cette coupure a conduit à une délétion d’une séquence génétique dans le génome de la laitue. La transgenèse est une étape préalable à la mutagénèse dirigée dont on ne connaît pas l’outil. Intrexon affirme que des croisements ont été réalisés afin de supprimer les transgènes et que cela a été vérifié par PCR… Cette « disparition » a permis à l’USDA de déréguler cette laitue génétiquement modifiée. Comme dans le cas du maïs génétiquement modifié par Crispr/Cas9 et expérimenté en Belgique, les autorités considèrent qu’il « ne reste rien  » et que donc l’opération ne présente pas de risque. Ce faisant, ils supposent implicitement que la technique ne fait que ce qu’elle dit qu’elle fait et qu’elle n’entraîne aucun effet hors-cible. L’entreprise affirme également, comme l’impose la réglementation, que cette laitue n’est pas un parasite végétal… Intrexon, dans sa demande, utilise aussi la sémantique du caractère « naturel » de la modification : « les délétions introduites ont finalement été réparées par les mécanismes de réparation naturels de la plante ».

Enfin l’USDA considère qu’au regard de la littérature, il n’y pas de raison de croire que la mutation de cette laitue augmentera ses capacités à devenir une adventice problématique, ni ne favorisera sa capacité à se croiser avec des adventices sexuellement compatibles comme Lactuca serriola ou L. saligna.

Le marché de ce légume est estimé à dix milliards de dollars par an aux États-Unis. Intrexon travaille également sur d’autres produits « qui ne brunissent pas », comme des avocats, des poires, des cerises. Pour « réduire le gaspillage alimentaire », vraiment ? En tout cas, pour allonger les filières de distribution, sans aucun doute !

[2L’USDA souligne dans sa réponse que cette laitue a « été développée via une combinaison de techniques d’édition du génome (qui ont engendré la mutation) et des techniques classiques de sélection (qui ont permis de supprimer le matériel génétique introduit) ».

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