n°169 - octobre / décembre 2022

OGM, l’économie de la promesse et du fantasme

Par Eric MEUNIER

Publié le 13/10/2022

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Faire ce que la Nature ne sait pas faire, ou le faire en mieux. Aller plus vite, être plus précis. Résoudre la faim dans le monde, faire face au changement climatique, vivre plus longtemps, voire ne pas mourir. Voilà, pêle-mêle, les promesses répétées par le monde industriel quand il s’agit de biotechnologie.

Mais ces entreprises innovent-elles réellement ? Proposent-elles des produits différents de ceux naturels ou de ceux que les méthodes traditionnelles permettent d’obtenir ? Au-delà de ces promesses, leur objectif n’est-il pas d’augmenter leur valeur boursière et de capitaliser sur des portefeuilles de brevets ?

Nos fantasmes, conscients ou inconscients, nourrissent les stratégies de communication des entreprises. Le dossier des OGM transgéniques a pourtant permis de mesurer le décalage entre promesse et réalité. En 20 ans, plus de 80 espèces de plantes ont été testées expérimentalement dans les champs… pour seulement quatre espèces de plantes commercialisées majoritairement (maïs, coton, colza, soja) ; des promesses de valeurs nutritionnelles, d’adaptation au changement climatique… pour deux caractéristiques majoritairement commercialisées : tolérance aux herbicides et production d’insecticide.

Mais le monde industriel sait utiliser les fantasmes les plus enfouis, les mobilisations de la société civile et ses revendications pour faire avancer ses propres revendications. Dans ce dossier, Inf’OGM montre que les sujets actuels des OGM, de la numérisation du vivant, de l’agriculture de précision, du biocontrôle, de la santé… sont l’occasion pour les entreprises de promettre à nouveau monts et merveilles. Un paradoxe puisque, sur le sujet des OGM, ces mêmes entreprises affirment ne pas faire autre chose que ce que la Nature ou les méthodes traditionnelles peuvent déjà faire. Mais un paradoxe seulement pour ceux qui choisissent encore de croire à ces promesses. L’avancée majeure réside, elle, dans l’opportunité pour les entreprises d’accroître leur capacité à confisquer le vivant dans leur propre intérêt financier.

Ce dossier illustre ce mouvement qui s’opère depuis plusieurs décennies. Partant du sujet des OGM transgéniques comme illustration de la différence majeure entre promesses et réalisations, nous analyserons ensuite les éléments de communication des entreprises, qui misent sur les fantasmes individuels et collectifs, notamment dans les domaines agricoles et sanitaires. Nous analyserons également le lien entre les différents mouvements stratégiques en cours : obtenir gratuitement et sans contre-partie l’accès à la biodiversité, se débarrasser définitivement des législations OGM trop contraignantes, pour finalement augmenter la capacité à privatiser cette biodiversité via une propriété industrielle débridée.

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