n°88 - juillet / août 2007Interview / débat contradictoire

Le Grenelle de l’environnement en débat

Par Christophe NOISETTE, Eric MEUNIER

Publié le 31/07/2007

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Le Grenelle de l’Environnement réunit l’Etat et des représentants d’ONG, de salariés, de collectivités locales et d’employeurs, autour de thèmes liés à l’environnement : climat, biodiversité, santé, production, démocratie écologique, em-ploi. En octobre aura lieu la concertation finale, qui doit aboutir à une quinzaine de mesures concrètes.

Interview de la FNSEA, représentée par Pascal FEREY

Dans quel état d’esprit abordez-vous le Grenelle ?

Nous abordons ce Grenelle avec un esprit positif et en tant que chance pour la France et son agriculture. Il était urgent de mettre les questions environnementales sur la table, sans en négliger les dimensions sociales, territoriales et économiques. Pour la FNSEA, il est possible de les concilier et nous abordons le Grenelle dans cette optique-là. La société civile et les agriculeurs ont déjà fait beaucoup d’efforts en matière d’environnement, souvent méconnus et il s’agit de ne pas enfoncer des portes ouvertes. Nous y allons dans un esprit de propositions et dans un esprit d’ouverture. Nous souhaitons que ce Grenelle aborde toutes les questions importantes – eau, phytopharmaceutiques, OGM – sans tabou…

Qu’attendez-vous du Grenelle sur la question des PGM ?

Nous attendons du Grenelle un vrai débat public et pas un dialogue de sourds. Actuellement, le débat est confisqué par une minorité de personnes, les militants du pour et ceux du contre. Cela conduit à une situation ambigüe, source de conflits potentiels. Il est temps de clarifier le débat et de laisser le choix à ceux qui veulent cultiver des PGM d’en cultiver dans le respect du principe de précaution, et réciproquement. La coexistence est une des questions à laquelle la recherche, et non les préjugés, doit répondre. Nous attendons donc que le principe de précaution soit affiné pour définir les conditions d’une coexistence de cultures OGM ou non. L’information par la traçabilité est également un point important.

Nous sommes tout à fait intéressés par la proposition du ministre d’avoir un groupe transversal spécifique aux OGM. Ce débat devra permettre de savoir si, pour l’instant, les OGM sont bons ou mauvais, pour la santé, l’environnement et l’économie.

Nous attendons donc du Grenelle, à plus long terme, que ce débat de la société civile alimente le débat parlementaire et qu’une loi sur les OGM soit enfin votée. On veut sortir de l’opacité législative en la matière et clore une bonne fois pour toute ce débat.

Enfin, nous aimerions que la recherche publique se réapproprie le sujet, afin que la recherche ne serve pas uniquement des intérêts commerciaux. A la FNSEA, nous sommes favorables à la recherche en milieu confiné et ouvert. Cette recherche doit être protégée et les destructions sanctionnées.

Emettez-vous des conditions particulières quant à votre participation effective au Grenelle ?

Non, nous ne mettons aucune condition à notre participation. A la FNSEA, nous sommes ravis qu’un tel débat ait lieu et nous y participerons, quoi qu’il arrive, dans le respect de la démocratie. Nous y exprimerons nos propositions, nous écouterons celles des autres et le politique disposera alors d’un avis pour trancher.

Interview de l’Alliance pour la Planète, représentée par Chantal JACQUET

Dans quel état d’esprit abordez-vous le Grenelle ?

L’Alliance aborde le Grenelle dans un état d’esprit constructif mais également de vigilance. Les PGM sont caractéristiques de cette nécessité de vigilance, ne serait-ce que pour s’assurer que ce sujet est traité à part entière et non comme un sous-thème, une des conditions sine qua none de notre participation au Grenelle. Fin juillet, le ministre de l’Ecologie nous a garanti qu’un groupe de travail serait dédié aux PGM. Nous sommes satisfaits de cette proposition mais nous attendons toujours les modalités de mise en place de ce groupe de travail.

Qu’attendez-vous du Grenelle sur la question des PGM ?

L’Alliance demande un moratoire sur les cultures en plein champ de PGM ainsi que l’arrêt de toute commercialisation tant que les mesures suivantes n’auront pas été prises :

- une expertise indépendante et contradictoire à partir d’un protocole d’évaluation défini à l’instar des examens de toxicologie sur les pesticides et établi avec l’accord de toutes les parties prenantes dont des représentants de la société civile et des scientifiques qui ont identifié des risques potentiels ;

- la reconnaissance par la loi du droit des agriculteurs, des éleveurs, des apiculteurs et des consommateurs à produire et à consommer des produits “sans OGM” ;

- la garantie à tous de la transparence de l’information ;

- la mise en place d’une responsabilité juridique et financière des entreprises commercialisant les PGM en cas de dommages.

Nous attendons aussi qu’un texte législatif définisse très précisément les règles de coexistence sans risque de contamination possible, avec les procédures de contrôle inhérents. L’Alliance adopte volontairement une position légaliste sur ce point si les preuves de la possibilité de coexistence étaient apportées.

Emettez-vous des conditions particulières quant à votre participation effective au Grenelle ?

L’Alliance participe dans un esprit constructif pour aboutir à des mesures concrètes. La nature de la réunion phare d’octobre n’est toujours pas définie. Si elle ne devait être qu’une simple discussion ou qu’une bulle médiatique, nous ferions savoir haut et fort notre désaccord et pourrions nous retirer du Grenelle. Nous voulons une vraie rupture de la politique environnementale française sinon ce Grenelle ne serait qu’une “mascarade”. Le gouvernement s’est engagé à ne pas légiférer sur des questions environnementales avant l’issue de ce Grenelle, nous y serons très attentifs. De même, si José Bové devait aller en prison avant ou durant le Grenelle, nous serions amenés, avec les membres de l’Alliance, à poser la question de notre participation.

Présentation des acteurs

La FNSEA est le syndicat agricole majoritaire : “La FNSEA, faisant fi du productivisme auquel ses détracteurs voudraient la réduire, prend position en faveur de l’agriculture raisonnée et d’un développement de l’agriculture vers des productions non alimentaires”.

Proposition du Conseil de l’agriculture française : http://www.fnsea.fr/sites/webfnsea/…

L’Alliance pour la planète regroupe 79 ONG. “L’Alliance nous permet de nous connaître à travers nos spécificités, nos différences, nos idéaux et nos objectifs communs et d’agir concrètement, ensemble, sur des combats qu’il est maintenant vital de gagner. […] L’Alliance n’est pas une fusion d’associations : c’est un tremplin de propositions et d’initiatives, qui vise à donner plus de poids, de résonance et d’efficacité à leurs actions.”

http://www.lalliance.fr et http://legrenelle.lalliance.fr

Pour info, considérant que “l’organisation du Grenelle par le gouvernement n’est ni sérieuse, ni crédible”, plusieurs associations organiseront à Lyon, le 6 octobre 2007, un contre grenelle, pour dénoncer la course à la croissance folle et le productivisme.

http://www.contre-grenelle.org

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