
Le COV a évolué au cours de la seconde moitié du XX° siècle. Si, dans sa version originelle (adoptée en 1961), un agriculteur pouvait conserver une partie de sa récolte issue de semences d’une variété protégée pour réensemencer ses champs l’année suivante (exception de l’agriculteur), ce « privilège » (comme les semenciers l’appellent ironiquement) s’est ensuite progressivement réduit comme peau de chagrin.
L’Union pour la protection des obtentions végétales (UPOV)
L’UPOV est une organisation internationale dont le siège est à Genève. Elle a été fondée en 1961 à Paris, au moment où la convention du même nom a été signée. Cette convention est entrée en vigueur en 1968. Elle a été révisée en 1972, 1978 et 1991.
Le but de la convention est de protéger les obtentions végétales au moyen d’un système harmonisé de propriété industrielle, afin d’encourager le développement de nouvelles variétés végétales. La convention de 1991 a grandement renforcé les droits des sélectionneurs, au détriment de ceux des agriculteurs. Alors que la convention de 1978 cherchait surtout à protéger les sélectionneurs de la concurrence, la convention de 1991 va bien plus loin : désormais l’échange de semences et de matériel de multiplication entre agriculteurs est aussi interdit (cf. Qu’est-ce que le brevetage du vivant ?).
L’UPOV compte 78 membres (18 août 2022), dont l’Union européenne (1). Et 69 membres, dont la France en 2012, ont ratifié la convention de 1991 (2).
1, http://www.upov.int/overview/fr/upov.html
2, http://www.upov.int/export/sites/upov/members/fr/pdf/pub423.pdf
(au 18 août 2022).
Les agriculteurs bridés dans leur faculté à ressemer une partie de leur récolte
Selon la convention UPOV, les variétés végétales, ainsi que les espèces animales, ne sont pas brevetables. Mais depuis la version de 1991 de la Convention de l’UPOV, le COV se rapproche de plus en plus du brevet : la nouvelle variété doit être distincte de la variété initiale avec au minimum un caractère suffisamment différent, sinon elle sera considérée comme “essentiellement dérivée” (cf. lexique semences) et reste protégée par le COV initial. L’exception des semences de ferme (c’est-à-dire le droit de reproduire des semences protégées à la ferme) est devenue facultative et est soumise à la sauvegarde des intérêts des obtenteurs.
En France, 34 espèces [2] peuvent être reproduites à la ferme, moyennant le paiement d’une redevance aux semenciers (la fameuse CVO, Cotisation volontaire obligatoire (sic)). Les petits agriculteurs [3] sont cependant exonérés de ce paiement. Pour toutes les autres espèces, la reproduction à la ferme est interdite et l’agriculteur doit obligatoirement racheter chaque année les semences.
Dans la pratique, les agriculteurs sont rarement poursuivis, les semenciers n’ayant pas jusqu’à présent les moyens de prouver l’origine des semences incriminées. Le GNIS signale toutefois huit actions en justice, où l’entreprise productrice de semences a toujours été gagnante [4]. Mais grâce à l’obligation d’enregistrement des agriculteurs qui reproduisent des semences de ferme (loi du 8 décembre 2011) et grâce aux moyens de détection génétique, il leur sera plus facile dorénavant de poursuivre les agriculteurs. La nouvelle Loi d’avenir agricole (LAAF du 24 juillet 2014) stipule néanmoins qu’aucune poursuite ne pourra être entreprise en cas de contamination fortuite des semences par du matériel protégé.
Certaines exemptions de redevance persistent (loi du 8 décembre 2011 sur les obtentions végétales) :
les petits agriculteurs qui produisent moins de 92 tonnes de céréales sont exonérés du paiement de la rémunération ;
toutes les variétés de semences tombées dans le domaine public sont libres d’utilisation : soit 450 variétés disponibles en France, comme par exemple la pomme de terre « Bintje » ;
les variétés nouvelles protégées sont libres d’accès pour les agriculteurs et les chercheurs pour faire leur propre sélection.
Des critères qui excluent les variétés population
Un COV peut être déposé sur une variété végétale si celle-ci est nouvelle, distincte, homogène et stable (critères DHS + nouveauté). Ces normes sont celles qui définissent les variétés industrielles ; elles excluent donc les semences paysannes diversifiées et variables.
Identiques à celles du catalogue qui conditionne l’accès au marché des semences de variétés “DHS”, ces normes assurent un monopole de fait aux variétés protégeables par un COV. La durée de vie d’un COV est de 25 ans (ou 30 pour des variétés pérennes – à cycle pluriannuel comme les arbres).
Lorsque la variété tombe dans le domaine public, elle peut être maintenue au catalogue et donc continuer à être commercialisée. En pratique, lorsqu’une variété tombe dans le domaine public, il arrive souvent qu’elle soit radiée du catalogue, soit parce que la maintenance n’est plus assurée par l’obtenteur, soit parce que celui-ci en demande la radiation [5].
La Convention UPOV a été intégrée en droit français où cohabitent les COV français délivrés par l’Instance Nationale pour les Obtentions Végétales (INOV) et les COV communautaires délivrés par l’OCVV (règlement 2100/94/CE). Les deux régimes ont tendance à se rapprocher.