n°63 - avril 2005Tribune

Vers un nouveau moratoire ?

Par Christophe NOISETTE Sébastien Denys* & Laurent Jacob, Collectif d’Action GènEthique

Publié le 31/03/2005

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Un verdict accablant. En juin 1999, le moratoire entérine un blocage politique apparu l’année précédente. Les procédures ayant été remaniées en 2003, le moratoire devait pouvoir être levé. Mais entre temps une étude a établi l’impossible co-existence des cultures. L’agitation publique, pour sa part, contribue à façonner ce que les OGM sont devenus socialement et scientifiquement, en imposant des approches et des questions négligées. À cet égard, la moisson de mars 2005 est abondante. Coup sur coup, Séralini confirme la toxicité de l’herbicide Roundup (cf. Inf’OGM n°62) et l’étude “Farm Scale Evaluation” (cf. partie Recherche & Environnement) établit une diminution de la biodiversité dans les champs d’OGM tolérants aux herbicides. Que de chemin parcouru pour faire admettre que le pollen se dissémine et que les herbicides sont toxiques pour la santé comme pour l’environnement !

Une immixtion progressive. Il n’empêche que les OGM s’immiscent partout, carrément dans l’alimentation animale, insidieusement dans l’alimentation humaine. Ainsi Carrefour a récemment étrenné une nouvelle stratégie de positionnement sur les prix avec une huile aux OGM. Les mesures de contrôle font de moins en moins illusion : ces dernières semaines Syngenta a été convaincu d’avoir distribué “par erreur” des milliers de tonnes d’un maïs illégal (Bt10) (Cf. partie Législation) et Greenpeace découvre du riz GM en Chine (Cf. partie Consommation & Economie) alors qu’aucun riz transgénique n’a jamais été autorisé. Si les OGM envahissent tout, dans le même temps, leur source se tarit. Le nombre de demandes sont en chute libre aux Etats-Unis, tant pour la commercialisation, passage de 9,4 à 3 autorisations/an, (Cf. Inf’OGM n°61)- que dans les programmes de recherche (de 264 à 82 entre 1997 et 2003.)

Un nouveau moratoire ? La prétendue “levée” du moratoire, obtenue par un coup de force, n’a pas permis de résoudre le blocage politique qui en est à l’origine. L’arrivée des nouveaux Etats Membres n’y a rien changé. Une vingtaine de vieux dossiers ont repris le fil de la procédure et se sont aussitôt embourbés, la plus infime perspective d’avancée suscite une tempête de protestations. Et la ruade de la Commission européenne, le 22 mars dernier, par laquelle elle engage une croisade contre les “zones libres d’OGM” et annonce une initiative réglementaire sur la coexistence, augure surtout d’un nouvel imbroglio juridique et d’un pataquès politique de nature à mettre de l’huile sur le feu du débat. Peu à peu les dissonances atteignent le seuil critique qui rendra nécessaire une reprise du moratoire. Voilà qui nous rappelle que les OGM “font de la politique”, au moment même où ils se veulent objet technique ou promesses économiques.

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