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UE – OGM : désaccords entre les Etats membres, opposition des députés Verts

Par Eric MEUNIER

Publié le 14/06/2012

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La réunion du Conseil des ministres de l’Environnement du 11 juin 2012 était l’occasion de la dernière chance pour le Danemark d’obtenir une majorité qualifiée des Etats membres sur sa proposition de compromis faite en 2011 sur le dossier OGM. Cette proposition visait à instaurer une négociation entre un Etat membre et une entreprise pour que la mise en culture d’une plante génétiquement modifiée (PGM) soit interdite dans l’Etat en question… mais autorisée dans le reste des Etats. Mais les 27 Etats membres de l’Union européenne n’ont pas trouvé de compromis, des pays comme la France, l’Allemagne, le Royaume-Uni et la Belgique restant opposés à la proposition danoise.

Souhaitant proposer une porte de sortie aux États membres de l’Union européenne qui ne trouvaient pas d’accord sur une proposition faite par la Commission européenne (CE) en juillet 2010, le Danemark, pays présidant l’Union européenne depuis le 1er janvier 2012, avait mis sur la table un texte de compromis : les États membres pourraient décider d’une interdiction nationale de mise en culture de telle ou telle PGM pendant la procédure d’autorisation, après négociation directe avec l’entreprise souhaitant mettre son OGM sur le marché. En cas d’échec de la négociation, l’État resterait libre, une fois la procédure d’autorisation achevée, d’interdire cet OGM sur tout ou partie de son territoire, conformément à la proposition de la Commission de juillet 2010. Point commun aux deux propositions, les raisons avancées par un Etat membre pourraient concerner tous types d’arguments sauf les risques sanitaires ou environnementaux évalués au niveau européen [1].

Mais lundi 11 juin 2012, les discussions entre les ministres de l’Environnement des États membres n’ont pas permis d’avancer. Aucun vote n’était de toute façon prévu mais en conférence de presse après la réunion, le Danemark a souligné « l’échec des discussions » sur sa proposition. Le dossier va maintenant passer à la présidence chypriote (pour six mois à partir du 1er juillet). Ce dossier ne devrait avoir que peu de chance d’avancer, Chypre ayant voté en mars contre la proposition, comme nous l’a précisé la Commission européenne. L’Irlande pourrait alors reprendre les travaux en 2013.

La Commission européenne justement s’est déclarée « très déçue que les discussions n’aient pas abouti, le Danemark ayant fourni d’énormes efforts pour obtenir une majorité qualifiée » [2]. Après avoir initié en 2010 les discussions sur de possibles interdictions nationales, la Commission européenne a, depuis, fait face à une opposition permanente de certains pays pour qui, à l’instar de la France, les bases juridiques des arguments invocables ne paraissent pas assez solides et pour qui surtout, de telles discussions ne sauraient avoir lieu avant que la question de l’évaluation des PGM ne soit finalisée. Sur ce sujet, le débat est effectivement toujours en cours, notamment sur les analyses que les entreprises doivent fournir pour que leur demande d’autorisation commerciale soit étudiée [3].

Que va faire maintenant la Commission européenne vis-à-vis des nouvelles autorisations ? Rappelant à Inf’OGM que « la reprise des autorisations à la culture a toujours été liée à la directive culture [la modification de la directive 2001/18 pour permettre aux États membres ces interdictions nationales] », la Commission précise « ne pas avoir encore décidé si des propositions d’autorisations de PGM à la culture vont être mises sur la table des Etats membres ». Si des dossiers sont bien dans les tuyaux, prêts à être discutés, « leur présentation aux États membres est une décision politique qui relève du Commissaire Dalli, mais qui n’est pas prévue dans l’immédiat ».

Si cela n’exclut pas que de telles propositions d’autorisation soient présentées cet été aux États membres, l’enjeu politique paraît tout de même risqué pour le Commissaire. Ce que s’est d’ailleurs chargé de lui rappeler le groupe des Verts du Parlement européen dans une lettre datée du 12 juin [4]. Pour ces députés européens, relancer le processus d’autorisation à la culture serait « le pire signal possible envoyé aux citoyens européens » à un moment ou « l’AESA [Autorité européenne de sécurité des aliments], en tant qu’agence scientifique en charge du dossier OGM, est sous le feu des projecteurs du fait de ces liens avec l’industrie ». Rappelant les cas de « portes tournantes » de Mesdames Banati [5] et Renckens [6] et soulignant que le médiateur européen vient d’accepter de se saisir du cas d’Harry Kuiper (président du groupe OGM de l’AESA), les députés soulignent surtout que les possibles propositions d’autorisations à la culture que la Commission pourrait faire seraient des dossiers pour lesquels l’évaluation des risques telle que conduite par l’AESA pose encore question [7]. Les Verts demandent donc au Commissaire Dalli de ne pas proposer d’autorisation de PGM pour la culture, afin « de restaurer la confiance du public ». Et les députés de demander à ce que « tout lien entre [l’AESA] et les industries soient coupés », que toutes les « évaluations de risques qui ont été faites pour les PGM individuellement » soit reprises, et d’annoncer leur intention de « dénoncer toute tentative d’autoriser ou renouveler des autorisations commerciales de PGM dans l’Union européenne avant que la crédibilité scientifique de l’AESA n’ait été restaurée et que les conséquences sanitaires, environnementales et socio-économiques des PGM ainsi que leur réels bénéfices pour la société n’aient été évalués hors de toute influence de l’industrie ».

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