n°89 - novembre / décembre 2007

Science et OGM : la liberté… de se taire

Par Eric MEUNIER

Publié le 30/09/2007

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Le débat sur les PGM fait appel aux données scientifiques et / ou aux paroles d’experts. Ces derniers sont souvent des scientifiques eux-mêmes. Mais prendre des scientifiques pour caution sous-entend bien sûr que tous les scientifiques puissent s’exprimer librement. Aux dires et histoires de certains, cette assurance semble pourtant remise en question.

En France, Vélot… viré !

Christian Vélot est enseignant chercheur à l’Institut de Génétique et Microbiologie (IGM) de l’Université d’Orsay. Il donne des conférences, persuadé qu’il faut rétablir le lien entre citoyen et scientifique. Sur les PGM, il ne cache pas ses doutes. Mais sur son avenir professionnel, il a acquis, le 27 septembre 2007, une certitude : il ne fera plus partie de l’IGM au 1er janvier 2010, comme cela lui a été signalé par courrier. Interrogés par Inf’OGM, J.P. Rousset, le vice-directeur et futur directeur de l’IGM et Monique Bolotin, actuelle directrice de l’IGM nous ont répondu que leur hiérarchie leur interdisait de s’exprimer sur “le cas Vélot”. Mais M. Bolotin précise toutefois que la décision de ne pas maintenir le laboratoire de Vélot est la “conséquence de choix scientifique en vue des projets de recherche que l’Institut conduira à partir de 2010. Il a été proposé à C. Vélot de déménager son laboratoire dans un environnement scientifique plus approprié à ses recherches”. Mais C. Vélot estime lui que “cette décision est le fruit de critiques qui m’ont été faites sur des prises de position contre les PGM que j’aurais exprimées en parlant au nom de l’Institut. Or j’indique juste ma fonction, comme bon nombre de scientifiques pro-PGM intervenant en faveur des PGM. De toute façon, la décision est prise plus d’un an avant notre évaluation scientifique de janvier 2009 ! Ce n’est donc pas pour des raisons scientifiques que je me fais virer”. Il précise que sa “mise sous pression” n’est pas récente : “mon laboratoire connaît des suppressions de crédit, des refus de stagiaires et on nous ordonne de déménager”.

Mexique / Norvège : Chapela sous pression

Ignacio Chapela, chercheur en microbiologie à l’université de Berkeley aux Etats-Unis, avait montré en 2001, la contamination de maïs mexicain par des OGM. Cette publication avait donné lieu à une campagne de dénigrement publique du scientifique. Après l’échec de la tentative de l’université de ne pas reconduire son contrat, il a décidé de prendre une année sabbatique en Norvège. Sur cette décision de s’éloigner, il confesse : “mes problèmes professionnels ont eu, bien sûr, des impacts sur ma vie personnelle mais je ne veux en dire plus. Pour moi, cette question est une des plus dures qui puisse m’être posée”. A l’Institut d’Ecologie du Gène où il travaille sur “la mise au point d’outils qui permettront de cartographier la présence légale ou illégale des plantes transgéniques dans le monde entier”, il explique subir encore des pressions indirectes : “L’institut n’est pas exempt d’ennemis en Norvège même, et des pressions du gouvernement des Etats-Unis ont eu lieu pour que cet institut ne soit plus financé”.

Controverse autour d’une publication

La controverse entourant le Pr. Irina Ermakova porte non sur ses résultats mais sur la forme de leur publication. Cette chercheuse avait montré une mortalité plus élevée entre des femelles nourries au soja GM et d’autres nourries au soja non GM. I. Ermakova a accepté l’offre de Nature Biotechnology de publier un article, dont elle serait l’auteure, composé d’une série de questions et réponses avec critiques par un groupe de scientifiques. Mais l’article paru en septembre 2007 n’est pas celui prévu. Selon l’association GM Free Cymru qui a correspondu avec la chercheuse, l’article est signé par l’éditeur du journal, qui n’a jamais soumis à la chercheuse la version avant publication. Or elle contenait les critiques émises par d’autres scientifiques sur son travail. Elle n’a donc pu répondre aux critiques des chercheurs. Elle a aussi constaté que sur les 12 références scientifiques qu’elle avait indiquées, seules huit sont présentes, pour 20 références citées par les critiques.

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