Plantes Génétiquement Modifiées : un manque de transparence !

L’accès à l’information tient une place de premier ordre dans le dossier des Plantes Génétiquement Modifiées (PGM) afin que chacun - politiques, professionnels, citoyens - puisse participer à un débat démocratique équilibré et consommer l’alimentation qu’il désire. Pourtant, ce dossier est encore trop peu transparent Des mesures simples permettront de répondre aux citoyens qui désirent être mieux informés.

Dans l’Union européenne, les Plantes Génétiquement Modifiées font l’objet d’une procédure d’autorisation et de suivi gouvernée par une directive et un règlement européens. Elle est mise en œuvre par la Commission européenne, le Conseil européen des ministres et les gouvernements des Etats membres. De nombreuses informations sont demandées au cours de cette procédure, qu’elles portent sur les PGM expérimentales (essais en champs) ou sur les PGM commerciales : informations scientifiques pour une évaluation avant autorisation, informations commerciales par le biais de l’étiquetage pour permettre d’informer les consommateurs, informations agricoles pour permettre aux professionnels de la filière de connaître les produits utilisés et pour permettre aux élus locaux de suivre les essais en champs de PGM sur leur territoire, informations scientifiques à nouveau pour permettre aux autorités nationales de « suivre » les possibles impacts négatifs sur l’environnement local.

Des informations manquantes à tous niveaux

Pourtant, de nombreuses informations ne sont pas exigées et ne sont pas rendues publiques. Le vif débat qui a lieu au sein de la société sur les PGM est donc tronqué par ce manque d’informations les plus complètes et les plus à jour possible, il en perd en efficacité. Schématiquement, les lacunes d’informations observées sont les suivantes :
Dossiers d’expérimentations : Intervenant avant les demandes de commercialisation, les essais en champs de PGM doivent faire l’objet d’une consultation des citoyens par les autorités nationales du pays où seront mises en cultures ces PGM expérimentales. En France, ces consultations sont effectuées par internet, habituellement au cours de la période estivale, sur des délais assez courts et en exigeant des réponses d’un niveau scientifique professionnel. Une telle procédure de consultation a déjà été jugée par des acteurs de la société civile et la justice comme peu démocratique car ne mettant pas en œuvre les conditions optimales pour permettre à chacun de donner son avis et d’avoir l’assurance qu’il soit pris en compte.
Données scientifiques : Les études fournies par le pétitionnaire lors des demandes d’autorisation de commercialisation de PGM contiennent les données interprétées lors des analyses effectuées sur la plante et non les données brutes. Les analyses permettent au pétitionnaire de caractériser biologiquement sa PGM, de la comparer à une même variété non GM, d’évaluer sa toxicité en tant qu’aliment pour les humains ou les animaux… A ce jour, les résultats bruts ne sont donc pas rendues accessibles, ni pour les experts, ni pour le public. Et les données interprétées présentes dans les dossiers ne sont pas rendues publiques au-delà du cercle des experts intervenant dans l’évaluation des demandes d’autorisation. Cette situation a déjà été dénoncée comme contraire aux principes de publication des études scientifiques dont l’objectif et d’assurer que toute étude puisse être reproduite par un tiers. Par ailleurs, la conduite des analyses est effectuée par les pétitionnaires et/ou par des laboratoires payés par le pétitionnaire. Aucune analyse n’est donc conduite par un laboratoire public travaillant indépendamment.
Étiquetage : La règlementation européenne impose l’étiquetage de tout lot contenant des PGM ou dérivant de PGM. Cet étiquetage a pour objectif de permettre l’information des professionnels intervenant dans une filière où se trouvent des PGM ainsi que celle des consommateurs en bout de chaîne. Une classe de produits n’est pas concernée par cet étiquetage obligatoire : les produits d’animaux ayant été nourris avec des PGM.
Localisation des cultures : Une information sur la localisation des cultures commerciales de PGM est exigée par la réglementation européenne. Ainsi, les autorités des Etats membres doivent renseigner les citoyens sur les lieux où se trouvent de telles cultures. Mais la réglementation européenne ne fournit pas le degré de précision d’une telle information, laissant le choix aux autorités nationales d’indiquer soit la région, le département, la commune ou la parcelle précise où se trouvent les cultures de PGM. Cette libre interprétation par les autorités nationales de la précision de cette information géographique laisse la porte ouverte à une information inutile si elle relève du niveau de la région ou du département. En France, la loi impose que l’information rendue publique soit la localisation parcellaire des cultures GM.
Suivi de biovigilance : Les cultures expérimentales et commerciales de PGM doivent réglementairement faire l’objet d’un suivi - dit de biovigilance - sur le terrain afin de détecter tout effet négatif sur l’environnement. Ce suivi est de la responsabilité des autorités nationales. Les publications des rapports de biovigilance ainsi que celles des comptes-rendus des réunions de comités nationaux de biovigilance ne sont pas systématiques. Cette situation ne permet donc pas aux acteurs non gouvernementaux investis dans le débat et aux citoyens de suivre le travail des autorités nationales dans ce domaine.
Le sans OGM : Face aux risques de contaminations par les PGM et dans un souci d’informer au mieux les consommateurs, des professionnels investis dans des labels de qualité ou certains systèmes agricoles ont souhaité mettre en place un étiquetage « sans OGM ». Cet étiquetage ne reçoit que peu d’appui politique au niveau européen ou aux niveaux nationaux.

Nos propositions

L’association Inf’OGM a été créée en 1999 dans l’objectif de rendre effectif un débat citoyen sur le sujet de l’adoption ou non des PGM et afin de permettre à l’ensemble de la société de prendre des décisions en connaissance de cause. Ses dix années d’existence et son suivi quotidien de l’actualité amènent Inf’OGM à relayer aujourd’hui les propositions suivantes en vue d’une meilleure transparence sur le dossier de PGM :
Mise en place de conférences de citoyens simultanées au niveau européen, dont les recommandations finales seront obligatoirement examinées par les politiques qui donneront un avis public et argumenté sur leur prise en compte ou non.

- Rendre obligatoire la publication des études scientifiques fournies par les pétitionnaires et constituant les dossiers de demandes d’autorisation commerciales, ainsi que la publication des données brutes des analyses effectuées. De telles publications ne portent pas atteinte à la protection du secret industriel, puisque les études ne concernent que les résultats d’analyses des PGM. 

- Créer une véritable structure d’analyse scientifique indépendante des industries, mais financée de façon obligatoire par celles-ci.
Rendre obligatoire - à l’image de la position française - la localisation parcellaire des cultures commerciales des PGM afin de permettre aux professionnels agricoles locaux, aux élus locaux et aux citoyens de protéger leurs propres activités en conséquence.

- Rendre obligatoire la publication des rapports de biovigilance, les comptes-rendus des réunions des comités nationaux de biovigilance et la prise en compte par les autorités nationales des conclusions de ces comités.
Faire supporter le coût de ces mesures à la filière OGM


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