n°95 - novembre / décembre 2008

Où en est-on du moratoire français sur le Mon 810 ?

Par Eric MEUNIER, Anne FURET

Publié le 01/11/2008

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Le 9 février 2008, le gouvernement français informait la Commission européenne de sa décision de suspendre la culture du maïs Mon 810 sur son territoire. Cette décision, fruit de l’avis du Comité de Préfiguration de la Haute Autorité (CPHA), en cours d’instruction au Conseil d’Etat en France (cf. encadré ci-dessous), a immédiatement été soumise (le 27 février 2008) à l’Agence Européenne de Sécurité Alimentaire (AESA) pour qu’elle donne son avis scientifique.

Pérégrinations devant l’AESA

La DG Environnement demandait un avis de l’AESA « le plus tôt possible ». Pour pouvoir répondre fin avril, l’AESA demandait la liste exhaustive des études citées dans l’avis du CPHA et la réponse argumentée des autorités françaises à la réaction de Monsanto sur cette décision. Le 12 juin, les autorités françaises envoyaient un rapport signé par le Pr. Yvon Le Maho. Mais une note accompagnatrice jetait le trouble à l’AESA quant au caractère officiel du document reçu, car elle indiquait que le rapport « n’engage[ait] ni le CPHA ni les autorités françaises ». Doute que levait la DG Environnement le 25 juillet car, selon elle, pour répondre aux demandes de l’AESA, la France a « sollicité l’appui d’un groupe d’experts scientifiques, coordonné par Yvon Le Maho ».

Par ailleurs, la DG souligne que le rapport stipule clairement avoir été rédigé sur demande des autorités françaises, qu’Yvon Le Maho était membre du CPHA et enfin, qu’il est le contact désigné pour toute discussion avec l’AESA. Si la France a bien répondu aux demandes, elle ne semble en tout cas pas y avoir mis un empressement particulier.

Le Rapport le Maho étoffe l’avis du CPHA

Le rapport en lui-même, disponible sur le site du Grenelle de l’Environnement (et non sur le site interministériel sur les OGM du gouvernement français !), affirme notamment que, concernant le nombre limité (selon Monsanto) de publications appuyant la décision du CPHA, « on ne peut cependant négliger la portée de certaines publications récentes sous prétexte que leurs résultats diffèrent de celles des publications antérieures. Ce serait oublier le caractère évolutif des processus biologiques. De plus les nombreuses interrogations soulevées par le comité persistent et sont confortées par les publications les plus récentes ».

Pour l’innocuité du Mon 810, le rapport confirme les interrogations déjà soulevées et ajoute que pour « les tests de comparaison en champs des densités des insectes dans les champs de maïs Bt versus non Bt, la difficulté permanente reste le raccourci systématique selon lequel l’absence d’effet significatif mis en évidence est interprétée comme une absence d’effet, en ne discutant que rarement de la puissance des tests réalisés ». Après avoir rappelé « l’insuffisance technique et numérique des études présentées » tant dans le domaine économique que de l’innocuité des PGM, le groupe d’experts explique que, sur les risques liés à la dissémination du Mon 810, dans l’analyse des publications citées par Monsanto ainsi que des nouvelles publiées depuis janvier 2008, « les données scientifiques en faveur d’une telle innocuité ne sont pas suffisamment robustes et n’autorisent pas scientifiquement une telle affirmation [absence de risques liés à la dissémination du maïs Mon 810] ». Il note également que pour « la plupart des auteurs, y compris parmi ceux cités par Monsanto, des études à plus long terme et de plus vaste spectre sont indispensables ».

Et maintenant ?

Le 9 octobre, l’AESA discutait « science » avec leurs homologues français. Les teneurs et conclusions de cette discussion ne sont pas connues. Dernière minute : le 31 octobre, l’AESA a publié son avis selon lequel la France n’apporte pas de nouveaux éléments pour justifier l’interdiction du Mon 810. Inf’OGM décryptera cet avis dans le prochain bulletin. En attendant, vous pouvez lire l’avis de l’AESA sur notre site.

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