L’importance de la contre-expertise dans le domaine scientifique est une des conclusions majeures du débat en cours. Inf’OGM demande aux institutions françaises et européennes en charge de l’évaluation des dossiers d’autorisations de plantes génétiquement modifiées la publication in extenso et dans un format utilisable des données brutes des expériences menées par les "pétitionnaires" (i.e. les entreprises ou universités) [1] contenues dans ces dossiers. Sans cette transparence fondamentale, aucune contre-expertise ne peut être menée. Inf’OGM rappelle que les rares fois où ces données ont été obtenues, ce fut suite à des procédures judiciaires, mobilisant notamment, en France, la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA). Cet état de fait est inadmissible et dénote un déficit important de démocratie liée aux enjeux technologiques et économiques.
Inf’OGM est d’autre part surprise qu’un certain nombre de critiques faites à l’étude de Gilles-Eric Séralini n’aient jamais été exprimées à l’encontre des études qui ont permis d’obtenir les autorisations commerciales, et pourtant réalisées dans des conditions similaires... Les attaques concernant le protocole suivi par l’équipe de Gilles-Eric Séralini posent notamment question sachant qu’il respecte et va même parfois au-delà du protocole recommandé par l’OCDE (notamment la race, le mode de nourrissage des rats et le nombre de paramètres étudiés [2]). Manifestement, toute étude sur les OGM ne bénéficie pas du même accueil, selon qu’elle présente des résultats en faveur ou en défaveur des OGM. Quant aux dossiers de demandes d’autorisation des OGM, AUCUN ne comporte une étude de puissance statistique !
Inf’OGM rappelle avoir demandé la réévaluation de tous les OGM (autorisés et en cours d’autorisation). En effet, les lacunes de l’évaluation ne concernent pas seulement les études de toxicologie mais l’ensemble de l’évaluation [3]. Cette demande avait déjà été portée au niveau national [4]. L’étude de G.-E. Séralini a permis de faire émerger des critiques applicables à l’ensemble des évaluations menées jusqu’à présent.
Enfin, et surtout, Inf’OGM souhaite rappeler que le débat actuel, débat « technico-scientifique », est loin de couvrir l’ensemble des questions posées par l’utilisation du génie génétique en agriculture. Le sujet est beaucoup plus vaste et ne peut être monopolisé par des considérations purement scientifiques. La première question qu’il faut se poser, dans sa complexité, est celle du rapport avantages / inconvénients d’une PGM, en prenant soin de comparer des risques et des bénéfices comparables... Un avantage pour un agriculteur qui, avec les variétés Roundup Ready telles le NK603, peut économiser un passage de tracteur, n’est nullement comparable avec un inconvénient potentiellement irréversible pour la biosphère ou si cela conduit à des pratiques agricoles non durables.
Une autre question fondamentale est de savoir si, dans le contexte de l’agriculture française et européenne, nous avons besoin des variétés GM actuellement commercialisées.
Inf’OGM considère que le développement exponentiel des techno-sciences, tant au niveau de leur diversité que de leur rapidité d’adoption, oblige à changer radicalement la façon d’aborder ces questions et que le citoyen doit avoir toute sa place dans les choix à venir.