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OGM – Réflexions suite au suicide d’un agriculteur du Lot

Par Christophe NOISETTE

Publié le 03/09/2007

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Dimanche 5 août 2007, M. Lagorse, éleveur – agriculteur dans le Lot se suicidait, le matin même où plusieurs associations anti-OGM se donnaient rendez-vous pour un pique-nique, à proximité de sa parcelle de maïs GM mon810, qu’il cultivait en secret.

Il a voulu clairement faire de sa détresse un argument anti-faucheur : il a mis en scène son opposition aux faucheurs. C’était son droit. Mais, ne tirons pas des conclusions trop simplistes, trop rapidement. Il n’y a jamais une seule raison à un suicide : c’est toujours un faisceau de raisons, complexes, imbriquées, qui conduit à un homme à cet acte irréversible. Comme l’écrit Hervé Kempf, dans le Monde : « Rien ne permet d’attribuer ce drame à la question des OGM. Mais le retentissement qu’il a eu témoigne de la charge émotionnelle dont est devenu porteur le dossier ». Autrement dit, c’est la première fois qu’un agriculteur français qui cultive des OGM se suicide en mettant à ses pieds un tract de la Confédération paysanne. Ceci est un fait, non une preuve. En criminologie, on ne s’arrête jamais aux premiers indices trouvés, on cherche derrière les faits, les causes profondes, les mobiles … Et d’autant qu’il existe en droit français la notion de « provocation au suicide ». Or ce motif a été explicitement écarté par les enquêteurs et le procureur de la République. Mais cette polémique ne m’intéresse pas. Je préfère chercher à comprendre plutôt qu’à trouver des boucs-émissaires.

Un élément qu’il est important de prendre en compte : il y a en moyenne un suicide d’agriculteur par jour en France et on n’en parle pas.

Deuxième point : quand on évoque les très nombreux suicides des agriculteurs indiens, endettés, qui avaient été tentés par la technologie du coton Bt, les entreprises semencières cherchent vaille que vaille à minimiser ces actes pourtant nombreux : elles expliquent alors que ce n’est pas l’échec du coton GM qui était la cause de leur suicide. Maintenant, elles utilisent ce dernier suicide pour dire : « regardez ce que provoque la contestation anti-OGM menée par les Faucheurs volontaires ».

Par respect pour ces hommes, ne les instrumentalisons pas trop.

Essayons de comprendre, calmement et de façon argumentée, le pourquoi de ces suicides, essayons d’entendre la désespérance des agriculteurs à travers le monde, pris entre les demandes de plus en plus exigeantes des consommateurs, les prix globalement de plus en plus bas du marché mondial, un accès difficile au foncier, une main-mise excessive des coopératives, etc. Mettons tout dans la balance, les OGM, mais aussi la perte d’autonomie, la dévalorisation par les citoyens urbains ou néo ruraux, de ce travail qui est pourtant à la base de notre vie quotidienne… En faisant ceci, je ne cherche qu’une seule chose : redonner ses lettres de noblesse à l’agriculture, qui doit être source de vie et non de profit à court terme, une agriculture qui nourrit les gens et rémunère correctement, qui améliore les sols et protège les ressources naturelles, qui innove et se diversifie. Je refuse la pensée dominante du profit à court terme, pensée qui accule les agriculteurs à produire toujours plus pour un revenu toujours plus faible, à produire toujours plus avec toujours moins de main d’œuvre et de reconnaissance, à produire toujours plus pour inonder les marchés internationaux et vendre du poulet congelé en Afrique subsaharienne… Pour moi le diktat est là, le harcèlement moral est là. Il est dans une vision simpliste, réductionniste de l’agriculture qui consiste à ne voir en elle qu’un marché comme un autre, qui ne voit que des chiffres là où il y a des hommes, des terroirs, des enjeux de société. Pour conclure, je crois qu’il faut chercher à augmenter l’autonomie des agriculteurs, les sortir de cette logique néo-libérale, qui les oppresse et les conduit à la dépression, voire au suicide. Il faut, ensemble, agriculteurs, chercheurs, journalistes et consommateurs, se demander ce que l’on souhaite en termes d’alimentation, de paysage, de santé publique, etc. et ensemble chercher les solutions les plus durables. Ces solutions passeront forcément par une remise en cause de la logique simplificatrice actuellement en vigueur… Il faut accepter de vivre le monde tel qu’il est : complexe et fait de diversité.

PS : Et si on en vient à parler de « harcèlement moral » de la part des anti-OGM, ayons la décence de dénoncer ce harcèlement moral à tous les niveaux… Que dire de ces différents scientifiques (Hilbeck , Malatesta, Putzaï, Chapela…) qui pour avoir osé critiquer, études à l’appui, l’innocuité des OGM se sont retrouvés licenciés, déplacés, placardisés, etc.

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