Actualités

L’opposition à Monsanto se renforce partout dans le monde. Sa santé financière aussi…

Par Christophe NOISETTE

Publié le 06/04/2012

Partager

De Montevideo à Washington, en passant par Paris, l’opposition aux OGM et autres produits vendus par Monsanto s’affiche. Le 4 avril 2012, les Amis de la Terre, Via Campesina et Combat Monsanto ont rendu public un rapport – « Combattre Monsanto : résistance populaire au pouvoir de l’industrie agroalimentaire à l’heure de ‘l’économie verte’ et du changement climatique » [1] – qui montre que partout dans le monde, les agriculteurs, les communautés rurales et la société civile rejettent le modèle agro-industriel dont les OGM ne sont que l’ultime avatar.

Ce rapport fait le point sur les grandes luttes contre les OGM menées dans le monde entier. Il décrit ainsi, par exemple, le combat des Faucheurs volontaires ou la campagne « Semons la biodiversité » en France ; les grandes manifestations espagnoles pour dénoncer les OGM ; le mouvement allemand pour obtenir des zones sans OGM ; l’importance des luttes indiennes en réaction aux nombreux suicides d’agriculteurs ; il rappelle aussi qu’à Haïti « les mobilisations de masse ont rejeté les dons de semences hybrides après le tremblement de terre, en raison des menaces que cette « aide » faisait peser sur les petits paysans et la souveraineté alimentaire de ce pays  » ; qu’en Argentine, un des pays qui accueille le plus de cultures transgéniques, « un tribunal (…) a confirmé une injonction interdisant l’épandage de pesticides près des habitations dans la province de Chaco » ; et qu’au Pérou, un moratoire de dix ans a été décrété sur les OGM… La liste des actions, mobilisations et victoires n’est pas exhaustive : elle cherche seulement à « démontre[r] que les fortes objections des mouvements sociaux et des organisations de la société civile ont un impact sur les décideurs politiques chargés d’encadrer le secteur agroalimentaire et d’édicter les règles en matière de pesticides et de cultures transgéniques ».

Cependant, les auteurs ne sont pas dupes, ils savent que « les militants anti-OGM doivent cependant faire face à de nombreux défis, en France et dans le monde. Parmi ces obstacles on compte des procès, des pressions pour lever les moratoires existant en Europe, et des techniques de lobbying agressif déployées par l’industrie agroalimentaire. Les firmes sont ainsi passées par la justice française et européenne pour annuler le moratoire français sur le maïs MON810, bien que le gouvernement français ait depuis annoncé sa volonté de le rétablir ».

Les multiples témoignages et analyses contenues dans ce rapport ont pour objectif d’inspirer et d’unir les consommateurs, les militants et les différentes communautés pour lutter contre les abus de Monsanto et des autres firmes de biotechnologies dans le monde. Ainsi, commente Josie Riffaud de la Via Campesina : « Le récit de ces luttes démontre que l’opposition des mouvements sociaux et de la société civile a un impact réel sur l’introduction des OGM. Les législateurs ne peuvent plus ignorer les exigences de leurs concitoyens lors de la rédaction des textes réglementant les OGM et les pesticides dans l’alimentation et le secteur agricole. Ce n’est plus à Monsanto de faire la loi ».
Pour les auteurs du rapport, « un système alimentaire mondial basé uniquement sur le profit, et non la production durable dans le cadre de la souveraineté alimentaire, risque d’aggraver les inégalités sociales, la pauvreté et la surexploitation des ressources naturelles  ». Actuellement, précisent-ils, « la surface totale des cultures GM recouvre 3% de la surface agricole mondiale. […] L’essentiel des plantes GM sert à nourrir les animaux d’élevage ou à produire les agrocarburants destinés aux pays riches ».

Mais santé financière insolente pour Monsanto

En parallèle à la sortie de ce rapport, Monsanto annonçait [2] paradoxalement que le deuxième trimestre de son exercice « décalé » (c’est-à-dire terminé au 29 février 2012) a connu des « résultats records » et supérieurs aux attentes de l’entreprise. Sur cette période, la vente de semences de maïs est ainsi passée de 2,4 milliards de dollars pendant la même période en 2011 à 2,82 milliards en 2012, et pour les semences de soja, de 615 à 689 millions de dollars. Monsanto précise que ces bons résultats sont liés à de bonnes ventes en Amérique latine et au succès de son soja empilé Genuity® Roundup Ready 2 Yield® aux Etats-Unis.

En revanche, les ventes de semences de coton et de légumes ont légèrement diminué, passant respectivement de 67 millions de dollars (2011) à 66 (2012) et de 229 millions de dollars (2011) à 215 (2012).

En conséquence, le chiffre d’affaire brut de Monsanto est passé de 4,131 milliards de dollars à 4,748 milliards de dollars et le bénéfice brut de 2,3 milliards à 2,7 milliards de dollars, soit environ une augmentation de 17%. Sur les six derniers mois, le bénéfice brut est en hausse de 21 % par rapport à la même période en 2011.

« Nous avons eu un très bon début d’exercice avec une réelle croissance en Amérique latine, [notamment dans le domaine des semences de maïs], et des commandes aux Etats-Unis laissant présager que cette bonne dynamique va se poursuivre en 2012 », a commenté Hugh Grant, PDG de Monsanto.

Le triomphalisme du rapport citoyen est donc à relativiser, du moins sur le court terme. On peut cependant se demander quels sommets auraient atteint les bénéfices de Monsanto sans cette mobilisation citoyenne massive.

Actualités
Faq
A lire également