n°101 - novembre / décembre 2009

Information et OGM : une nouvelle loi avant juin 2010 ?

Par Anne FURET

Publié le 07/12/2009

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Cet été, Chantal Jouanno, secrétaire d’Etat chargée de l’Ecologie,a annoncé une loi globale sur l’information et la participation du public avant juin 2010. Cette loi définira quelle information et quelle participation du public doivent être attendues dans le domaine des OGM. Certains pans de la réglementation internationale, européenne et française fournissent des cadres pour cette information. Quelles sont ces balises ? Et que peut-on attendre de l’encadrement français de l’information sur les OGM ?

L’annonce de la ministre intervient suite à l’annulation partielle par le Conseil d’État de deux décrets de 2007 [1] en ce qui concerne l’information et la participation du public dans le domaine des OGM. La raison ? En vertu de la charte de l’environnement, il appartient au Parlement et non au gouvernement, de décider en matière d’information et de participation du public sur l’environnement. C’est donc sur une question de compétence (et non sur le fond) qu’il y a eu annulation. Les points annulés concernent la fiche d’information du public affichée en mairie pour les expérimentations en plein champ, le caractère confidentiel de certaines données, le dispositif de consultation électronique du public, et l’information du public sur des impacts sanitaires et environnementaux nouveaux survenus après l’autorisation. Le jugement ne prendra pas effet avant le 30 juin 2010 car le Conseil d’État a décalé l’effet du jugement pour laisser le temps à la France d’adopter de nouvelles normes et afin de ne pas la placer en situation de carence vis-à-vis de la législation communautaire [2].

L’encadrement existant

La loi du 25 juin 2008 sur les OGM prévoit déjà des éléments d’information et de participation du public, comme le registre départemental de localisation parcellaire des cultures d’OGM, mis à la disposition du public par les préfectures et sur Internet. Elle mentionne la possibilité très encadrée de réunions locales d’information une fois les expérimentations implantées et en présence du titulaire de l’autorisation. Vient ensuite la disposition sur « une information et une participation du public précoces et effectives avant de prendre les décisions relatives à la culture des OGM et à la mise sur le marché » : transposition mot pour mot de la Convention d’Aarhus, mais trop vague pour se suffire à elle-même. On trouve enfin dans le code de l’environnement le principe moins récent selon lequel « Toute personne a le droit d’être informée sur les effets que la dissémination volontaire d’organismes génétiquement modifiés […] peut avoir pour la santé publique ou l’environnement, dans le respect de la confidentialité des informations protégées par la loi ». Mais malgré ce principe, on se souvient des multiples demandes infructueuses auprès de la France pour obtenir les études de toxicité du maïs Mon863, finalement obtenues devant un tribunal allemand à la demande de Greenpeace.

Avec une nouvelle loi, que peut-on espérer ?

Des textes internationaux plus ou moins précis fournissent des balises. Le protocole de Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques pose quelques principes (article 23), mais ils sont trop imprécis pour permettre un progrès de l’encadrement français.

La convention d’Aarhus, rédigée sous l’égide de l’ONU à destination des pays de la région Europe, est quant à elle plus précise et utile. Adoptée en 1998 et entrée en vigueur en 2001, elle s’organise autour de trois piliers : l’information, la participation et l’accès à la justice. Selon cet accord, toute personne doit pouvoir accéder à une information sur les OGM dans le mois suivant sa demande. Ce libre accès aux informations est néanmoins limité par de nombreuses exceptions tenant notamment au secret commercial et industriel, au caractère confidentiel de données personnelles, ou bien aux droits de propriété intellectuelle. C’est notamment sur le fondement de cette convention qu’un tribunal administratif français avait annulé en 2006 une autorisation d’essai, car une simple consultation électronique du public est incompatible avec la convention d’Aarhus [3].

D’autre part, la convention requiert une participation du public « efficace et en temps voulu […] lorsque toutes les options et solutions sont encore possibles », mais l’exigence est assouplie pour les OGM en précisant que dans ce cas, cela s’applique « dans la mesure où cela est possible et approprié » (art.6.11).

Un amendement douteux

En 2005, les États ont adopté un amendement à la convention sur cette question précise de la participation du public dans le domaine des OGM : l’amendement d’Amalty (du nom d’une ville du Kazakhstan). Cet amendement n’est pas encore entré en vigueur faute des ratifications suffisantes par les États membres (la France ne l’a toujours pas ratifié). Il réduit la marge de manœuvre des États en supprimant la possibilité d’une mise en œuvre « dans la mesure où cela est possible et approprié ». Mais la rédaction est moins précise qu’auparavant : « une information et une participation du public effectives », « dans un délai raisonnable ». Les États doivent « s’efforcer » de dûment prendre en compte les résultats de la participation. Certains commentateurs jugent le texte « affaibli » par rapport au dispositif précédent. Pour l’heure, 25 États ont ratifié l’amendement. Il en faudra 27 pour que le protocole entre en vigueur.

Dans tous les cas, que l’amendement entre ou non en vigueur, la future loi devra se conformer à la Convention d’Aarhus et mettre en place une participation du public pour les essais qui aille au-delà de la consultation électronique. Pourquoi ne pas compléter cette disposition d’une enquête publique ? Par ailleurs, le cadre français devra se conformer aux articles sur la confidentialité de la convention d’Aarhus et de la directive 2001/18 selon lesquels certaines informations peuvent être jugées confidentielles, mais en aucun cas cela ne peut concerner les informations portant sur la description générale de l’OGM, le but et le lieu de la dissémination, ainsi que les évaluations des risques pour l’environnement et la santé.

[1Décret n°2007-358 du 19 mars 2007, http://www.legifrance.gouv.fr/affic… et décret n° 2007-359 du 19 mars 2007, http://www.legifrance.gouv.fr/affic… 

[2CE, 24 juillet 2009, n°305314 et n°305315, http://www.conseil-etat.fr/cde/node…

[3Tribunal Administratif de Clermont-Ferrand, 4 mai 2006, n°0500998

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