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INTERNATIONAL – Selon l’ISAAA, aucun nouveau pays n’a cultivé d’OGM en 2011

Par Christophe NOISETTE

Publié le 09/02/2012

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L’Isaaa [1], organisme qui promeut les biotechnologies végétales dans les pays du Sud, a publié, le 7 février, son rapport annuel avec le bilan des cultures GM dans le monde. Selon l’Isaaa, « en 2011, 160 millions d’hectares ont été plantés », soit « 12 millions d’hectares supplémentaires (…), soit un taux de croissance annuelle de 8% par rapport à 2010 ».

Inf’OGM s’est déjà largement exprimée sur les rapports de l’Isaaa [2]. Cette année, rien de neuf : on retrouve les mêmes montages et les mêmes imprécisions. Les sources et la méthodologie ne sont toujours pas transparentes [3] et pour de nombreux pays, l’Isaaa s’appuie sur des chiffres fournis par l’industrie. Nous notions d’ailleurs en septembre 2011, qu’en Espagne, le mode de calcul des surfaces cultivées avec des OGM restait flou et approximatif : la surface plantée avec des PGM « est calculée sur la base des achats de semences : le ministère précise en effet que « l’estimation de superficie se base sur une dose moyenne de 85 000 semences par hectare » » [4]. Or ce chiffre issu de l’industrie sert ensuite de référence officielle. Voici les principaux enseignements de ce rapport.

Concrètement, les OGM restent cultivés dans les mêmes 29 pays, Etats-Unis en tête (43% des surfaces cultivées avec des OGM)… Et on retrouve les mêmes quatre espèces (soja, maïs, coton et colza), et les deux mêmes modifications génétiques (tolérance à un herbicide et production d’insecticide). Quatre pays du continent américain (Etats-Unis, Brésil, Argentine, Canada) représentent encore la très grande part des cultures d’OGM, avec 133,4 millions d’hectares (soit 83,4%). Autrement dit, 25 pays se partagent moins d’un cinquième des surfaces dédiées aux OGM. Sur les 12 millions d’hectares supplémentaires en 2011, 10 ont été « gagnés » sur le continent américain… C’est au Brésil que la progression en termes de surface a été la plus importante (environ 20%). Plus curieusement, une forte augmentation des cultures GM au Canada (+18%) est à noter. On notera aussi avec ironie que l’Allemagne est classée dans les pays qui cultivent moins de 0,1 million d’hectares… Effectivement, en 2011, nos voisins outre-Rhin ont cultivé 2 ha de pomme de terre Amflora…

Aucun nouveau pays n’a rejoint le club des transgéniculteurs et des pays comme l’Iran, l’Indonésie, la France, la Bulgarie qui avaient cultivés des PGM entre 2003 et 2005, n’ont pas jugé pertinent de relancer les cultures transgéniques sur leur territoire, du fait d’une oppposition citoyenne importante : en Indonésie, plusieurs évêques ont manifesté leur désaccord, en Bulgarie et en France, des moratoires sont venus stoppés les vélléités transgéniques, et en Iran, les fameuses cultures commerciales de riz trangéniques évoquées par l’Isaaaa en 2005 avaient été mises en doute par une enquête conjointe d’Inf’OGM et du Cenesta… On avait alors découvert qu’il s’agissait d’essais en champ. Depuis, aucune autorisation de mise en culture n’a été délivrée par le ministère de l’Agriculture.

Le rapport se félicite des « bons résultats » de la Chine et de l’Inde… Mais, il oublie de mentionner qu’en Chine, les réticences du gouvernement sont réelles et que le riz GM attendu depuis de nombreuses années n’a toujours pas été autorisé. De même, en Inde, si la culture de coton GM s’est bien répandue, c’est en partie lié au rachat par les grandes entreprises semencières des plus petites, provoquant la disparition progressive du choix des semences, à des publicités incessantes, et à une fuite en avant des cotonculteurs, endettés, qui cherchent coûte que coûte une solution aux nombreux parasites qui envahissent les champs de coton et qui sont donc prêts à croire les sirènes de la biotechnologie. Par ailleurs, plusieurs États, comme le Kérala, ne veulent toujours pas entendre parler d’OGM, même au stade d’essais en champs, et le gouvernement fédéral n’est pas encore enclin à autoriser d’autres PGM. Le moratoire sur l’aubergine court toujours dans toute l’Inde.

Le rapport annonce que « Le blé biotechnologique devrait être commercialisé avant 2020 ». Les rédacteurs s’en réjouissent, sans voir qu’une échéance aussi lointaine et qui a déjà été si souvent repoussée n’est pas très crédible.

Un rapport équilibré aurait mentionné aussi les chiffres montrant les limites de la technologie OGM. Ainsi, les surfaces où des plantes adventices ont acquis une ou plusieurs résistances à un herbicide n’ont cessé d’augmenter depuis les premières autorisations. Le rapport de l’Isaaa mentionne que 12 pays cultivent des plantes GM ayant deux ou plusieurs transgènes (soit 42,2 millions d’hectares ou 26% de la surface totale consacrée aux PGM). La stratégie de l’empilement est une stratégie claire des entreprises pour retarder l’apparition de résistances aux produits toxiques émis par (ou appliqués sur) la plante GM : l’empilement permet d’augmenter le spectre de d’action de la plante ou encore d’augmenter la tolérance de la plante à plusieurs herbicides.

[1International Service for the Acquisition of Agri-biotech Applications, ou Service international pour l’acquisition d’applications agricoles biotechnologiques, http://www.isaaa.org

[3Par exemple, pour l’Inde, le rapport évoque des millions de paysans qui cultivent du coton Bt GM mais ce chiffre est approximatif, lié à des calculs sur la base d’achats de semences divisés par des surfaces moyennes… bref, une équation peu fiable, mais toujours évaluée à la hausse, pour faire mousser les chiffres et donner une impression d’importance.

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