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FRANCE – OGM : Maïs Ga21, un avis mitigé du HCB !

Par Eric MEUNIER

Publié le 15/10/2012

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Le Haut Conseil des Biotechnologies (HCB) a publié en mai 2012 son avis, pour le moins mitigé, sur la demande d’autorisation déposée par Syngenta (UK/2008/60) pour le maïs Ga21 [1].

L’avis du HCB est double, avec d’un côté celui de son Comité scientifique (CS) et de l’autre, les recommandations de son Comité économique, éthique et social (CEES). Ce maïs a été modifié génétiquement pour tolérer les herbicides à base de glyphosate. L’autorisation demandée vise la culture, l’importation, la transformation, l’alimentation humaine et l’alimentation animale.

La conclusion du Comité scientifique du HCB est claire : l’autorisation – si elle devait être donnée – doit être conditionnée à une révision des plans de surveillance post-commercialisation. Ceux fournis par Syngenta sont jugés comme manquant globalement de précision. Le CS demande également que l’utilisation des herbicides à base de glyphosate fasse l’objet d’un encadrement plus rigoureux. Mais d’autres éléments de la conclusion de l’avis sont à souligner :

- les analyses de toxicité et d’alimentarité présentées souffrent d’une absence d’indication sur la puissance statistique. Si le CS « reconnaît que les études réalisées ne mettent pas en évidence de problème sanitaire particulier associé au maïs Ga21 », il considère néanmoins ne pas être en mesure d’étendre ces résultats « à l’ensemble de la population ». Bien que le terme population ne soit pas clair quant à la population concernée, il faut retenir que les experts français estiment ne pas pouvoir répondre sur la toxicité de ce maïs pour l’homme par exemple ;

- Syngenta conclut à l’équivalence en substance de son maïs Ga21 avec le maïs quasi isogénique utilisé comme comparateur. Or les experts soulignent que l’entreprise n’a pas fourni de tests statistiques d’équivalence. Cette conclusion est donc abusive ;

- aucun plan de surveillance de l’apparition de plantes adventices résistantes au glyphosate n’a été fourni par Syngenta, surveillance pourtant recommandée par le HCB.

Construction aléatoire et effets inattendus

D’autres points soulevés dans l’avis mais non repris dans la conclusion sont également intéressants à souligner :

Premièrement, l’imprécision de la transgenèse : le maïs Ga21 a été modifié par transgenèse pour produire une protéine EPSPS mutée, lui conférant ainsi une tolérance aux herbicides à base de glyphosate (la protéine mutée n’étant pas inactivée par le glyphosate). Or ce n’est pas UN transgène qui s’est introduit dans le génome mais pas moins de six, au même endroit ! Et encore, tous ne sont pas entiers puisque « trois copies sont complètes, trois copies sont tronquées ». Une séquence chloroplastique s’est également insérée sans qu’en soit expliquée la raison. Et le CS souligne « qu’en l’absence de séquençage supplémentaire côté 5’, la nature de la jonction entre la région d’ADN chloroplastique et l’ADN nucléaire n’est pas caractérisée. Ces données laissent supposer que la transformation par bombardement a entraîné des réarrangements moléculaires importants ».

Le CS souligne également, en complément de l’analyse du dossier en lui-même, que les systèmes de cultures de maïs tolérant le glyphosate ont eu, par le passé, des effets inattendus associés à l’application du glyphosate sur le maïs GA21. Parmi ces effets, « l’implication dans une sensibilité accrue à certaines maladies a été suggérée par certains scientifiques, puis rejetée par d’autres ». Une expertise collective Inra – CNRS a en effet rapporté des cas de maladies sur coton ou soja liées à l’utilisation de glyphosate [2].

Concernant les aspects socio-économiques, si le CEES reconnaît certains avantages liés à la culture d’un tel maïs GM (notamment la facilitation des pratiques de désherbage), il souligne que de tels bénéfices doivent être relativisés, notamment au vu des « coûts induits par la coexistence des cultures », aujourd’hui inconnus, et de la pérennité de la stratégie agricole utilisant de telles variétés tolérantes aux herbicides. Une pérennité remise en cause par l’expertise collective INRA – CNRS dont les résultats ont été publiés en début d’année [3]. Le CEES souligne enfin que les avantages et inconvénients des plantes tolérantes aux herbicides ne peuvent être évalués à ce jour, des analyses comparant le couple « maïs tolérant / glyphosate » et le couple « maïs conventionnel / herbicides sélectifs » devant encore être faites. De même que des analyses portant sur les effets cumulatifs de la présence de plusieurs cultures tolérant le même herbicide.

A lire l’avis du HCB, le maïs Ga21 est donc insuffisamment caractérisé au niveau génétique, les résultats d’analyses de toxicité et d’alimentarité ne sont pas interprétables, l’équivalence en substance n’a pas été montrée, des problèmes se posent quant à l’utilisation du glyphosate, et l’évaluation socio-économique ne peut être conduite du fait du manque de données. Le gouvernement français doit maintenant décider s’il souhaite voter en faveur de l’autorisation, contre l’autorisation ou s’abstenir lorsque la Commission européenne décidera de mettre ce dossier sur la table. Une décision peut-être pas si difficile à prendre au vu de l’avis rendu… Mais l’expérience du maïs Mir162 montre cependant qu’avec un avis faisant état de lacunes importantes, le gouvernement français choisit de s’abstenir plutôt que de voter contre une autorisation commerciale.

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