n°92 - mai / juin 2008

ETATS-UNIS : Des PGM sur la sellette

Par Eric MEUNIER

Publié le 09/05/2008

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Deux autorisations données par le gouvernement des Etats-Unis pour la commercialisation de plantes transgéniques sont attaquées en justice, avec notamment gain de cause pour la plainte qui portait sur la luzerne GM. 

Luzerne GM : autorisation suspendue

L’autorisation donnée en 2005 à Monsanto de commercialisation de luzernes transgéniques, tolérantes à l’herbicide Round Up, est suspendue depuis février 2007 sur décision d’un tribunal de Californie du Nord. Pour ce tribunal, l’Inspection sanitaire des plantes et des animaux du ministère de l’Agriculture (APHIS – en charge des demandes d’autorisation) a violé la loi nationale en n’évaluant pas suffisamment les impacts environnementaux liés à ces luzernes GM, notamment en sous-estimant les risques liés à la dissémination par le pollen et les risques de contamination des cultures biologiques et conventionnelles. Comment cette sous-estimation a pu avoir lieu ? Le tribunal explique que l’APHIS prenait acte de l’absence de constatation d’impacts environnementaux plutôt que de chercher à les évaluer. Confirmant en mai [1] puis en juillet 2007 sa décision initiale, le tribunal l’a enrichie d’une liste de mesures prévues en vue du conditionnement des luzernes transgéniques par les agriculteurs et distributeurs, l’étiquetage des containers et le nettoyage des équipements utilisés. Mais surtout, l’APHIS devait conduire une évaluation environnementale réelle. Depuis, l’APHIS a identifié 18 points critiques à analyser, à l’image des impacts sur l’alimentation animale et humaine, sur le commerce états-unien et sur des espèces menacées ou en danger [2]. Les résultats de la conduite de ces études sont en attente.

Le jugement de mai 2007 est l’occasion de comprendre l’approche qu’a un organisme comme l’APHIS des risques environnementaux liés aux PGM. Ainsi, le jugement fait apparaître que pour l’APHIS, “même si l’autorisation commerciale de luzerne transgénique pouvait conduire à l’élimination de toutes luzernes non transgéniques – en d’autres termes, toute luzerne cultivée aux Etats-Unis serait pourvue du gène conférant la tolérance au Round Up – un tel résultat ne constituerait toujours pas un impact sur l’environnement significatif, l’APHIS ayant établi que l’introduction de ce gène à la luzerne était sans risque toxique ou pathologique pour l’homme et le bétail” [3]. L’APHIS considère que la contamination des cultures voisines, si elle n’entraîne pas de risque pour la santé, n’est pas un problème. Le tribunal n’a pas suivi ce raisonnement et les luzernes transgéniques ne sont donc plus autorisées commercialement à ce jour.

La betterave GM, bientôt interdite ?

A l’image de ce qui s’est passé pour la luzerne GM, l’autorisation commerciale de la betterave transgénique H7-1 de Monsanto, tolérante au Round Up, donnée en 2005 est à son tour l’objet d’une plainte déposée auprès d’un tribunal californien par quatre organisations : Organic Seed Alliance, Sierra Club, High Mowing Organic Seeds, et Center for Food Safety[[ http://www.centerforfoodsafety.org/…]. Ces structures dénoncent l’absence d’évaluation correcte des impacts environnementaux de cette betterave, non conforme selon elles avec les exigences de la loi nationale de protection de l’environnement, comme dans le cas des luzernes. Mais à plante différente, procédure juridique différente. Il reste donc à attendre les premières décisions du tribunal californien pour savoir si les conclusions seront les mêmes. Cette betterave devait être plantée commercialement aux Etats-Unis pour la première fois cette année. En octobre 2007, l’Union européenne autorisait la commercialisation de cette betterave pour l’importation, l’alimentation humaine et animale, sans évaluer les impacts environnementaux puisque non destinée à la culture. Dans le cas où la justice états-unienne suspend l’autorisation pour défaut d’évaluation environnementale, il sera intéressant de voir si l’UE lève également son autorisation, considérant que l’importation de cette betterave aura donc impliqué des impacts environnementaux dans son lieu de culture.

“On n’en veut pas !”

En parallèle à l’action en justice, le Centre Interconfessionnel sur la Responsabilité d’Entreprises, une Coalition de plus de 300 investisseurs, a lancé, en avril 2008, une cyberaction. A partir du site www.dontplantgmobeets.org, les consommateurs peuvent envoyer une lettre dans laquelle ils expriment leur volonté de ne pas acheter de produits issus de betteraves transgéniques aux 63 entreprises ciblées par la Coalition, comme PepsiCo, Heinz, Kraft… Par le passé, l’ICCR avait déjà obtenu d’entreprises comme McDonald’s, Campbell’s soup ou Anheuser Busch un engagement à ne pas utiliser d’aliments transgéniques.

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