La Commission a refusé tout travail de ses propres experts sur la traçabilité des nouveaux OGM

Entre 2014 et 2021, la Commission européenne a toujours refusé que ses experts mettent en place un programme de recherche et d’expérimentation sur la détection des nouveaux OGM. Le sujet est pourtant clef : afin d’obtenir leur dérèglementation, les entreprises arguent qu’ils est impossible de les tracer.

Inf’OGM a étudié de près tous les compte-rendus disponibles de l’ENGL, le réseau des laboratoires européens sur la détection des OGM. La Commission européenne, certains États membres et les entreprises semencières affirment que les nouveaux OGM ne sont ni détectables ni traçables, mais ne le démontrent pas. En effet, la Commission refuse systématiquement que les experts de l’ENGL mettent en place un programme de travail de recherche et d’expérimentations sur la détection et traçabilité des nouveaux OGM. La raison de cette obstination serait-elle la volonté politique de la Commission de déréguler les nouveaux OGM ?

Récemment encore, la Commission européenne a exprimé son souhait de modifier leur réglementation en déclarant que « avec le système législatif actuel, il existe des défis quant à sa mise en œuvre et son renforcement, en particulier pour la détection et différenciation des produits de nouvelles techniques qui ne contiennent pas de matériel génétique étranger inséré ».

Pour Eric Meunier, journaliste à Inf’OGM, « diverses publications montrent pourtant que cette traçabilité pourrait être possible si un programme européen de recherche était mis en place comme le réclame la France et d’autres États membres. En effet, toutes modifications génétiques laissent des cicatrices dans le génome. Ce sont des traces que les experts pourraient utiliser comme signatures. Mais le refus de la Commission interroge sérieusement sur ses intentions... ».

Retour chronologique sur une absence de volonté politique :

  • En 2014, le Réseau européen des laboratoires (ENGL) estime « prématuré d’établir un groupe de travail de l’ENGL puisque la définition des aspects légaux est en cours ». L’idée d’organiser un atelier pour discuter des techniques et stratégies de détection et de distinction est proposée mais, en 2015, « aucun conférencier apte sur les nouvelles techniques n’a été trouvé ».
  • En 2016, l’ENGL affirme que la détection des variations génomiques induites par les nouvelles techniques de modification génétique « constitue de nouveaux défis pour les laboratoires de contrôles et, dans ce sens, l’ENGL peut contribuer à la sensibilisation sur cette question et au partage des idées et des informations disponibles ». Aucune suite n’est donnée par la Commission européenne.
  • En 2017, la Commission européenne refuse ouvertement que l’ENGL se penche plus avant sur ce thème.
  • Le 25 juillet 2018, quand la Cour de Justice de l’Union européenne rend son arrêt sur le caractère OGM réglementé des produits récents issus de mutagénèse, la Commission n’a aucune donnée théorique ou expérimentale en provenance de ses experts sur le sujet. Elle les mandate alors pour obtenir un rapport sur « la détection des produits végétaux alimentaires obtenus par les nouvelles techniques de mutagénèse ».
  • Le rapport de l’ENGL, publié en mars 2019, donne « des arguments aussi bien à ceux qui affirment qu’il n’est pas possible de tracer les nouveaux OGM qu’à ceux qui affirment que cela est possible, pour peu que l’Union européenne le veuille » révèle Inf’OGM. Ce rapport a d’ailleurs été fortement co-écrit par la Commission elle-même.
  • Par la suite, les experts de l’ENGL continuent de suggérer la mise en œuvre d’études expérimentales, sans réponse de la Commission.
  • En 2020, les membres de l’ENGL se voient refuser de contribuer à l’étude de la Commission sur le statut légal des produits obtenus par les nouvelles techniques de modification génétique. En mars 2021, la Commission européenne refuse de financer des programmes de recherche sur la détection des nouveaux OGM.

Durant ces huit dernières années, la Commission européenne est restée silencieuse à toute suggestion de travail expérimental poussé de ses propres experts en détection. Cela ne l’a pas empêché de proposer, fin avril dernier, la dérèglementation des OGM non transgéniques, notamment car leur traçabilité serait très difficile...

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