n°164 - juillet /septembre 2021

Des vaccins OGM pour faire accepter les plantes OGM

Par Christophe NOISETTE

Publié le 13/09/2021

Partager

Vu la méfiance à l’égard des pesticides de synthèse, il n’est pas facile de vendre des OGM qui tolèrent un herbicide. Cette « innovation » n’apparaît pas pour le grand public en Europe comme nécessaire. Comment faire passer la pilule ? La santé semble un bon cheval de Troie…

En 1999, Ingo Potrykus annonce, à grand renfort de soutien médiatique, l’arrivée imminente d’un riz transgénique pour lutter contre la cécité. Ce riz « doré », plus de 20 ans après, n’est toujours pas cultivé… alors que le soja Roundup Ready, qui tolère l’herbicide à base de glyphosate, est cultivé sur des millions d’hectares. Le riz doré n’est pas un cas isolé. De nombreuses promesses ont tenté de faire diversion [1] [2] [3].

La pandémie peut favoriser les OGM

La pandémie actuelle est une nouvelle occasion pour les promoteurs des OGM de redorer leur blason. Une offensive médiatique est orchestrée, comme une tribune publiée dans Le Monde intitulée « Le génie génétique, paradoxalement accepté pour les vaccins mais refusé pour la betterave » [4]. Cette tribune est signée par des chercheurs pro-OGM comme David Bouchez de l’Institut Jean-Pierre Bourgin (Inrae)

 [5].

L’introduction de cette tribune donne le ton : les gouvernements bloqueraient un remède « écologiquement et socialement acceptable », sous-entendu les plantes GM. Le mot remède n’est pas là par hasard.

Les signataires affirment qu’il a fallu moins d’un an pour mettre au point un vaccin contre la Covid-19 grâce à l’ingénierie génétique, fait « unique dans les annales de la médecine » [6]. Et plus loin que « les vaccins de nouvelle génération sont, dans l’état des connaissances, sûrs et efficaces, et notre meilleure arme pour juguler la pandémie » alors qu’on n’en sait encore pas grand chose. La jonction entre santé et agriculture est réalisée : « Parallèlement, une épidémie virale se répand dans les champs de betterave ».

Tout d’abord, les signataires insinuent que les OGM ne sont que la continuité de la sélection ancestrale : « Les betteraves (…) résultent d’une sélection génétique effectuée par les humains à partir des plantes sauvages ». L’expression « sélection génétique » entretient une confusion volontaire [7]. Nos ancêtres ne pratiquaient pas la sélection sur des gènes, mais sur des caractères morphologiques.

Ensuite, ils avancent que grâce à « cette sélection génétique, (…) la production de sucre est ainsi passée (…) de 3,5 tonnes à 13 tonnes par ha, en utilisant trois fois moins d’engrais ». La sélection vantée est ici en fait classique. Elle ne peut justifier les modifications génétiques. On ne justifie pas la fusée avec la voiture.

Quant aux infections virales, plusieurs publications scientifiques suggèrent qu’elles pourraient être liées à un appauvrissement de la biodiversité, que ces champs de monocultures de betteraves illustrent assez bien [8].

Un parallèle inapproprié

Après avoir préparé les esprits (continuité et efficacité des manipulations génétiques), les signataires reviennent à leur objectif : pour lutter contre les infections virales actuelles des betteraves, la stratégie classique des croisements « prendra donc une dizaine d’années, sans garantie de succès ». Ainsi, « il semblerait donc cohérent de choisir une stratégie de production de betteraves génétiquement modifiées résistantes aux virus, écologiquement vertueuse et sans risques ». Les deux derniers qualificatifs ne sont pas plus démontrés que l’efficacité annoncée de cette stratégie. La tribune déplore : « Cette solution simple et écologique n’a aucun avenir. Le processus européen d’autorisation [des OGM] est le plus verrouillé du monde. (…) La cause en est l’impossibilité politique d’une réflexion apaisée, rationnelle et démocratique sur leur usage, attestée par la destruction systématique des essais expérimentaux ».

Les signataires concluent leur ode aux OGM par ces mots : « S’il peut paraître exagéré de comparer la pandémie de Covid-19 et la jaunisse de la betterave, (…) on peut se féliciter qu’un consensus favorable émerge concernant les technologies vaccinales appliquées aux humains, (…) mais il est paradoxal que les [OGM] rencontrent encore autant de résistance, lorsqu’elles peuvent concourir à résoudre des problèmes agronomiques de façon écologiquement et socialement acceptable ». En fait l’inquiétude liée à la Covid, en partie fabriquée ou du moins consolidée par les médias dominants, a été utilisée pour éviter un tel débat. Et ceux qui craignent de participer à cette expérimentation sont accusés de conspirationnistes ou d’irrationnels.

Le but de cette tribune est de profiter de l’imposition des vaccins pour que les autorités autorisent les OGM plus facilement, avec moins de précaution, et si possible sans que ces plantes ne soient étiquetées… ce qui évitera au citoyen « irrationnel » d’avoir peur…

[4Le Monde, opinions : « Le génie génétique, paradoxalement accepté pour les vaccins mais refusé pour la betterave », tribune collective, 27 janvier 2021

[5Une grande partie des autres signataires travaillent pour le Centre d’Étude Atomique (CEA) . Or le CEA, avec le concours de l’Inra, a lancé dans les années 50 les premières plantes génétiquement mutées par irradiation.

Actualités
Faq
A lire également