Les laboratoires autorisés à manipuler des micro-organismes (virus, bactéries…) provoquant un taux de mortalité très élevé en cas d’infection sont désignés comme P4 (pathogène de classe 4 ou BSL4 en anglais). Les conditions de travail y sont strictes mais semblent insuffisantes.
Des fuites de laboratoires avérées...
Dans son livre Baseless [3], Nicholson Baker mentionne plusieurs cas où des accidents se sont produits dans des laboratoires hautement sécurisés. « En 1960, des centaines de scientifiques et de techniciens américains ont été hospitalisés, victimes des maladies qu’ils tentaient de combattre. Charles Armstrong, des National Institutes of Health, l’un des consultants fondateurs du programme américain de guerre bactériologique, a étudié la fièvre Q [coxiellose] à trois reprises, et les trois fois, des scientifiques et des employés sont tombés malades ».
Aux États-Unis, "plus de 1 100 incidents de laboratoire impliquant des bactéries, des virus et des toxines qui posent des risques importants ou de bioterrorisme pour les personnes et l’agriculture ont été signalés aux régulateurs fédéraux entre 2008 et 2012", rapporte USA Today en 2014 [4] .
La fièvre H1N1 a circulé pendant des décennies puis a disparu en 1957, elle est réapparue en 1977. Or, la séquence génétique isolée en 1977 et d’autres collectées dans les années 50 sont « presque identiques, ce qui indique que le virus ne s’était pas répliqué et n’avait pas évolué dans l’intervalle, et qu’il avait probablement été conservé dans un congélateur de laboratoire entre 1950 et 1977 » [5].
Par ailleurs, le SARS-CoV qui a émergé en 2003 est sorti au moins quatre fois de laboratoires lors d’expérimentations [6].
Les « fuites » peuvent être dues à du matériel défectueux. En 2007, le virus de la fièvre aphteuse est réapparu dans la région de Surrey, en Grande-Bretagne [7]. Plusieurs rapports pointent du doigt une défaillance technique. Ainsi, le rapport officiel publié le 5 septembre 2007, indique que des traces du virus ont été trouvées dans un tuyau à l’institut Pirbright, allant d’un des deux laboratoires qui travaillent sur ce virus (celui du groupe Merial, propriété du groupe américain Merck et du français Sanofi Aventis) à la station d’épuration. Le rapport suggère que les racines des arbres ont pu endommager ce tuyau. La piste du laboratoire avait été privilégiée car la souche du virus retrouvée sur les animaux malades était « très semblable » à celle utilisée dans des laboratoires de recherche proches de l’exploitation [8].
…parfois dues à des erreurs humaines
Des erreurs humaines peuvent aussi être en cause. L’origine de la fièvre porcine, en 2009, est sujette à débat. Dans un article [9], trois chercheurs australiens montrent que ce virus a, au moins, trois origines. Ils expliquent que « les trois parents du virus peuvent avoir été rassemblés en un seul endroit par des moyens naturels, comme par des oiseaux migrateurs, mais le lien constant avec les virus porcins suggère que l’activité humaine a été impliquée. (…) Nous suggérons que des erreurs de laboratoire impliquant le partage d’isolats de virus et de cellules cultivées, ou peut-être la production de vaccins, aient pu être impliquées ». D’autres erreurs humaines peuvent être sources de diffusion de pathogènes dangereux. Ainsi en 2015, le ministère de la Défense des États-Unis a découvert que des salariés d’un centre d’essais de guerre bactériologique dans l’Utah avaient envoyé par erreur près de 200 cargaisons d’anthrax vivant à des laboratoires aux États-Unis, en Australie, en Allemagne, au Japon, en Corée du Sud, etc. au cours des douze années précédentes. Et bien d’autres causes de fuite peuvent être envisagées.
Ainsi, une fuite non intentionnelle d’un laboratoire du virus SARS-CoV-2 n’est pas une hypothèse à écarter sans démonstration à l’appui : étudier tous les possibles concernant l’origine de ce virus est une démarche de simple bon sens. Prendre cette démarche pour du "complotisme" est hors sujet.