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Des membres du parlement français veulent-ils redéfinir les OGM ?

Par Zoé JACQUINOT

Publié le 01/12/2020

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L’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) s’est réuni le 22 octobre pour renouveler son bureau. Cette réunion a également été l’occasion pour l’Office de parler de son programme de travail pour l’année à venir. Des discussions sur les nouvelles techniques de modification génétique sont annoncées, notamment sur Crispr/Cas9 et, plus litigieux, sur la définition légale des OGM…

Cédric Villani, député de « en marche », est membre de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST, voir encadré ci-dessous) depuis juillet 2017. Le 22 octobre 2020, élu président du bureau de cette instance, il présentait aux nouveaux membres le travail de cette institution : « un endroit un peu particulier au sein du Parlement, à l’abri des luttes politiciennes, où l’on trouve toujours des compromis transpartisans sur lesquels s’appuyer » [1]. À ses yeux, les rapports rendus par l’OPECST « ne sont jamais contestés et quand le Parlement, ou la classe politique plus généralement, a la bonne idée de les suivre, il en résulte toujours de bonnes conséquences ».

Le programme de travail de l’Office sur les OGM

Cédric Villani est ensuite revenu sur le programme de travail de l’OPECST. On apprend ainsi que l’Office fait l’objet d’une « saisine de la commission des affaires économiques de l’Assemblée sur les New Breeding Techniques (NBT), comprenez les nouvelles techniques de génie génétique ». Pour Cédric Villani, « la profusion de nouveaux outils, le débat tant sanitaire qu’économique doit être revu scientifiquement de manière dépassionnée à l’aune de ces découvertes ». Dans ce cadre, le prochain rendez-vous annoncé est celui d’une audition publique organisée par l’OPECST. Initialement programmée pour le 17 décembre, elle a cependant été repoussée à une date encore indéterminée a précisé l’OPECST à Inf’OGM, pour cause de « saisine urgente en lien avec la stratégie de vaccination contre la COVID-19« .

L’ambition du nouveau président de l’OPECST à travailler de manière « dépassionnée » risque pourtant de se heurter à une première difficulté. Pour travailler de manière « transpartisane », il paraît nécessaire de partir de la même base de vocabulaire. Celui utilisé par Cédric Villani, en l’occurrence « les nouvelles techniques de génie génétique », n’a aucune définition précise, ni juridique, ni scientifique, contrairement à l’expression consacrée par la législation de «  techniques de modifications génétiques ». À l’instar des expressions « édition du génome » ou « réécriture du génome », celle de « nouvelles techniques de génie génétique » a principalement été introduite afin d’induire un flou sur les nouveaux OGM [2].

Cédric Villani veut revoir la définition d’un OGM

Cette ambition à inscrire le travail d’un office parlementaire hors du cadre législatif peut néanmoins s’expliquer mais de manière étonnante. Avant même que l’OPECST n’ai entamé son travail, le nouveau Président annonce en effet la conclusion qui devra être atteinte par les discussions de l’Office. Selon lui, la définition actuelle des OGM ne conviendrait en fait pas aux nouvelles techniques. Dans son discours introductif à la réunion, il indique que « compte-tenu de l’actualité, il faudra revenir sur la technologie Crispr/Cas9, illustrée par le prix Nobel de chimie 2020 de Jennifer Doudna et Emmanuelle Charpentier, et les débats relatifs au génie génétique : qu’on soit pour ou contre les organismes génétiquement modifiés (OGM), leur définition est inadaptée aux techniques diverses de génie génétique ». Qu’on soit pour ou qu’on soit contre, les nouveaux OGM ne seraient donc pas des OGM ? Serait-ce un des compromis transpartisans auquel il fait référence dans sa présentation de l’OPECST aux nouveaux venus ?

En 2017 déjà, l’Office annonçait dans un rapport que seuls les produits issus des nouvelles techniques de modification génétique qui impliquent l’insertion d’un transgène doivent être considérés comme des OGM. À l’époque déjà, Inf’OGM analysait cette approche comme réductrice et même fausse [3]. Depuis, deux décisions en justice ont donné tort à l’OPECST : la Cour de justice de l’Union européenne en 2018 et le Conseil d’État français en février 2020 !

Cette redéfinition des concepts cache t-elle une volonté de changer la directive européenne sur les OGM et de vouloir insuffler cette idée au législateur français ? Quoiqu’il en soit, la France, seule, n’a pas le pouvoir de changer des définitions européennes…

L’OPECST, Kezako ?

L’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, a été créé en 1983 avec la mission d’informer et d’éclairer les deux chambres du Parlement sur les conséquences des choix de caractère scientifique et technologique. Cette institution, à vocation consultative, fonctionne avec 36 membres issus à parité du Sénat et de l’Assemblée nationale qui représentent proportionnellement les différents groupes politiques.

L’Office se veut comme un intermédiaire entre le monde politique et le monde de la recherche et il est aidé en cela par un Conseil scientifique composé de 24 experts.

Pour remplir ses missions, l’Office procède à des auditions publiques d’experts, rédige des notes scientifiques (synthèses de quelques pages sur l’actualité) et publie des rapports.

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