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Manioc OGM : Nigeria, un laboratoire à ciel ouvert ?

Par Frédéric GUERIN

Publié le 07/09/2018

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L’École polytechnique fédérale de Zurich a lancé des essais de manioc GM en champs au Nigeria. Les ONG suisses et nigérianes ont manifesté une vive opposition.

L’École polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ) [1] est actuellement sous le feu des critiques de plusieurs ONG suisses et nigérianes. La biologiste Livia Stavolone a mis au point une variété de manioc génétiquement modifié pour en rallonger la durée de conservation. Le manioc est un des aliments de base en Afrique. Afin de savoir si les résultats obtenus à Zurich se confirment dans les conditions réelles, les scientifiques suisses, en partenariat avec l’Institut international d’agriculture tropicale (IITA) [2] ont mis en place des essais en plein champ au Nigeria. Le minimum est pratiqué en terme de confinement : distance de 100 m et pratique de castration pour éviter des croisements.

Le projet est vivement critiqué par Swissaid. Selon l’ONG suisse, l’EPFZ profite d’une réglementation sur les OGM transgéniques plus laxiste sur le continent africain pour y tester cette variété génétiquement modifiée (GM). Judith Reusser, experte en génie génétique à Swissaid, a déclaré qu’ « une sérieuse recherche indépendante sur les risques devrait impérativement préoccuper l’EPFZ. Or cet aspect est quasiment absent dans la demande d’autorisation faite au gouvernement nigérian. Agir de cette manière serait inconcevable en Suisse » [3].

Une étude sous serre a été réalisée au préalable à l’EPFZ, mais le dossier n’est pas de qualité suffisante vis-à-vis des critères dans l’Union européenne ou en Suisse. La critique principale est le test de variété à ARNi qui présente des risques particuliers qui n’ont jamais vraiment été testés… Dans le dossier, manquent également des informations relatives aux gènes de résistances aux antibiotiques qui ont été insérés. « Les normes relatives à l’autorisation de l’essai au Nigeria sont largement inférieures à celles de la Suisse ou de l’UE », explique Luigi D’Andrea de l’Alliance suisse pour une agriculture sans génie génétique (StopOGM) [4].

Interrogée par la Radio Télévision Suisse, l’EPFZ affirme, quant à elle, que « les risques sont très limités ». « Nous respectons les normes internationales. Toutes les plantes ont un code et à la fin nous brûlerons tout ce que nous avons amené » [5].

Une consultation pour la forme

La population locale, opposée à ce projet, n’a été consultée que pour la forme, l’autorisation de l’essai ayant été délivrée à peine deux jours après que l’autorité nigériane en matière de biosécurité ait pris position sur les oppositions de 88 ONG locales et promis un réexamen critique de la demande.

Les demandes d’explications à l’EPFZ par StopOGM, SWISSAID et Pain pour le prochain [6] ont été traitées de façon très superficielles, soulignent ces organisations.

[1https://www.ethz.ch/de.html – C’est l’École polytechnique fédérale de Zurich qui a créé en 2000 le riz doré en collaboration avec l’université de Fribourg-en-Brisgau (Allemagne).

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