n°150 - mai / juin 2018

OGM : les impacts environnementaux étaient inévitables

Par Christophe NOISETTE

Publié le 07/05/2018

Partager

À partir de la seconde moitié du XXe siècle, la sélection variétale industrielle et la généralisation des engrais et des pesticides de synthèse ont permis d’augmenter rapidement les rendements par hectare, notamment en Occident et en Asie. Mais engrais et pesticides ont hypothéqué la qualité de l’environnement. L’arrivée des plantes transgéniques, dans les années 90, n’a été qu’une fausse solution…

Ce dossier nous a montré que les plantes transgéniques ont renforcé les problèmes environnementaux qu’elles étaient censées résoudre. C’était prévisible, car l’agriculture transgénique est fille de l’agriculture chimique…

Conventionnelle ou transgénique, l’agriculture pollue

Mais avant de revenir sur ces logiques inhérentes à ces agricultures, deux points méritent d’être précisés. Premièrement, près de 90 % des plantes génétiquement modifiées (PGM) actuellement dans les champs résistent à un ou plusieurs herbicides. Il est évident qu’un agriculteur qui a acheté de telles plantes souhaitera utiliser son « avantage technologique » et pulvérisera donc les herbicides ad hoc… Deuxièmement, la quasi-totalité des entreprises qui vendent des semences transgéniques vendent également des produits chimiques. Il serait curieux qu’elles aient conçu des plantes qui permettraient effectivement de se passer de leurs produits « phytosanitaires ». Concrètement, les bénéfices de Monsanto sont encore en grande partie liés à la vente de son herbicide Roundup qui, d’après Planetoscope.com, « représente environ 30 % de la valeur des ventes, soit presque 5 milliards de dollars »…

Mais plus fondamentalement, c’est la nature même de l’agriculture transgénique qui est problématique et qui fait d’elle une technologie non durable. Face à un parasite, comme la pyrale du maïs, l’agriculture chimique proposait un insecticide en pulvérisation… Face à ce même parasite, l’agriculture transgénique propose un insecticide émis directement par la plante. Dans un premier temps, avant que les résistances n’apparaissent, il y a un gain de temps et d’énergie fossile pour l’agriculteur qui n’a pas à sortir son pulvérisateur. Mais ces deux agricultures, conventionnelle et transgénique, sont construites selon le même principe « un problème = une solution ».

L’agroécologie mime la Nature

Au contraire de l’agriculture transgénique, l’agro-écologie essaie de comprendre les multiples facteurs qui ont fait qu’un parasite a proliféré. Ravageurs et parasites sont considérablement diminués par des rotations longues. Car produire maïs sur maïs pendant des années favorise l’apparition et le développement d’insectes parasites, telle la pyrale, ou la chrysomèle…

Ainsi, concrètement, pour lutter contre un ravageur des cultures, un paysan bio utilisera des moyens mécaniques ou physiques (voiles de protection…), des rotations longues pour casser le cycle de reproduction du ravageur, des associations de plantes répulsives, et favorisera l’implantation de prédateurs du ravageur (coccinelles…) en laissant des espaces enherbés ou des haies. En second recours, un agriculteur biologique pourra utiliser des traitements plus invasifs s’il risque de perdre l’ensemble de sa production (bouillie bordelaise ou Bt). Rotations diversifiées et polyculture ne sont pas réservés à la seule agriculture biologique. D’ailleurs, on peut noter que plus l’agriculture biologique devient industrielle (grande monoculture) et plus elle se rapproche du paradigme de l’agriculture chimique. Et on notera, à l’inverse, que des agriculteurs adeptes de la chimie adoptent de plus en plus souvent des méthodes de conservation, du fait des avantages économiques qu’elles apportent.

Eric Holt Gimenez, directeur exécutif de Food First, une ONG étasunienne, souligne d’ailleurs que « toutes les exploitations biologiques ne sont bien sûr pas agro-écologiques. Certaines sont de vastes monocultures industrielles qui sont aussi vulnérables au climat que leurs homologues conventionnelles. (…) C’est que l’agroécologie – et non l’agriculture biologique en tant que telle – est la clé du rendement et de la durabilité ».

Derrière ce principe simpliste « action / réaction », la chimie, la transgenèse et toutes les dernières technologies de modification génétique voient la Nature comme quelque chose qu’on peut maîtriser. Or la nature, et l’agro-écosystème, sont un ensemble d’une infinie complexité : le nombre de paramètres est tel que les interactions possibles, infinies, sont impossibles à maîtriser. C’est pourquoi l’agriculteur a tout intérêt à observer ce qui se passe et à apprendre à s’adapter pour tirer le meilleur tout en préservant les ressources nécessaires à la durabilité de sa ferme.

Actualités
Faq
A lire également