n°150 - mai / juin 2018

Europe – Surveillance post-commercialisation : mal menée

Par Eric MEUNIER

Publié le 07/05/2018

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Rapports après rapports, les experts de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (AESA) épinglent Monsanto : ils concluent que sa surveillance environnementale est trop lacunaire pour détecter des effets non attendus de son maïs génétiquement modifié MON810, le seul qui soit cultivé dans l’Union européenne. Ce qui n’empêche pas l’AESA de continuer à affirmer l’innocuité de ce maïs. Explications.

Le maïs MON810 de Monsanto est la seule plante génétiquement modifiée (PGM) transgénique autorisée à la culture commerciale en Europe. C’est donc la seule plante dont les cultures sont surveillées pour voir si des impacts sur l’environnement apparaissent.

« On ne peut conclure sur l’innocuité »…

Selon les experts européens et français de l’AESA en 2015 [1], Monsanto effectuait des prélèvements incomplets, ne reproduisait pas ses analyses d’une année sur l’autre, ce qui aurait permis une comparaison, voire ne retournait volontairement pas dans une région faire des prélèvements. Autant de critiques qui montraient que la surveillance conduite par Monsanto ne permettait pas de vérifier de possibles apparitions de résistance chez des insectes… Quant à la méthode suivie par Monsanto pour sa surveillance générale, il s’agit de questionnaires rédigés par Monsanto que les cultivateurs de maïs MON810 doivent remplir et dont les réponses étaient fournies, parfois, avec l’aide de Monsanto !

Des réponses qui doivent théoriquement décrire ce que les agriculteurs voient dans leurs champs et alentours, sachant que l’entreprise ne retenait une réponse que si elle était partagée par 10 % des agriculteurs interrogés minimum ! Les experts français, en 2012, considéraient que les agriculteurs « n’ont souvent pas tous les outils pour répondre de manière appropriée au questionnaire » et surtout, « n’ont pas nécessairement intérêt à fournir des réponses conformes à la réalité »… Conséquence, les experts européens notaient en 2013 ne pas pouvoir « conclure sur de potentiels effets non anticipés dus à la culture du maïs MON810 ».

… mais la sécurité du maïs de Monsanto est avérée !

En avril 2017, les experts européens rendaient leur rapport sur la surveillance des cultures de maïs MON810 conduites en 2015 (le rapport de surveillance des cultures 2016 est encore en cours d’analyse par l’AESA). L’AESA y souligne que si aucune résistance d’insectes n’a été constatée, la méthode suivie par Monsanto pour surveiller l’environnement « n’a pas changé comparée aux rapports précédents » ! Et l’AESA de « réitérer ses précédentes recommandations pour se trouver à un niveau de détection suffisamment sensible ». Les questionnaires ? L’AESA se déclare inapte « à évaluer leur utilité », et demande à nouveau à Monsanto d’améliorer sa méthode de travail…

Depuis l’année 2009 de culture du maïs MON810, l’AESA réitère dans chacun de ses rapports annuels ces critiques de surveillance environnementale lacunaire. Mais ces critiques n’ouvrent la voie à aucune remise en cause de l’évaluation initiale qui avait conclu à une absence de risque. Car, en 2017 comme les années précédentes, l’AESA conclut de manière très paradoxale que « la surveillance spécifique et la surveillance générale du maïs MON810 telles que conduites par [Monsanto] n’apportent aucune preuve qui invaliderait les évaluations effectuées sur la sécurité du maïs MON810 »… Comprenne qui pourra !

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