n°109 - mars / avril 2011Fiche technique / Etat des lieux

OGM – Nouvelle comitologie à l’UE : on cherche le « plus » démocratique

Par Pauline VERRIERE

Publié le 02/03/2011

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La procédure de comitologie, dont la place est prépondérante en matière d’OGM (autorisation [1], moratoire…), est largement décriée, notamment par son manque de démocratie. En l’absence d’accord des États membres, c’est la Commission qui devait adopter les propositions qu’elle avait elle-même formulées. Le Parlement Européen et le Conseil de l’Union Européenne ont donc proposé une réforme de cette procédure, censée laisser plus de place aux États membres et leur permettre une réappropriation des débats passant par la procédure de comitologie.

Dans le Traité instituant la Communauté européenne (TCE), l’article 202 précise les compétences du Conseil de l’Union Européenne (souvent appelé le Conseil, il regroupe les différents ministres des États membres par domaines concernés). Le Conseil peut notamment conférer à la Commission européenne (CE) la compétence d’exécution des règles qu’il a établies, compétence qu’il peut soumettre à certaines modalités. La procédure de comitologie est un exemple de ces modalités.

C’est sur cette base que la Décision du Conseil 1999/468/CE [2] vient fixer les modalités de l’exercice des compétences d’exécution conférées à la CE. La Procédure de comitologie est décrite dans les articles 5 et 7 de cette décision.

Selon cette procédure, la CE soumet une proposition à un « comité de réglementation composé des représentants des États membres » (en matière d’OGM, il s’agit du Comité permanent de la chaîne alimentaire et de la santé animale, le CP CASA) :

- si son avis est conforme : les mesures sont adoptées ;

- si l’avis n’est pas conforme ou en l’absence d’avis, faute de majorité qualifiée (cf. encadré), « la Commission européenne soumet sans tarder au Conseil une proposition relative aux mesures à prendre et en informe le parlement européen ».

Le Conseil vote alors à la majorité qualifiée cette proposition. Or, avec ce type de majorité particulièrement difficile à atteindre, il est de fait, compliqué pour le Conseil de s’opposer à ces propositions. A l’expiration du délai ou s’il n’y a pas d’opposition du Conseil « les mesures d’application proposées sont arrêtées par la Commission ». La Commission avait donc, à l’époque, l’obligation d’adopter la mesure qu’elle avait proposée.

Dans le cadre de la Directive 2001/18 et du Règlement 1829/2003, c’est cette procédure qui était utilisée. Mais depuis l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, c’est désormais le Traité sur le Fonctionnement de l’UE (TFUE) qui sert de base juridique à la procédure de comitologie [3].

La comitologie évolue

L’article 202 du TCE disparaît au profit des articles 290 et 291 du TFUE. Le nouveau texte sur la comitologie distingue désormais les actes délégués (art. 290) des actes d’exécution (art. 291). Une place prépondérante est censée être laissée aux États membres, à qui seuls revient le contrôle de l’exécution par la Commission. Aux termes de l’alinéa 3 de l’article 291, le Parlement et le Conseil précisent par règlements les « modalités de contrôles par les États membres de l’exercice des compétences d’exécution par la Commission ».

La proposition de Règlement du Parlement européen et du Conseil, publiée au Journal officiel le 16 février 2011, est entrée en vigueur le 1er mars 2011. Ce règlement simplifie la procédure de comitologie : en cas d’avis défavorable du comité, l’étape de la consultation au Conseil est court-circuitée. Ne reste, dans les considérants du règlement (à moindre valeur juridique), que cette phrase : « Le Parlement européen et le Conseil devraient être informés régulièrement et sans retard des travaux des comités ». La nouvelle procédure est la suivante :

- avis défavorable du Comité : la CE ne peut pas adopter le projet sauf « dans le cas où le fait de ne pas l’adopter dans un délai impératif entraînerait une importante perturbation des marchés ou un risque pour la sécurité ou la sûreté des personnes ou pour les intérêts financiers de l’Union », auquel cas elle doit impérativement informer des raisons de son choix. En cas d’avis défavorables, elle peut cependant le représenter dans une seconde délibération ou présenter un projet modifié ;

- absence d’avis : la CE peut adopter ou non les mesures ;

- avis favorable du Comité : la CE adopte les mesures.

La CE laisse entendre qu’un « Comité d’appel », dont les modalités de fonctionnement et la composition restent à définir, devrait également être institué afin de pallier l’absence de réponse du premier Comité consulté, ou lorsque le vote est défavorable à la proposition, permettant ainsi à la Commission de faire appel. Mais en absence de majorité qualifiée au comité, la CE ne serait plus tenue de voter sa proposition, elle pourrait par exemple la modifier, notamment en tenant compte des avis exprimés des États.

Cette nouvelle procédure est justifiée par ses auteurs pour donner une plus grande place aux États membres, via leur représentant au Comité. Elle doit encore être confrontée à la pratique afin de voir si la Commission tient effectivement compte de la position des États. Mais le vote à majorité qualifiée continue d’être la règle, ce qui laissera encore beaucoup de place à la CE.