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Quelle destinée pour les OGM ?
Espoirs, promesses, progrès... Voilà des concepts qui entourent le discours de promotion des OGM depuis près de trente ans. Il en est de même aujourd’hui avec les OGM obtenus par ce que la Commission européenne appelle les « nouvelles techniques génomiques » (NTG).
Depuis une dizaine d’années, les quatre multinationales qui dominent le marché mondial des semences, et les structures représentant leurs intérêts, œuvrent pour convaincre les dirigeants politiques et les législateurs que la réglementation (...)
Pour les quatre multinationales semencières, l’étiquetage et la traçabilité seraient des obstacles à la commercialisation des OGM. Ces obligations garantissent la liberté de choix des consommateurs et l’existence de filières sans OGM. Sous prétexte d’inadaptation au progrès technique et de l’urgence à répondre à des enjeux climatiques, environnementaux..., ces règles sont aujourd’hui menacées.
Pour paraphraser Albert Camus, on serait tenté d’écrire que mal nommer les OGM, c’est ajouter au malheur des paysans, transformateurs, petits semenciers et tout citoyen désireux de connaître les produits qu’ils utilisent. La proposition de dérèglementation présentée par la Commission européenne le 5 juillet 2023 regorge de termes et expressions imprécises, voire fausses [1]. Une sémantique voulue par les multinationales, reprise sans ambage par la Commission européenne et qui aboutit à une simplification extrême, et donc erronée, de protocoles de modification génétique dont la complexité est inversement proportionnelle.
Ces cinq dernières années, plusieurs pays ont réduit l’étendue de leur contrôle des OGM. Le but : créer un contexte favorable au développement des nouvelles techniques de modification génétique, présentées comme incontournables dans un monde climatiquement incertain, où les sols sont épuisés par la chimie, où l’eau vient à manquer... D’un pays à l’autre, les nouvelles règles présentent des caractéristiques communes.
La Commission européenne a proposé, le 5 juillet 2023, de changer les procédures d’autorisation des essais en champs d’OGM. Ces essais pourraient alors devenir une étape clef de la dérèglementation des OGM.
Comme une histoire qui se répète, les OGM issus des nouvelles techniques de modification génétique sont parés des mêmes vertus que celles prêtées, mais jamais démontrées, aux OGM transgéniques au début des années 2000. Si on regarde de près, ces projets servent à capter des subventions, à amadouer l’opinion publique… mais jusqu’à présent, les promesses de leurs promoteurs n’ont jamais été concrétisées. Cette économie de la promesse ne concerne pas que les végétaux génétiquement modifiés. Les animaux GM, anciens hier ou nouveaux aujourd’hui, sont également concernés.
Le 5 juillet 2023, la Commission européenne a publié sa proposition législative très attendue sur les OGM. Elle vise à faire sortir du droit commun des OGM une grande partie d’entre eux pour les faire bénéficier d’un régime juridique considérablement allégé. Les principes qui fondent le droit des OGM (évaluation des risques préalable, traçabilité et étiquetage...) seraient appliqués à géométrie variable, voire écartés. Une proposition dont le contenu résonne avec les revendications portées par les multinationales de l’industrie des biotechnologies.
Syndicats agricoles, acteurs de la filière bio, transformateurs, petits et moyens semenciers, associations de défense de l’environnement, distributeurs… Nombreux sont les acteurs qui se sont déclarés opposés à la proposition de déréglementation des OGM faite par la Commission européenne le 5 juillet 2023. Leur voix pèsera-t-elle dans la balance politique ? Les gouvernements nationaux prendront-ils en compte ces oppositions ou un passage en force aura-t-il lieu ? Réponse dans quelques mois, mais, d’ici là, passons en revue certaines oppositions exprimées.
Alors que les OGM transgéniques ont été un relatif échec commercial, la mise sur le marché des « nouveaux » OGM est-elle réellement l’objectif des multinationales ? Ou faut-il regarder ailleurs ? Une possible réponse a été apportée par un semencier français : « l’activité foisonnante qu’on trouve autour des NBT est plus des dépôts de brevets, qui sont une menace pour les semenciers de taille intermédiaire ou moyenne et petite et les agriculteurs, qu’autre chose ».
Aux États-Unis, en 2012, les autorités décidaient pour la première fois d’exempter un OGM des requis réglementaires. Il s’agissait d’une vigne génétiquement modifiée par cisgénèse, une des nouvelles techniques de modification génétique. Depuis, près d’une centaine de « nouveaux » OGM ont fait l’objet d’une décision similaire. Paradoxalement, une décennie après cette première décision, seuls six d’entre eux ont été commercialisés.