Dans ce numéro, le Journal Inf’OGM fait le point sur plusieurs aspects du lien entre les plantes génétiquement modifiées et les herbicides : analyse du rapport de C. Benbrook qui envisage une explosion de l’utilisation du Roundup si les PGM sont autorisées dans l’Union européenne, entretien avec des Mères argentines qui se battent contre les pulvérisations de Roundup sur le soja transgénique près des villages, et une enquête exclusive sur l’étude ambitieuse sur les OGM et les herbicides associés que le gouvernement a annoncée suite à la publication de l’étude de G.-E. Séralini.
Par ailleurs, deux articles font le point sur l’étiquetage des PGM. Le premier explique l’échec du référendum californien et le second fait le point sur une des lacunes de l’étiquetage en France et dans l’Union européenne avec les auxiliaires technologiques de production.
Enfin, nous publions dans ce même numéro, un texte de l’ONG internationale ETC Group qui fait le point sur les projets de géo-ingénierie, c’est-à-dire un ensemble de techniques destinées à modifier l’équilibre du climat, les cycles de l’azote, etc.

Inf'OGM le journal est un trimestriel de 20 pages qui vous informe sur l'actualité des OGM et des semences de façon critique et contextualisée.

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Le 19 septembre 2012, Gilles-Eric Séralini publie, dans la revue Food and chemical toxicology, une étude pour évaluer l’impact sanitaire du maïs génétiquement modifié NK603 et de l’herbicide Roundup que ce maïs tolère. Parmi les répercussions de cette publication, le gouvernement français s’est engagé à refaire une telle étude à long terme pour espérer sortir de la polémique. Mais comment et avec quels moyens ?

La Fondation Bill et Melinda Gates continue son opération de relations publiques au détriment de la sécurité alimentaire. Avec le ministère pour le développement international du Royaume Uni, elle a doté une équipe de l’université de Cornell de 25 millions de dollars pour « améliorer la productivité du manioc » en utilisant les « dernières découvertes technologiques ». Mais, on le sait, le développement d’une agriculture nourricière n’a pas tant besoin de ce type de soutien que d’un cadre politique favorable. Ce projet permettra au mieux de former des élites africaines à la culture biotechnologique afin de préparer l’introduction des maïs et soja GM en provenance des pays développés.

Le débat sur les PGM tolérant les herbicides, et donc sur le modèle agricole utilisant les herbicides, est bel et bien d’actualité. Outre le dernier rapport de Greenpeace sur le sujet [1], le CNRS et l’Inra rendaient, fin 2011, les conclusions d’une expertise sur les variétés tolérantes aux herbicides (VTH) [2]. Le 19 novembre, le ministre de l’Agriculture français affirmait que « les OGM […] ne sont pas la bonne solution ». Et le 26 novembre, à Tours, étaient jugés pour la première fois des faucheurs volontaires ayant détruit un champ de tournesols mutés pour tolérer des herbicides [3]. Le point sur ce dossier, avec un focus sur le rapport Greenpeace.

L’industrie agroalimentaire utilise de très nombreux « artifices » pour donner du goût, une couleur appétissante ou la bonne consistance aux aliments qu’elle nous fait avaler. Que ces éléments soient introduits directement dans le produit ou simplement utilisés lors de la fabrication, font-ils l’objet d’évaluation et dans quelle mesure les consommateurs sont-ils informés de leur présence ? Mais surtout, les « auxiliaires technologiques » sont de plus en plus d’origine transgénique. Étiquetés ou pas ? Essayons d’y voir plus clair derrière les E250 et autres lécithine de soja, présents dans nos gâteaux préférés.

L’Union européenne importe massivement des protéines végétales, notamment du soja, pour nourrir les animaux d’élevage. Or, une grande part de ces importations provient d’Amérique du sud et est très souvent génétiquement modifiée [4]. Alors que la récente étude du professeur Séralini questionne l’innocuité des OGM sur la santé, l’association des Mères d’Ituzaingo [5] interpelle sur d’autres effets de la culture d’OGM : ceux occasionnés par les applications massives, souvent aériennes, de Roundup, notamment sur les femmes enceintes.

Même pour ceux qui sont habitués à la démesure de la manipulation génétique, les projets de modifications des équilibres des systèmes biologiques entiers de la Planète peuvent sembler fous, effrayants et somme toute, incroyables. Bienvenue dans le nouveau monde de la géo-ingénierie – un ensemble de technologies expérimentales en cours de développement, qui visent à modifier intentionnellement le climat à l’échelle globale et régionale – censée être la solution miracle au changement climatique.

Corinne Lepage, euro-députée, avocate, ex-ministre de l’Environnement et co-fondatrice du Comité de recherche et d’information indépendantes sur le génie génétique (Criigen) est de celle qui défend partout le principe de précaution. Et dans le dossier des OGM, elle constate, à nouveau, le refus des autorités publiques de jouer leur rôle, elle décrit des défaillances, des conflits d’intérêt et autres manœuvres destinées à empêcher la recherche indépendante et la transparence sur les effets des OGM. Elle raconte dans un livre son expérience de plus de dix ans de lutte pour plus de transparence, plus de responsabilité des experts, dont le dernier épisode est lié à « l’étude Séralini ». Au-delà, elle cherche à en tirer les leçons et propose une réforme complète de l’expertise, en France et dans l’UE, pour qu’elle devienne, enfin, pluraliste, pluridisciplinaire et contradictoire, et dans laquelle les citoyens auront toute leur place. Optimiste et opiniâtre, elle conclut : « je sais que le jour viendra où chacun reconnaîtra que nous avions raison ».

La revue Pour la Science propose dans son numéro de décembre 2012, un dossier sur « l’Homme 2.0 » afin de répondre à la question post-moderne : « l’être humain réparé, transformé, augmenté... jusqu’où ? ». L’édito donne le ton : « les innovations d’aujourd’hui ne visent pas à asservir l’être humain mais à l’aider » et si tout ne va pas dans le meilleur des mondes, c’est parce que la technique n’est pas assez efficace, ou que son « accès au plus grand nombre reste un enjeu essentiel ». Puis, ce numéro spécial propose un long article de J.-M. Besnier, professeur de philosophie, qui mériterait un long commentaire tant il essaie de ménager la chèvre technologique avec le chou de la morale. Globalement, cet auteur ne remet pas en cause le cadre dans lequel son sujet (le transhumanisme) est traité. Autre page significative de l’idéologie qui sous-tend ce numéro : intitulée « Aux limites de l’être humain », elle décrit les performances extrêmes de certains individus. Ce florilège nous place dans un certain culte de la performance... Ceci dit, ce numéro reste intéressant à découvrir, avec des articles détaillés sur les cellules souches, les limites de la connaissance, et la procréation de demain... malgré un manque de remise en cause du paradigme dominant.

Le centre Europe - Tiers Monde (Cetim) propose un petit livre qui repose les questions fondamentales de l’accès à la nourriture. Il précise, grâce à un entretien avec Paul Nicholson, de La Via Campesina, les enjeux politiques et stratégiques du concept de la souveraineté alimentaire, « axe transformateur du modèle économique et social dominant ». Deux autres articles traitent du commerce équitable et des conditions pour que la coopération internationale aide au renforcement des communautés locales et rurales, en opposition avec l’action de la Fondation Gates (cf. « Le saviez-vous ? », page 2). Un livre très instructif qui donne de nombreuses clés pour comprendre le contexte actuel de l’agriculture ainsi que des pistes pour tenter d’en régler les dysfonctionnements.