Après avoir été déféré devant la Cour de Justice des Communautés Européennes pour non-transposition de la directive sur la dissémination des OGM dans l’environnement (2001/18), le Luxembourg a adopté, le 13 janvier, une loi transposant le texte européen. Jusqu’alors, le contrôle de l’utilisation et de la dissémination des OGM était régi par une loi de 1997. L’intérêt de cette transposition luxembourgeoise réside dans la révision de l’article 35 sur la responsabilité. Le titulaire d’une autorisation devra désormais “souscrire auprès d’une entreprise d’assurance habilitée à couvrir le risque [...] un contrat de responsabilité civile du montant couvrant ses activités”.
Dans le cadre du renforcement des lois relatives aux cultures d’OGM, la Secrétaire à l’Agriculture, Ann Veneman, a annoncé, le 22 janvier, que son ministère était en train de mener des études environnementales dans le but de prendre en compte les différents niveaux de risque de contamination par pollinisation. Le but affirmé est la protection des plantes conventionnelles et le suivi des effets à long terme des OGM sur l’environnement. Ainsi, les autorisations seraient désormais accordées sous des conditions fixées en fonction d’une “échelle de risques” de contamination fortuite. La révision risque de prendre du temps et ne sera pas rétroactive mais devrait impliquer des millions d’hectares de cultures d’OGM à venir. Cette annonce a été accueillie favorablement par un groupe d’entreprises de biotechnologies, la Biotechnology Industry Organization, car cette nouvelle procédure permettra de rassurer les consommateurs.
Le 28 janvier, la Commission a tenu un débat d’orientation sur les OGM et sur les progrès réalisés en 2003 en matière législative. Pour la Commission, l’Union européenne dispose désormais d’un système de régulation des OGM “clair, transparent et rigoureux. Notre législation garantit que les OGM autorisés dans l’UE sont sans risques pour la consommation humaine et la dissémination dans l’environnement. Des règles d’étiquetage claires permettent aux agriculteurs et aux consommateurs de choisir”. Actuellement, deux OGM, le maïs doux Bt11 et le maïs NK603, sont en attente de la décision du Conseil européen des Ministres de l’Agriculture. En ce qui concerne les mesures nationales sur la coexistence, la Commission a rappelé l’obligation légale des Etats d’adopter de telles mesures, qui prennent en compte la spécificité des cultures. Elle a en outre souligné la légalité des zones sans OGM sous certaines conditions : il doit s’agir d’une approche individuelle et volontaire de la part des agriculteurs. Par contre, la protection de l’environnement et de la santé ne peut pas être invoquée pour fonder juridiquement de telles zones dans la mesure où les OGM autorisés ont été jugés sans risque durant la procédure d’autorisation. Enfin, la Commission assurera la coordination et l’échange d’informations relatives à la coexistence.
Margot Wallström, commissaire européenne pour l’environnement, s’est prononcée, le 30 janvier, en faveur d’une révision des seuils de tolérance pour la présence accidentelle d’OGM dans les semences. Les seuils actuellement proposés par le Comité européen scientifique des plantes sont 0,3% pour le colza, 0,5% pour le maïs et 0,7% pour le soja. L’enjeu est important, notamment pour l’agriculture bio, car au-delà de ces seuils, les semences seront considérées comme OGM. Plusieurs organisations environnementales se sont prononcées en faveur du seuil de 0,1%, soutenues par le Parlement européen. Pour les professionnels des semences et de la protection des plantes, les seuils actuels sont déjà suffisamment bas.
La Belgique s’est prononcée, le 2 février, contre la demande de culture d’un colza résistant à un herbicide total, le glufosinate d’ammonium, de la firme Bayer mais a
autorisé l’importation sous condition et la transformation1. Cette position, approuvée partiellement par les organisations environnementalistes2, suit l’avis rendu par le conseil belge de biosécurité3 qui soulevait au mois d’octobre 2003 les risques de contamination des champs non-OGM. L’avis des experts faisait référence, notamment, à l’étude de la Royal Society britannique (cf. Inf’OGM n°46) et aux commentaires du Ministère de l’environnement britannique4. La décision est fondée sur trois arguments : perte de biodiversité, dissémination inéluctable alors qu’aucune législation sur la coexistence n’est applicable et enfin impossibilité de mettre en oeuvre et de contrôler les lignes directrices agricoles proposées par le notifiant. Par ailleurs, pour Muriel Gerkens, députée fédérale, cette décision revient à cautionner la pollution environnementale en dehors de l’Union européenne et risque d’entraîner une concurrence déloyale vis-à-vis des producteurs belges. L’autorisation ayant été demandée sur le territoire belge, la Belgique agira comme rapporteur sur ce dossier auprès des instances européennes et les autres Etats membres seront invités à formuler des remarques. Un vote suivra au sein d’un comité d’experts de l’Union. En cas de vote défavorable, le dossier sera renvoyé au conseil des ministres.
Le Ministre de l’agriculture, Hervé Gaymard, a annoncé le 2 février un plan de relance de l’AB allouant 50 millions d’euros sur 5 ans aux agrobiologistes. Une lacune importante concerne les OGM : aucune indemnisation en cas de contamination des cultures bio n’a été évoquée. M. Gaymard a, pour sa part, réaffirmé sa préférence pour l’approche communautaire de la coexistence.
La Commission d’Accès aux Documents Administratifs (CADA) s’est prononcée en faveur de la communication des procès-verbaux détaillés de la Commission du Génie Biomoléculaire en charge des demandes d’autorisations des essais en champs. Cette décision fait suite à la demande du Comité de Recherche et d’Informations Indépendantes sur le Génie Génétique (CRIIGEN). Sont pourtant exclues de cette communication les informations relatives aux secrets de la vie privée, industriels et commerciaux.
La cour administrative d’appel de Bordeaux n’a pas validé la requête du préfet demandant la suspension d’un arrêté municipal interdisant les cultures d’OGM, pris par le maire de Mouchan (Gers). “C’est une première victoire symbolique”, a déclaré à l’AFP l’avocate de cette municipalité, Me Corinne Lepage. “C’est la première fois qu’un maire gagne et que l’on a en France une commune où l’on ne peut pas planter d’OGM”, a-elle ajouté précisant que la cour de Bordeaux ne s’était prononcée que sur la forme. En avril 2002, le maire de cette commune, Christian Touhé-Rumeau, ainsi que 6 autres maires avaient été assignés en justice par le préfet de la région pour avoir pris un arrêté interdisant les OGM sur leur commune (cf. Inf’OGM n°30). Le maire avait alors précisé son arrêté et, en décembre dernier, une première décision du tribunal administratif de Pau (Pyrénées Atlantique) lui avait donné raison, à la fois sur le fond et sur la forme. Selon Me Lepage, l’arrêté de Mouchan est “particulièrement bien rédigé car il a une durée limitée dans le temps et l’interdiction ne porte que sur un périmètre autour d’exploitations agricoles biologiques”.
La première réunion des Parties au Protocole de Carthagène sur la biosécurité s’est ouverte le 23 février à Kuala Lumpur (Malaisie). Récemment trois pays viennent de le ratifier : Lettonie, Belize et Tadjikistan, portant à 87 le nombre de Parties au Protocole. A l’ouverture, la Chine, plus gros importateur d’OGM au monde, a annoncé qu’elle allait bientôt ratifier le Protocole, qu’elle a signé en 2000. Cette ratification aura des conséquences importantes sur le commerce des OGM. En effet, en 2003, la Chine a importé plus de 20 millions de tonnes de soja. Les experts chinois estiment que plus de 70% du soja importé actuellement en Chine est transgénique.