Amérique latine : droguée aux OGM

41 % des OGM transgéniques cultivés dans le monde le sont dans 12 des 20 pays d’Amérique latine [1], ceux du Mercosur représentant à eux seuls près de 100 % des cultures. Ajoutez à cela les « nouveaux OGM », c’est-à-dire ceux issus des nouvelles techniques de transformation du vivant, qui commencent à être « fabriqués » et autorisés à la culture au Brésil et en Argentine, sans aucun étiquetage, des saumons transgéniques élevés au Panama, un tilapia modifié sans être reconnu OGM en Argentine et, last but not least, la majeure partie du soja importé dans l’Union européenne pour l’alimentation animale… : autant d’éléments pour qu’Inf’OGM décide de consacrer un dossier sur les OGM en Amérique latine.

Deux nouvelles supplémentaires cet été ont d’autant plus justifié l’intérêt de ce dossier : la finalisation en juin de l’accord de libre échange entre l’Union européenne et le Mercosur (mais non encore ratifié), d’une part ; et les feux de forêts en Amazonie [2], d’autre part, dus entre autre à l’extension des terres agricoles pour cultiver le soja et élever des bovins.
Sur ce dernier point, le président Macron a réagi le 26 août, affirmant, à propos des feux en Amazonie, que la France « a une part de complicité » due aux importations massives de soja, avant de conclure : « en l’état, je ne signerai pas [l’accord UE-] Mercosur ». Rappelons, paradoxe, qu’il venait juste de faire ratifier l’accord du CETA, entre l’UE et le Canada, par l’Assemblée nationale le 23 juillet. Avec là encore, son lot d’importations possibles d’OGM (notamment soja et colza transgéniques, saumon transgénique) et de produits animaux nourris aux OGM...
Il en ira donc de même avec l’accord UE-Mercosur, s’il entre un jour en vigueur. Les résistances de part et d’autres de l’Atlantique réussiront-elles à freiner cette expansion ?

L’Amérique latine produit 41 % des surfaces cultivées de tous les OGM transgéniques mondiaux, dont une bonne partie sont interdits à l’importation dans l’Union européenne. Pourtant, fin juin, et après 20 ans de négociations, un accord de libre échange entre les pays du Mercosur (Argentine, Brésil, Paraguay, Uruguay) et l’Union européenne a été trouvé. Est-ce le début d’une invasion des OGM latinos dans nos assiettes ?

Dans l’idéal, l’harmonisation des législations lors des accords de libre-échange devrait s’effectuer « vers le haut  », pour adopter par exemple la meilleure protection de l’environnement et de la santé. Dans la pratique, des groupes de discussions bilatérales et des tribunaux d’arbitrage sont mis en place, et les intérêts commerciaux l’emportent sur la santé des populations et de l’environnement. Quelques exemples pour les OGM et les semences en Amérique latine...

Le Chili est en passe d’adhérer à un accord de libre échange, le Traité Trans Pacifique [3] (TTP).

Les feux en Amazonie qui ont défrayé la chronique cet été ont été l’occasion de rappeler la dépendance de l’Europe au soja américain, et les méfaits de cette culture. Le Brésil, l’Argentine, mais aussi l’Uruguay, le Paraguay, la Bolivie forment ce que Syngenta a appelé dans les années 2000 « la République unie du Soja ». Le soja assure à ces pays des revenus d’exportations considérables, mais aussi des dégâts sanitaires et environnementaux…

Au Brésil, les industriels de l’agroalimentaire ont pris le pouvoir. Ils développent les OGM, anciens et nouveaux, et contaminent l’environnement. Inf’OGM ouvre ses colonnes à trois universitaires de Santa Catarina, clairement opposés à cette nouvelle situation.

Le Chili ne cultive pas d’OGM transgéniques pour son marché intérieur, mais autorise la culture d’OGM (essentiellement maïs, soja, colza) pour la production de semences produites en contre-saison pour l’exportation… dont une partie pour l’Union européenne. Le Chili permet également l’importation de nombreuses plantes transgéniques… non étiquetées sur son marché intérieur.

Argentine, Brésil, Chili, Paraguay et Uruguay ont signé une déclaration commune en septembre 2018 pour « éviter les distinctions arbitraires et injustifiables entre les produits agricoles obtenus par « édition de gènes » et ceux obtenus par d’autres méthodes d’amélioration » [4]. Ils s’engagent à pousser vers une harmonisation de la législation régionale et internationale sur « des bases scientifiques » et à éviter les obstacles au commerce de ces produits.

Les résistances citoyennes contre les OGM sont nombreuses en Amérique latine, à la hauteur d’une production pléthorique. Les militants, parfois durement réprimés, n’en continuent pas moins le combat...