Le 3 mai 2000, l’Office Européen des Brevets, auquel la Suisse est liée, a délivré à
Novar tis, un brevet qui porte « sur la procédure de modification génétique de la cellule
humaine, sur le résultat et sur l’organe résultant de cette modification génétique »
(Félix Addor, chef de la division juridique à l’Institut fédéral de la propriété
industrielle). Ce brevet concerne un traitement par génie génétique qui vise à
prolonger la vie des organes transplantés. Ce traitement consiste à introduire un
gène spécifique dans le matériel génétique de l’organe transplanté, gène qui codera
pour une protéine qui inhibe l’inflammation des vaisseaux sanguins et donc qui
pourrait supprimer cette forme de rejet. Les Ver ts ont aussitôt demandé au Conseil
Fédéral Suisse de faire opposition auprès de l’OEB et Greenpeace a invité le dit office
à revenir sur sa décision. (1)

Europe : Les 9 et 10 mai 2000, l’Office Européen des Brevets, basé à Munich, a
procédé à une audition des deux parties à propos du brevet (n° 436257) sur un
arbre indien, le margousier (en anglais neem). L’Office a finalement décidé d’annuler
le brevet accordé à l’USDA et à la firme américaine W.R. Grace. Depuis 5 ans, la
Research Foundation for Science, Technology and Natural Ressource Policy (dirigée
par Vandana Shiva), l’IFOAM et Magda Aelvoet (alors députée verte au Parlement
Européen), ont entrepris des démarches légales pour obtenir que ce brevet soit
annulé. Obtenu le 14 septembre 1994, ce brevet couvre un procédé fongicide qui
utilise des propriétés de la semence du margousier. L’opposition a fait valoir le fait
que l’aspect fongicide était connu et utilisé depuis des siècles par les Indiens,
notamment dans la médecine ayurvedique et dans l’agriculture traditionnelle. Or,
l’OEB ne peut accorder de brevets que dans la mesure où l’invention en question est
spécifiquement nouvelle. (2)

Depuis le début de
l’année, plus d’une vingtaine de
projets de loi sur les
biotechnologies ont été déposés
dans 13 Etats américains. Ceux-ci
concernaient aussi bien
l’interdiction de Terminator, la
demande de moratoire ou
l’étiquetage des produits contenant
des ingrédients génétiquement
modifiés.
Le 18 mai, le Conseil de la Ville
d’Austin a voté une résolution
appelant à un moratoire sur la
nourriture transgénique et
demandant qu’une législation
fédérale impose l’étiquetage.

Le Conseil de la ville de Gênes a voté une résolution pour interdire la plantation et la vente de semences OGM sur son territoire.

La Food
Standards Agency, qui est devenue
opérationnelle le 1 er avril, doit
s’assurer que la nourriture vendue
en Grande Bretagne est saine. Elle

a aussi comme rôle de fournir des
informations qu’elle souhaite
“indépendantes et objectives”. Cette
agence a un site web :
http://www.foodstandards.gov.uk/

Allemagne : Vingt-et-une
demandes d’autorisation d’OGM
(9 colzas, 7 cannes à sucre et 5
maïs) ont été déposées en
Allemagne auprès de l’Office
fédéral de protection des créations
végétales d’Hanovre, qui dépend
du ministère de l’Agriculture.
L’Office a rappelé qu’aucune
culture d’espèce génétiquement
modifiée n’a jusqu’à présent été
autorisée en Allemagne. Et en
février dernier, le gouvernement
allemand avait annoncé sa décision
de refuser jusqu’à nouvel ordre
l’autorisation de culture et de
commercialisation à grande échelle
du maïs transgénique Bt 176, de
Novartis. Des « quantités limitées » de
semences de maïs OGM ont
toutefois été autorisées à des fins
d’expérimentation sur des surfaces
tests, selon l’Office.

Protocole de biosécurité
Lors de la Réunion de Nairobi, le Protocole de Biosécurité (de la
Convention sur la Diversité Biologique), élaboré en février à
Montréal, a été signé par 68 parties (dont l’Union Europénne en
tant que telle) dès l’ouverture à signature. La question de la
responsabilité des producteurs d’OGM a été discutée. Klaus
Toepfer, directeur du Programme des Nations unies pour
l’environnement, pour qui la contamination du colza d’Advanta
« nous envoie le signal que nous devons mettre en oeuvre le
protocole le plus tôt possible », a déclaré que cette question
devait être renforcée. L’autre question abordée fut celle de la
possibilité pour les pays pauvres de contrôler les importations.
Le délégué de l’Ethiopie, Tewolde Gebre Egziabher, a souligné
que l’Afrique manquait de laboratoires permettant de tester la
présence d’OGM dans les importations agricoles : "Si ce qui s’est
passé en Europe advenait en Afrique, les chances que cela soit
découvert seraient très petites."Les autres discussions
importantes ont porté sur les thèmes de l’accès aux ressources
génétiques et du partage des avantages et des droits des
peuples indigènes. Dans le cadre du groupe de travail sur la
biodiversité agricole, une résolution a été prise à propos des
technologies GURT (Terminator et consorts) qui reprend
globalement les conclusions du groupe de travail, stipulant que
ces technologies doivent faire l’objet d’études d’impact non
seulement environnemental mais aussi socio-économique.
Cette réunion avait été précédée par de nombreux fora, dont un
francophone organisé par l’association Solagral. D’autre part, en
marge de la conférence des parties, des agriculteurs ont
organisé une foire aux semences pour rappeler l’importance de
la sécurité alimentaire et de la multiplication de leurs propres
semences. Une organisation de femmes kenyanes a également
soutenu cette position en offrant des produits locaux et des
repas de différents pays.

Advanta (entreprise née de la fusion de l’anglo-suédois AstraZeneca Plc et
de la coopérative hollandaise Cosun), numéro 5 mondial des semences, a
vendu dans cinq pays européens des semences de colza (variété Hyola
401) contaminées, à hauteur d’environ 1%, par des semences
génétiquement modifiées. Les surfaces emblavées avec ces graines sont de
400 ha en Allemagne, 600 en France (Bretagne, Meuse et Haute Marne),
4500 en Grande Bretagne, 35 au Luxembourg et 500 en Suède. Les
gouvernements français et suédois ont décidé de faire arracher les champs
contaminés, alors qu’en Allemagne et en Grande Bretagne, les
gouvernements ont estimé que la contamination n’était pas assez
importante pour entreprendre une telle action. Cependant, certains
agriculteurs ont décidé de détruire leurs champs. Parmi eux, le Marquis de
Lansdowne (230 hectares) a aussi écrit une lettre ouverte au Times dans
laquelle il critique ouvertement l’attitude du Ministère de l’Agriculture
britannique, notamment le fait que ce ministère n’ait révélé que tardivement
la contamination.
Cet accident illustre le manque de contrôle sur la contamination des
semences importées, l’absence de réglementation à cet égard et
l’incapacité actuelle des industriels à garantir des semences non
contaminées. Cela pose aussi la question de la responsabilité des firmes en
cas de dommages environnementaux. Jean Glavany, ministre français de
l’agriculture, a déclaré que le principe du “pollueur payeur”serait appliqué
et Advanta semble prête à par ticiper à l’indemnisation des agriculteurs
touchés.
De façon plus globale, une telle contamination peut se retrouver sur
d’autres semences. Par exemple Greenpeace a déclaré que quelque 15 %
des cultures de maïs de l’Union européenne, soit près d’un million
d’hectares dont 300 000 pour la France, pourraient être contaminés par
des OGM. Jean Glavany, sur RTL, n’a pas démenti : "Ce que dit Greenpeace
est sûrement vrai à certains égards dans la mesure où personne ne peut
dire que la pollinisation - un phénomène naturel par essence - jointe aux
phénomènes météorologiques, comme le vent, n’entraîne pas une
pollinisation naturelle de certaines espèces. C’est vrai. Et donc il est
probable que nous ayons des impuretés dans le maïs français". Cependant,
son constat s’arrête là et il n’envisage pas de détruire ledit maïs car, dit-il,
ce serait "toute l’économie agricole française qui serait en panne".

La directive 98/44 qui réglemente l’obtention de brevets
liés aux inventions biotechnologiques, comporte en elle une
contradiction qui pourrait rendre légal le brevetage du
vivant. Les Etats-membres de l’Union Européenne ont en
principe jusqu’au 30 juillet 2000 pour transposer la
directive 98/44 dans leurs législations nationales. L’Italie,
les Pays-Bas et la Norvège ont déposé un recours devant
la cour européenne de justice contre cette directive.
Les 15 et 16 avril, le Conseil national interrégional (CNIR)
des Verts français a adopté une motion d’urgence sur le
brevetage, comme “négation du patrimoine de l’Humanité".
Le CNIR demande aux députés ver ts de "dénoncer de
manière claire tout projet de transposition de cette directive
européenne dans le droit national, qui ne pourrait être
qu’une nouvelle compromission avec le capitalisme mondial
et un déni des principes mêmes qui fondent l’écologie
politique".(1)

Le 4 mai, la Commission de la Science et de la Technologie
de l’Assemblée parlementaire française a décidé de
soutenir l’appel contre la brevetabilité des gènes humains,
lancé le 6 avril dernier par deux médecins, membres de
l’Assemblée du Conseil de l’Europe, Jean-François Mattei et
Wolfgang Wodarg
1
. Elle organisera également une réunion
extraordinaire de 4 Commissions (science & technologie,
questions juridiques & droits de l’homme, questions
sociales, santé & famille et agriculture) lors de sa
prochaine session qui aura lieu fin juin afin de demander
un moratoire immédiat sur l’application de cette directive et
la suspension de toute attribution de brevets sur le
génome humain. Cette action pourrait se concrétiser par
un amendement au rapport de M. Mattei sur les
biotechnologies, inscrit à l’ordre du jour de cette session.
Jean Pierre Berlan, membre du Conseil Scientifique d’ATTAC
et chercheur à l’INRA, signataire de l’Appel contre la
brevetabilité lancé à l’initiative du Sel de Paris2,
reconnaiît que l’appel de Mattei-Wolfang a “la vertu d’exister et de
troubler le train-train gouvernemental". Mais il dénonce
"l’absurdité de la notion de gènes humains. Il estime que
cette notion est "typique de la fallace réductionniste du tout
génétique”. Pour lui, la seule raison valable de s’opposer à
la brevetabilité n’est ni éthique, ni humaniste, elle est
politique "parce que tout privilège est intolérable et
s’exerce à l’encontre de l’humanité, parce qu’il faut arrêter
la violence des marchés contre nos droits collectifs, parce
que tout simplement, le brevet du vivant confisque un
espace de liberté”.(2)

Mme Guigou, ministre française de la justice, a déclaré que
cette directive était incompatible avec les lois bio-éthiques
de 1994, le code de la propriété industrielle et avec le code
civil qui prohibe la commercialisation du corps humain.(3)

Le Comité consultatif national d’éthique a rendu, le 13 juin,
un avis qui s’oppose à la transposition de cette directive.
Au nom du “ libre accès à la connaissance (...), bien
commun de l’humanité“, les sages recommandent une
réécriture du texte.

L’association France Biotech, qui regroupe la majorité des
entreprises de biotechnologie, a manifesté sa
"consternation et son profond désaccord". Pour elle, " un
moratoire sur la brevetabilité des gènes en France aurait
pour effet de mettre le pays au ban des grandes nations
dans le domaine de la recherche médicale".(4)