Le 3 octobre 2006, le Tribunal Administratif (TA) de Lyon a rejeté la demande du Préfet du Rhône tendant à l’annulation de l’arrêté du Maire de Mornant. Cet arrêté, en date du 13 juillet 2004, interdisait pour trois ans la culture de PGM sur les zones A (zones agricoles), et Na et Nb (zones naturelles) du PLU de la commune. Mais il ne s’agit pas d’un jugement en rupture avec la jurisprudence préétablie : le TA n’a pas annulé l’arrêté car le Préfet n’en avait pas contesté tous les fondements. En effet, le maire avait bâti son arrêté sur trois fondements : risques pour la santé publique, nécessité de la protection de l’environnement et conséquences économiques qu’entraîneraient une baisse de la qualité des productions agricoles, notamment biologiques. Mais le Préfet n’a contesté la légalité que des deux derniers motifs. C’est cette “omission” qui permet à l’arrêté de ne pas être déclaré illégal. Sur les deux premiers motifs, le Tribunal adopte un raisonnement désormais traditionnel, déclarant l’incompétence du maire dans ces domaines. Le Préfet a jusqu’au 13 janvier pour faire appel.
Fin novembre, la Turquie a adopté une loi sur les semences au nom de l’harmonisation européenne [1]. Cette loi restructure et privatise le secteur des semences. L’association Grain dénonce notamment le fait que cette loi prévoit l’enregistrement obligatoire des variétés de plantes commerciales, l’introduction de graines génétiquement modifiées et des restrictions sur les droits des fermiers de conserver et d’échanger des semences.
Début novembre, le gouvernement du Lazio a voté une loi qui interdit les cultures de PGM sur son territoire [2], tolérant seulement que soient semées des cultures en milieu confiné en dehors de zones bien définies (domaine régional, zones d’agriculture biologique...). La région a également décidé, à l’instar de la Région Aquitaine en France (cf. FRANCE - Petite victoire de l’Aquitaine), que l’utilisation d’OGM dans l’alimentation du bétail ou la production agroalimentaire empêchait l’obtention des subventions gérées par la région (dont celles de la PAC). Cette loi régionale institue aussi que, pour la vente, les produits GM soient regroupés dans une zone distincte pour éviter toute confusion. Les OGM sont également interdits dans la restauration collective (jardin d’enfants, école et hôpital). Le Conseil de Région a prévu que tout manquement à ces prescriptions serait puni d’amendes administratives allant de 5000 à 50 000 euro€et d‘exclusions du bénéfice des aides régionales pour les contrevenants, l’exclusion impliquant la restitution des aides déjà perçues. En parallèle, la région du Lazio a adopté des dispositions visant à promouvoir l’agriculture sans OGM : création d’une marque régionale “produit sans-OGM”, soutien des projets de recherche relatifs aux produits non-OGM, création d’un comité pour la protection de l’agriculture et de la biodiversité. En Italie, le pouvoir législatif est partagé entre l’Etat et les régions, et ces dernières sont compétentes de manière exclusive en matière d’agriculture. Le Lazio est l’une des quinze régions italiennes (sur 20) déclarées “sans-OGM”.
Le 7 novembre 2006, l’Autorité Européenne de Sécurité des Aliments (AESA) a rejeté les arguments grecs [3], en concluant qu’ils n’apportaient pas de nouveaux éléments démontrant un danger imminent pour la santé ou l’environnement. Pour ce qui est de l’impact du maïs MON810 dû au développement de résistances des insectes cibles, l’AESA a conclu que le risque est faible mais que doivent être effectués des contrôles spécifiques à la Grèce sur ce point. Cet avis va permettre à la Commission européenne de demander au Comité de réglementation des États membres de statuer sur la levée du moratoire grec. L’Autriche et la Hongrie ont, eux aussi, interdit le maïs MON810 et se sont vus opposer des contre-arguments du même ordre. Pour la Hongrie, le Comité de réglementation n’avait pas obtenu la majorité qualifiée, renvoyant la décision au futur Conseil des ministres de l’environnement (cf. Inf’OGM n°78, HONGRIE - Le moratoire est maintenu). Pour l’Autriche, le Conseil environnement a refusé la levée du moratoire, en juin 2005 et le 18 décembre 2006, soulignant que “les diverses structures agricoles et les caractéristiques écologiques régionales nécessitent d’être prises en compte de manière plus systématique dans l’évaluation du risque sur l’environnement des OGM” [4].
La Commission n’a pas fait appel des rapports rendus par le Groupe spécial, le 29 septembre 2006, à propos du différend opposant les Etats-Unis à l’UE sur les mesures affectant l’autorisation et la commercialisation des produits biotechnologiques (cf. Inf’OGM n°79, OMC - Le jugement confirmé). Lors de sa réunion du 21 novembre, l’Organe de Règlement des Différends de l’OMC a donc adopté les rapports soumis par le groupe spécial. Peter Power, porte-parole au commerce de la Commission européenne, a précisé : “les dispositions réglementaires actuellement en vigueur ne sont de toutes façons pas concernées par le jugement [....] la décision ne vaut que pour le passé” [5]. Ces déclarations ne satisfont pas les Amis de la Terre Europe, qui considèrent qu’une telle renonciation permet d’établir “un dangereux précédent pour les futurs conflits environnementaux”. L’association regrette notamment que le protocole de Carthagène ait été ignoré par l’OMC sous prétexte que les plaignants (Etats-Unis, Argentine et Canada) n’en sont pas signataires. Et ce, bien que l’UE soit obligée de respecter ses règles [6]. Peter F. Allgeier, représentant des Etats-Unis à l’OMC déclare que “l’Union européenne doit encore mettre fin au moratoire dans sa totalité” et presse la Commission et les Etats membres de se conformer aux conclusions du groupe spécial.
Le 7 novembre 2006, Charles Pernin (Consommation, logement et cadre de vie, CLVC) a été nommé à la Commission du Génie Biomoléculaire (CGB) [7], en tant que représentant des consommateurs. Il remplace Olivier Andrault (également de la CLCV).
Le 27 novembre 2006, le Parlement hongrois a adopté une loi qui restreint de manière sévère la culture de PGM [8]. Les agriculteurs qui souhaitent planter des PGM doivent être titulaires d’un diplôme attestant qu’ils disposent des connaissances suffisantes et doivent demander une autorisation pour chaque mise en culture, autorisation éclairée par un avis du Ministère de l’environnement. L’agriculteur doit alors obtenir l’accord de tous les propriétaires et locataires inclus dans la zone tampon (400 m entre cultures GM et non-GM). Les voisins doivent s’engager à ne pas planter de variétés sexuellement compatibles avec les PGM cultivées. Une fois l’autorisation octroyée, l’autorité compétente en informera le public. Jozsef Graf, Ministre hongrois de l’agriculture, a déclaré qu’il s’agissait de la loi la plus restrictive d’Europe, voire du monde [9]. La loi a été votée en prévention d’une action de la Commission européenne qui forcerait la Hongrie, à l’instar de la Grèce (cf. UE - Le moratoire grec sur le MON810 rejeté), à retirer son moratoire sur le maïs MON810.
Le 5 décembre 2006, le Tribunal administratif de Bordeaux a rejeté la requête en annulation du Préfet de Région contre le règlement du Conseil régional d’Aquitaine (cf. Inf’OGM n°80, FRANCE - L’Aquitaine gagne en première instance ). Ce dernier exclut les entreprises fabriquant des produits étiquetés OGM des aides régionales. Le Tribunal ne s’est pas prononcé sur le fond du dossier, mais sera certainement amené à le faire lorsque des dossiers seront refusés. Affaire à suivre...
Le 12 décembre, la Commission européenne a renvoyé la France devant la Cour de Justice européenne pour non transposition de la directive 2001/18. L’objectif est d’imposer à la France une amende de 38 millions d’euro et une astreinte journalière de 366 744 euro. Le 15 juillet 2004, la France avait déjà été condamnée [10]. En mars 2006, un projet de loi de transposition a été voté par le Sénat mais n’a pas été soumis à l’Assemblée nationale. J.- F. Copé a annoncé l’adoption du projet de loi avant le 22 février, mais le Ministre de la recherche a affirmé que la France “avait le temps”.