Au Burkina-Faso, le coton représente 60% des récoltes, c’est pourquoi ce pays est très en pointe dans l’offensive des pays africains producteurs contre les subventions agricoles américaines. Le gouvernement a autorisé la mise en culture des premiers essais de coton transgénique Bt sur deux stations de l’Institut national de l’environnement et de recherche agricole (INERA) à Farako-ba (sud-ouest) et Fada (est). Cette décision ne fait pourtant pas l’unanimité : selon le syndicat de l’Union nationale des producteurs de coton du Burkina (UNPCB), qui défend les intérêts des 2,5 millions de producteurs du pays : « Le coton est utilisé pour s’habiller, mais ses graines se consomment. Les OGM, on nous répète à l’envi que c’est bien pour la rentabilité : n’empêche qu’il y a un large champ d’incertitudes. On doit appliquer le principe de précaution ». Cependant, avant d’en généraliser la production, le Burkina doit encore financer les études en laboratoire sur l’acclimatation du coton Bt. Et rassurer sur des questions cruciales en suspens : quel est le risque encouru sur des cultures vivrières associées à la culture du coton ? Par ailleurs, comme le rappelle Darry Macer, professeur à l’Université de Tsukuba (Japon), les Africains ne doivent pas oublier que « leur secteur agricole emploie 80 % de la population active » et que « les cultures transgéniques, qui nécessitent moins de main d’œuvre, risquent de perturber l’équilibre socio-économique de ces pays ».

Le ministre de l’environnement, Hans Christian Schmidt, a annoncé des restrictions importantes dans l’utilisation du glyphosate, la molécule active du roundup, suite à la découverte de résidus dans les eaux souterraines (cf. Inf’OGM n°43). Les producteurs et revendeurs du roundup affirmaient pourtant que le glyphosate ne pouvait être présent que dans le sol et sur une profondeur maximale d’un mètre.

Suite à des contrôles effectués en 2002 dans le domaine des semences, la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) a annoncé avoir détecté la présence fortuite d’OGM dans 109 cas, sur 447 prélévements. « Aucune mesure particulière n’a été prise dans 93 cas du fait que l’OGM présent s’est révélé être autorisé à la mise en culture (et à une teneur inférieure à 0,5 %), ou à la mise sur le marché (et à une teneur inférieure à 0,1 %). 14 cas ont vu l’OGM identifié et se sont rattachés à l’un des cas précédents. Dans les derniers 2 cas, une teneur importante en OGM a été mise en évidence : [...] les semences expérimentales ont été refoulées vers un pays acceptant cet OGM ». Pour l’alimentation humaine, sur 52 prélèvements (pour moitié des produits à base de soja), « 9 échantillons ne contenaient pas suffisamment d’ADN pour permettre une recherche d’OGM ; 33 échantillons n’ont pas révélé la présence d’OGM ; 10 échantillons ont mis en évidence la présence de soja Roundup Ready à un niveau inférieur ou égal à 0,2 %. Dans tous les cas, il s’agissait de présence fortuite telle que définie par la réglementation : le niveau de présence était inférieur à 1 % et [...] les opérateurs ont été en mesure de démontrer qu’ils avaient pris les mesures appropriées pour éviter d’utiliser des OGM ». En alimentation animale, en l’absence de réglementation spécifique, la DGCCRF a utilisé les critères de l’alimentation humaine. « Les contrôles de traçabilité ainsi que les 94 analyses réalisées en 2002 ont permis d’identifier 14 étiquetages incorrects : absence de mention « contient des OGM » avec un niveau de présence supérieur à 1 % et utilisation abusive de mentions faisant référence à l’absence d’OGM ».

La Commission a réaffirmé sa ferme opposition à l’instauration par des Etats membres de « zones sans OGM » sans preuves scientifiques nouvelles et en l’absence d’un problème spécifique national. Elle a indiqué qu’elle pourrait, dans le cas contraire, engager des actions devant la CJCE. Ceci vise particulièrement la volonté de l’Autriche d’interdir l’utilisation d’OGM en Haute-Autriche pendant trois ans. L’étude scientifique produite par l’Autriche a été jugée « comme n’apportant aucune preuve nouvelle » par l’Autorité européenne de sécurité des aliments.

En adoptant ses « lignes directrices » sur la coexistence entre cultures classiques et transgéniques, qui constituent une recommandation non contraignante, la Commission a réitéré sa préférence pour une réglementation au seul niveau national, contrairement aux souhaits de l’Allemagne, l’Autriche, le Luxembourg et le Portugal. Pour justifier son choix, Franz Fischler a souligné que les conditions de production agricole étaient « considérablement différentes d’un pays à l’autre » et s’est dit « favorable à ce que des agriculteurs se regroupent volontairement dans des zones homogènes prohibant le génie génétique », formule « économiquement judicieuse » pour partager les coûts nécessaires pour prévenir une contamination. Concrètement, la Commission propose pour limiter les contaminations, d’établir des distances de sécurité entre les champs ou de les séparer par des barrières anti-pollen comme les haies.

La Cour de Justice des Communautés européennes (CJCE) a rendu un arrêt de principe : d’une part, un aliment qui contient des résidus d’OGM peut être considéré comme « substantiellement équivalent » et donc autorisé par simple notification à la Commission ; d’autre part, un Etat membre peut « restreindre provisoirement ou suspendre la commercialisation et l’utilisation sur son territoire de ces aliments lorsqu’il a des raisons précises de suspecter un tel risque ». Autrement dit, un aliment même considéré comme substantiellement équivalent (au niveau nutritif) peut a posteriori être retiré du marché. L’équivalence en substance pour la CJCE ne signifie donc pas absence de risque. L’avis de la CJCE était demandé par un tribunal administratif italien dans une affaire opposant Monsanto au gouvernement italien. En 1997 et 1998, Monsanto, Syngenta et Pioneer Hi-Bred avaient mis sur le marché des aliments, notamment de la farine, provenant de maïs génétiquement modifé. A l’époque, l’autorité britannique compétente en matière d’évaluation des aliments avait attesté que les produits concernés équivalaient en substance à des aliments traditionnels. Mais l’Italie avait émis des doutes sur leur innocuité et interdit provisoirement leur commercialisation, amenant Monsanto à attaquer cette décision devant la CJCE. L’arrêt de la CJCE est cependant d’une portée très limitée car la procédure « simplifiée » en cause dans l’affaire a été abandonnée dans les nouveaux réglements sur l’étiquetage et la traçabilité des OGM (cf. dossier joint). Les juges ont cependant prévenu que l’Italie devait toujours fournir des preuves détaillées du risque représenté par ces produits pour justifier son interdiction (Voir aussi le point de vue, p.1).

En juin, les Etats-Unis avaient porté plainte devant l’OMC contre « le moratoire de facto » de l’Union européenne (UE). Les parties avaient alors 60 jours pour harmoniser leurs positions. Suite à l’échec de ces consultations, les Etats-Unis ont demandé à l’OMC de constituer un panel chargé de statuer sur le contentieux. Mme Deily, ambassadrice des Etats-Unis à l’OMC, a également accusé six pays de l’UE de maintenir des interdictions à l’importation sur certains produits OGM, malgré leur approbation par l’UE. Les Américains considèrent que les Européens se retranchent derrière des raisons plus proches du « protectionisme » que de la protection des consommateurs, d’autant qu’en juillet 2000, souligne le communiqué américain, Margot Wallström, Commissaire européen à l’environnement, qualifiait le moratoire « d’illégal et non justifié ». Dans cette nouvelle démarche, les Etats-Unis sont toujours soutenus par le Canada et l’Argentine. Ainsi, lors de sa réunion du 18 août 2003, l’Organe de règlements des différends (ORD) a examiné les premières demandes pour qu’un groupe spécial examine les mesures prises par l’UE affectant l’agrément et la commercialisation des OGM. Pascal Lamy, commissaire européen chargé du Commerce extérieur, s’est déclaré « persuadé » que « l’OMC confirmera que […] le cadre réglementaire de l’UE pour l’autorisation des OGM est clair, transparent, raisonnable et non-discriminatoire ». En revanche, l’ambassadeur de l’UE auprès de l’OMC, Carlo Trojan, a des doutes sur « la volonté [américaine] de s’engager dans un dialogue constructif en toute bonne foi » sur cette question.