Voici quelques réactions qui ont suivi l’adoption du projet de directive sur l’étiquetage.
M.Wallström, Commissaire Européen à l’Environ- nement, espère que « cet accord incite les 6 pays européens réfractaires à la levée du moratoire à envisager une politique contraire ». Seul le Danemark a objecté que des mesures assurant la protection de l’environnement étaient nécessaires avant de lever moratoire.
Pour Europabio(1), lobby des industries de biotechnologies, « la position commune adoptée par les Ministres européens de l’Agriculture montre leurs réticences quant à un encouragement pour l’utilisation des nouvelles technologies dans les domaines de l’alimentation et de l’agriculture ». Il estime que le seuil d’étiquetage de 0,5% pour la présence accidentelle d’OGM sera impossible à respecter pour les pays producteurs de plantes transgéniques. En ce qui concerne le seuil de 0,9%, Europabio considère que cela témoigne d’une ignorance volontaire des pratiques d’étiquetage actuelles et des seuils de détection adoptés par plusieurs pays, situés entre 1 et 5%.
De l’autre côté de l’Atlantique, cet accord a encore accru la possibilité du dépôt d’une plainte auprès de l’OMC contre le moratoire européen, et ce, malgré les craintes que le gouvernement américain a de provoquer une scission entre les pays européens. De leur côté, certains syndicats agricoles américains considèrent que les réglementations européennes vont même plus loin que le protocole de Carthagène. Quant à Roger Bate, directeur du Réseau de Politique International, il considère ces règles d’étiquetage comme « non scientifiques, confuses et inconsistantes » et qu’elles vont se traduire en « un non-transfert vers les pays en voie de développement de technologies qui améliorent le niveau de vie ». Pour lui, l’étiquetage devrait être obligatoire uniquement en cas de danger immédiat pour la santé humaine.
Au Canada, les industries considèrent qu’il sera difficile de se conformer à ces nouvelles directives. Ainsi, le Président du Conseil Canadien pour le Colza considère ces mesures « désappointantes », car si l’huile de colza exportée est effectivement produite à partir d’OGM, le produit final ne contient plus aucune trace de la modification génétique. Il ajoute que « ce n’est ni un problème de santé ni un problème de sécurité mais un problème purement politique ». Le colza canadien n’est plus exporté en Europe depuis 1997.
Patty Rosher, Responsable du Département OGM au Bureau Canadien du Blé, estime que « le Canada pourrait s’accommoder de seuil à 5% mais à 0,5%, cela deviendrait impossible […]. Ces mesures représentent clairement une barrière commerciale ».
Le contrat entre Ciba Geigy (filiale de Syngenta/Zeneca) et l’Institut International de Recherche sur le Riz, pour la licence du riz doré, inclut une clause limitant le commerce des semences de riz doré au seul marché indien. Ainsi, ce contrat interdit l’exportation de ce riz vers l’Union européenne, l’Australie, le Canada, la Nouvelle Zélande ou les Etats-Unis. Ainsi, toute variété de riz qui contiendra un gène du riz doré, d’origine volontaire ou non, ne pourra être exportée. La signature d’un tel contrat contient ainsi le risque d’un contrôle des cultures de riz en Inde par les industries de Biotechnologie [1].
La Commission sur le Poisson et la Faune Sauvage de l’Etat de Washington a adopté un règlement interdisant toute culture de saumon transgénique dans les eaux marines. L’Académie Nationale des Sciences Américaine a publié une étude concluant aux risques sérieux associés à l’utilisation d’animaux génétiquement modifiés.
Le Ministre de l’Agriculture, Roberto Rodrigues, du gouvernement de gauche récemment élu, a affirmé sa position en faveur de l’autorisation de cultures de plantes transgéniques. « Nous devons permettre aux agriculteurs qui le désirent, de cultiver des plantes transgéniques sous condition de contrôle absolu, d’étiquetage et d’assurances scientifiques quant à l’absence d’effets sur la santé publique et l’environnement ». Cependant, le Brésil espère combler son manque d’environ 3 millions de tonnes de maïs en l’important de Chine, pays qui garantit une absence d’OGM. Ce commerce conforterait alors la Chine à sa place de second plus gros exportateur de maïs, après les Etats-Unis.
La Commission Européenne a autorisé la vente de deux huiles issues de graines de coton génétiquement modifié, selon le réglement « novel food » (EC n°258/97). Ces autorisations de nourriture ont été délivrées par le Comité Anglais de Conseil sur les Nouveaux Aliments et Procédés. Seules 11 autorisations avaient été délivrées avant 2000. La classification « équivalentes en substances », indispensable à toute autorisation, peut être obtenue pour des produits dérivés d’OGM s’avérant similaires à des produits naturels et ne contenant aucune trace de matériel transgénique ou protéine. La procédure d’autorisation relève d’un Etat membre de l’Union européenne qui, après acceptation du produit, signifie cette autorisation à la Commission qui la signale alors aux Etats membres. Courant 2003, une nouvelle procédure devrait être mise en place afin de permettre à un Etat membre d’émettre une objection sur une autorisation délivrée par un autre Etat ; de plus, la Commission européenne présentera tout dossier au Comité Scientifique de l’Union européenne avant tout accord final. La liste complète des produits équivalents en substance et autorisés pour le marché européen est disponible sur le site europa.eu.int.
L’Agence Suisse pour l’Environnement a donné son accord à une demande d’essai en champ de blé transgénique, déposée par l’Institut Fédéral de Zurich pour les Biotechnologies (IFZB).
Le Centre des Sciences pour l’Intérêt Public (The Center for Science in the Public Interest - CSPI) considère que de nombreuses lacunes empêchent la Food & Drug Administration (FDA) de garantir l’absence de risques des OGM dans la chaîne alimentaire humaine. La procédure d’étude de la FDA est mise en cause et le CSPI recommande que l’ensemble du système soit revu. Il affirme notamment que la FDA est dans l’incapacité d’obtenir des industries de biotechnologie toutes les données scientifiques nécessaires, ces dernières (telles que Monsanto, Syngenta et Dow) refusant de communiquer ces données (1). Michael Hansen, de Consumers International, a confirmé que la FDA n’avait jamais testé la nourriture issue d’OGM mais s’était toujours fiée aux résultats des industries. Il précise que la FDA ne publie jamais l’ensemble des données utilisées pour ses rapports (2).