Le 2 mai 2007, la cour d’appel du Saskatchewan avait jugé que la demande de recours collectif (“class action”) de deux agriculteurs (Larry Hoffman et Dale Beaudoin), dont les cultures de colza biologique ont été contaminées par des OGM de Monsanto, n’était pas recevable [1]. Les plaignants souhaitaient obtenir cette possibilité de recours collectif pour que d’autres agriculteurs victimes des contaminations puissent porter plainte collectivement. Suite au refus de la cour d’appel, ils sont allés plaider leur cas auprès de la Cour Suprême du Canada. Mais le 13 décembre 2007, cette dernière a également refusé d’accorder ce statut de recours collectif contre Monsanto et Bayer CropScience.

En janvier 2008, l’association Kokopelli perdait deux procès [2], contre l’Etat et contre le semencier Baumaux.

Une déclaration contre l’utilisation des plantes transgéniques [3], signée par plus de 300 chercheurs et représentants de la société civile, a été présentée à la presse le 16 janvier 2008. Cette déclaration précise que les OGM représentent une menace pour la santé, l’environnement et l’agriculture durable. Les Amis la Terre, la COAG, Ecologistas en acción (Ecologistes en action) et Greenpeace, en collaboration avec Científicos por el Medio Ambiente (Scientifiques pour l’Environnement, CIMA) ont voulu faire entendre la voix de nombreux chercheurs, universitaires, enseignants, organisations professionnelles agricoles, associations des écologistes, de consommateurs, de producteurs d’agriculture écologique, ONG de développement et montrer ainsi que, contrairement à ce qu’affirment les industriels de la biotechnologie, les plantes transgéniques sont rejetées massivement, et par toutes les professions. Cette déclaration précise que les OGM sont une question qui affecte l’ensemble de la société, et que si l’aspect scientifique est important, c’est malgré tout à la société dans son ensemble de prendre les décisions qui affectent l’agriculture et l’alimentation. Les organisations qui promeuvent cette déclaration espèrent que le gouvernement espagnol entendra l’opposition sociale forte à « l’imposition des OGM dans l’agriculture et l’alimentation » et qu’il réorientera l’agriculture vers des pratiques environnementalement et socialement durables.

Une équipe de chercheurs de l’Institut Craig Venter a fabriqué un génome bactérien 100% synthétique [4]. Partant de séquences d’ADN synthétisées par des entreprises spécialisées, les chercheurs ont collé bout à bout ces séquences, en utilisant la caractéristique de l’ADN de pouvoir coller l’un à l’autre des brins, et ce afin de reconstituer le génome complet de la bactérie Mycoplasma genitalium, soit 582 970 paires de bases. La prochaine étape sera de transférer ce génome synthétique dans une cellule d’une autre espèce pour “ reprogrammer ” la cellule. L’objectif de ce programme de recherche est de mettre au point des organismes dédiés à la production d’agrocarburants. Il semble donc que les scientifiques estiment plus simple de créer un organisme synthétique que d’en modifier génétiquement un existant, ou encore d’utiliser des ressources naturelles renouvelables. Ce travail de recherche repose sur un dogme biologique : le tout génétique. En effet, les chercheurs considèrent que l’ADN sera capable d’ordonner à une cellule d’espèce différente de vivre selon le code qu’il lui insuffle. Mais l’influence de l’environnement sur l’évolution d’un organisme, ainsi que des facteurs épigénétiques (non liés au génome) ont été observés dans plusieurs domaines et le travail décrit ici nécessitera de très nombreuses analyses avant de pouvoir déboucher sur des organismes déclarés sans risque. Sauf à les considérer comme équivalents en substance aux mycoplasmes naturels, auquel cas ces études d’innocuité ne seraient pas jugées nécessaires.

Le 29 janvier 2008, la député UMP, Bérengère Poletti, adressait une question écrite au Ministre de la santé à propos d’une carotte transgénique, susceptible d’améliorer la lutte contre l’ostéoporose [5].

En Islande, pays qui ne fait pas partie de l’UE mais de l’Espace Economique Européen (EEE), la loi sur le commerce et la dissémination des OGM date de 1996 et est basée sur la directive européenne 90/220. Or, cette directive a été abrogée dans l’Union européenne (et remplacée par la 2001/18, plus stricte). Mais l’Islande n’a toujours pas rendu obligatoire l’étiquetage des OGM sur son territoire. « Nous sommes le seul pays européen qui n’oblige pas l’alimentation à être étiquetée si elle contient des OGM. Or, l’Islande est, parmi les pays européens, celui qui achète le plus de produits alimentaires des Etats-Unis », dénonce Johannes Gunnarsson, le président de la Consumers’ Association[[IPS, 23 janvier 2008, http://ipsnews.net/news.asp?idnews=40882].
Selon Sigridur Audur Arnardottir, juriste au ministère de l’Environnement, de nouvelles réglementations basées sur la nouvelle directive européenne 2001/18 sont actuellement soumises pour commentaires et devraient être prêtes fin février. Et une autre réglementation, permettant d’intégrer le Protocole de Carthagène en droit national, sera aussi élaborée dans les mêmes délais. L’Islande a en effet signé ce Protocole, et entend le ratifier assez rapidement.
Par ailleurs, l’Islande est impliquée dans des essais en champ de PGM. Le dernier essai, très controversé, concerne une orge génétiquement modifiée pour produire des facteurs de croissance, lesquels doivent servir pour des traitements contre le cancer ou la recherche sur les cellules souches. Cet essai est mené par l’entreprise islandaise ORF Genetics, qui loue ses terrains au Soil Conservation Service (SCS) qui cultive, non loin de cet essai, deux autres graminées - Deschampsia beringensis et Festuca rubra - dans un but de re-végétalisation, qui peuvent donc, en théorie et d’après les opposants islandais, se croiser avec l’orge GM. Cet essai est critiqué car l’orge est la seule céréale qui pousse en Islande. Si les responsable d’ORF et du SCS affirment qu’il n’y a aucun risque de pollinisation croisée entre les orges GM et non GM – notamment du fait que le pollen d’orge ne peut survivre que 24 heures au climat froid de l’Islande - les responsables de l’organisation islandaise de certification des productions bio en sont moins convaincus. Ils évoquent non seulement la pollinisation, mais aussi la question de la coexistence, qui ne se résume pas à cet aspect technique.

L’entreprise BASF a signé un accord de coopération avec l’Institut national de Sciences Biologiques (NIBS) en Chine [6]. Cet accord a pour objectif la mise en place de projets communs visant à accroître les rendements de plantes comme le maïs, le soja et le riz, par le biais de biotechnologies. Ainsi, NIBS devrait continuer à travailler sur les familles de gènes déjà identifiés et impliqués dans les rendements végétaux, avant qu’elles ne soient intégrées aux programmes de recherche et développement de BASF. Et BASF aura le droit de commercialiser les PGM issues de ces recherches hors de la Chine, alors que le NIBS les commercialisera en Chine. Les détails financiers de l’accord n’ont pas été révélés. En octobre 2007, BASF signait un accord similaire avec le Centre de Génomique Fonctionnelle des Plantes de Corée du Sud.
Par ailleurs, en Amérique du Sud, l’Union européenne a officialisé un soutien financier au développement des biotechnologies [7] en signant un accord avec les pays membres du Mercosur (Marché Commun du Sud). Cet accord institue le programme Biotecsur [8] qui ambitionne de promouvoir le développement et l’exploitation des biotechnologies agricoles dans quatre domaines considérés comme prioritaires : oléagineux, forestier, aviaire et ovin. Le programme Biotecsur sera une plate-forme, un lieu de discussions et de travail entre acteurs gouvernementaux, académiques et privés. Il sera doté d’un budget total de 7,3 millions d’euro, majoritairement alimenté par l’Union européenne. Les activités qui seront mises en oeuvre au sein de ce programme concerneront une coordination du transfert de technologies, l’élaboration d’instruments de promotion de ces technologies en Amérique du Sud et la formation de personnel, le tout sous la coordination générale du Ministère argentin de la Science, la Technique et l’Innovation productive. Des réunions entre représentants des pays du Mercosur et de l’Union européenne auront lieu jusqu’en mai afin d’identifier les besoins des pays du Mercosur et déboucheront sur un appel à projet. Un jury composé d’experts et de politiques sélectionnera en septembre quatre projets qui seront chacun dotés d’une subvention d’un million d’euro [9].

Courant 2007, la CTNBio (commission scientifique brésilienne) a rendu deux avis positifs pour la commercialisation et la culture de deux maïs transgéniques : le LL de Bayer (ou T25, tolérant un herbicide, le glufosinate d’ammonium) et le MON810 (qui produit un insecticide) [10]. Le 12 février dernier, le Conseil National de la biosécurité (CNBS), composé de onze ministres, a donné l’autorisation formelle pour la commercialisation de ces deux maïs avec sept voix contre quatre. C’est la première fois que du maïs transgénique est autorisé à la culture et à la commercialisation au Brésil.
La séance du CNBS a mis en évidence des oppositions marquées au sein du gouvernement. Si le ministère de l’agriculture estime que la culture des deux maïs permettra une augmentation de rendement de 30 à 40%, le ministère de la Santé aurait souhaité davantage d’études toxicologiques et d’allergénicité. Le ministère de l’environnement, celui de l’aquaculture et de la pêche, et celui du développement agraire se sont également opposés à la décision.
Courant 2007, les deux avis de la CTNBio avaient été très controversés. Un tribunal fédéral avait notamment suspendu l’avis de la CTNBio sur le T25 dans l’attente de mesures de coexistence (Inf’OGM Actu n°1, BRESIL – Le maïs Liberty Link de Bayer autorisé, suspendu... puis annulé). D’autre part, deux agences nationales chargées de la surveillance sanitaire et environnementale avaient demandé au CNBS le refus des deux autorisations, notamment car la distance entre les cultures, fixée par la CTNBio, était « insuffisante »... Le 12 février, en un peu plus d’une heure, la séance du CNBS a balayé ces questions.

A l’heure où les moratoires mis en place par les Etats australiens de Victoria, du South Australia (SA) et de New South Wales (NSW) sont sur la sellette, on assiste à une mobilisation sans précédent des acteurs économiques. Ainsi, en janvier 2008, la chaîne de supermarchés Foodland, qui possède 109 magasins, a clairement affiché sa volonté de ne plus utiliser d’ingrédients d’origine transgénique dans les 160 produits qu’elle distribue sous sa propre marque. Cette entreprise a aussi pris position pour l’adoption d’une loi qui rende obligatoire l’étiquetage des OGM. En novembre 2007, l’entreprise agro-alimentaire Goodman Fielder – qui possède plusieurs marques d’ampleur international, comme Meadow Lea, Praise, White Wings, et Helga’s, - et Tatiara Meat Company – qui exporte du mouton notamment auprès de Carrefour, Intermarché, Métro - ont, eux aussi, pris position, demandant un maintien des moratoires sur la culture d’OGM pour au moins encore cinq ans. Ces entreprises bénéficient en effet d’un meilleur prix sur le marché international du fait d’une alimentation sans OGM de leurs animaux. Le ministre de l’Agriculture de l’Etat de l’Australie de l’Ouest, Kim Chance, a non seulement accueilli favorablement l’appel en faveur du moratoire de Goodman Fielder, mais il a aussi dénoncé comme non fondé scientifiquement, un rapport rédigé par Rick Roush (Université de Melbourne) qui affirmait que les OGM permettraient d’augmenter de 30% les rendements. Enfin, un sondage, conduit par la Swinburne University, montre que 30% des Australiens se “sentent à l’aise” (en anglais "were comfortable") avec les plantes GM destinées à l’alimentation mais ce pourcentage tombe à 19% avec les animaux GM destinés à l’alimentation.

Les gènes marqueurs sont utilisés en laboratoire pour sélectionner les plantes ayant bien intégré le transgène, à l’image des gènes conférant une résistance aux antibiotiques. L’interdiction européenne d’utilisation commerciale de ces derniers du fait des risques d’acquisition de résistance aux antibiotiques, impose aux scientifiques de trouver des moyens de s’en débarrasser avant commercialisation de la plante. Une équipe de chercheurs de l’Université de Taïwan [11] propose pour cela d’utiliser les caractéristiques des transposons. Ces derniers sont des gènes qui ont la capacité de s’extraire du génome, d’où leur nom vulgarisé de “gènes sauteurs”. Pour se faire, les deux extrémités du gène transposon se combinent l’une à l’autre, formant comme une boucle sur une seule corde. C’est cette boucle qui se détache du génome, comme si la boucle de corde se détachait du reste de la corde. Pour utiliser cette propriété, les scientifiques placent l’une des extrémités du transposon au sein du gène marqueur. Ainsi, lorsque sur réception d’un signal particulier, le transposon formera une boucle, une partie du gène marqueur se retrouvera dans cette boucle. Le retrait de cette dernière du génome enlèvera donc une partie du gène marqueur et désactivera définitivement ce dernier. Pour que ce système fonctionne, il restera à évaluer les impacts biologiques de la séquence restante du gène marqueur, afin d’assurer qu’elle ne comporte aucun risque sanitaire par exemple. Par ailleurs, les scientifiques devront déterminer ce que devient cette boucle qui aura sauté, car le propre des transposons est de se retirer d’un endroit pour s’insérer à un autre endroit, avant de ressauter, de se réinsérer puis de ressauter à nouveau... Alors que les entreprises doivent renseigner la place précise qu’occupe le transgène dans le génome, ce transposon fugueur et porteur d’une partie de gène marqueur risque donc de poser problème.

Une étude publiée dans Nature Biotechnology a été présentée dans la grande presse comme la première démonstration de l’acquisition d’une résistance d’une noctuelle, un petit papillon, à l’insecticide contenu dans une plante transgénique destinée à la combattre. Qu’en est-il exactement ?

Depuis l’activation de la clause de sauvegarde, voire auparavant, lors du Grenelle de l’Environnement, la question de la liberté est revenue, régulièrement, pour justifier ou vilipender des décisions politiques relatives aux OGM. L’Alliance pour la planète, le monde de la « bio », et de nombreuses autres organisations lancent un "Appel pour la liberté et le droit de produire et consommer sans OGM" [12].
De l’autre côté, les organismes professionnels qui promeuvent les OGM se mobilisent pour défendre la liberté de cultiver des OGM. Ainsi, l’AGPM propose sur son site une pétition intitulée "Cultiver des OGM est un choix légal ! Agissons pour préserver cette liberté en 2008 !" [13]. Cette pétition présente les OGM comme un des outils disponibles pour les agriculteurs pour « préserver l’environnement » : "Certains de nos gouvernants qui affichent pourtant leur conviction écologique refusent arbitrairement de considérer les preuves de la sécurité et de l’utilité des OGM pour la production agricole et pour l’environnement, préférant céder aux discours irrationnels d’activistes hors-la-loi".
Face à ces deux demandes, qui utilisent les mêmes arguments, liberté et défense de l’environnement, que va faire le gouvernement ?

Si les contaminations étaient encore à prouver, l’expérience menée dans le cadre du dispositif d’étude et de suivi des contaminations génétiques sur maïs, mis en place en 2007 par le Conseil Régional du Centre et Bio Centre, remplit amplement ce rôle. En effet, comme l’indique un communiqué de presse des Faucheurs Volontaires du Centre, « l’une des analyses effectuées sur pied, dans une des parcelles de la région, a mis en évidence une contamination de 2,3% par du MON 810. Les parcelles étant a priori éloignées des champs OGM, une contamination génétique de semences pourrait être à l’origine de la pollution observée » [14]. Les responsables de l’étude précisent que "en effet, à l’insu des agriculteurs et des consommateurs, les fournisseurs de semences de maïs imposent depuis plusieurs années déjà dans leur cahier des charges, une présence « fortuite » d’OGM, en acceptant un taux de contamination jusqu’à 0,9%, contrairement à la réglementation en vigueur qui prescrit, par défaut, 0% de tolérance sur les semences". Inf’OGM cherche encore des précisions, notamment sur les résultats de ces contaminations et des hypothèses sur leur origine, et vous livrera un complément d’enquête avec Inf’OGM ACTU 8.

En novembre, Jean-Louis Borloo, ministre de l’Environnement, confiait à Corinne Lepage, ex-ministre de l’Environnement, la mission de réfléchir à des moyens « d’améliorer les accès à l’information, à l’expertise et à la justice en matière d’environnement », ainsi qu’une réflexion sur la responsabilité environnementale. Entourée d’une vingtaine d’experts (juristes, journalistes, sociologues, scientifiques...), elle a rendu un premier rapport le 7 février, contenant plus de 80 propositions relatives au droit à l’information environnementale, à l’expertise, et à la responsabilité.
Dans le domaine plus particulier des OGM, ce rapport propose, entre autres :
- l’obligation de mise à disposition en ligne gratuite de toutes les données brutes relatives à l’environnement,
- la protection des lanceurs d’alerte, et l’engagement des crédits nécessaires pour apporter la réponse à la question posée par l’alerte,
- la mise en place d’une possibilité pour les ONG de passer des conventions avec les universités,
- l’obligation de consacrer au moins 5% des crédits publics alloués à la recherche technologique à des recherches sur les effets sanitaires, environnementaux et sociétaux (comme c’est actuellement le cas aux Etats-Unis sur les nanotechnologies),
- l’obligation de justifier l’intérêt et les avantages collectifs d’une technologie avant que ne soit abordée la question des risques et des inconvénients,
- le caractère contradictoire de la procédure d’expertise, en instaurant l’obligation de défendre le pour et le contre,
- et l’obligation de considérer les débats des commissions comme des documents publics communicables.
Selon Corinne Lepage, ce rapport « reprend et formalise des propositions, pour beaucoup issues du processus du Grenelle de l’environnement, en vue de leur mise en oeuvre dans le premier projet de loi Grenelle ». Par ailleurs, et comme l’annonce la lettre de mission de Jean-Louis Borloo, « certaines préconisations pourraient être promues par la France lors de sa présidence de l’Union européenne ».

Le 9 février était publié au Journal officiel l’arrêté ministériel de suspension de la culture du maïs MON810. Cet arrêté stipule que cette suspension n’est valable que jusqu’au renouvellement européen de l’autorisation de ce maïs, prévu pour courant 2008. Interrogée par Inf’OGM, la Commission dit ne pas savoir quand interviendra ce renouvellement. S’il arrive avant la fin des semis, il y aura potentiellement des OGM cultivés en France en 2008, contrairement à tout ce qu’on a lu dans la presse.
Cet arrêté fait référence à deux fondements juridiques : l’article 23 de la directive 2001/18 (qui définit la clause de sauvegarde) et le règlement 1829/2003 sur les denrées alimentaires et les aliments pour animaux GM.
Le 8 février, la clause de sauvegarde a été notifiée à la Commission européenne, accompagnée de l’argumentaire scientifique justifiant la suspension. Mais on apprenait plus tard [15] que les autorités françaises avaient également notifié à la Commission, le 12 février, une demande visant à ce que la Commission examine l’opportunité des mesures d’urgence. Il revient donc à la Commission de choisir le fondement juridique approprié pour la suspension du MON810.
Le choix de ce fondement n’est pas sans enjeux. Selon que l’on est dans le cadre de la directive ou du règlement, les conditions et les délais ne sont pas les mêmes. Si la directive évoque des « raisons précises de penser que l’OGM présente des risques », les mesures d’urgence, elles, parlent d’"évidence" de « risque grave » et d’une condition d’urgence. Et donc, les conditions de fond sont plus difficiles à rassembler dans le cadre des mesures d’urgence. Sur les délais, dans le règlement 1829/2003, le comité des représentants des Etats doit être saisi dans les dix jours et se prononcer selon des délais fixés en fonction de l’urgence de la réponse. Contrairement à la directive, le règlement ne parle à aucun moment de saisir l’Autorité Européenne de Sécurité des Aliments pour qu’elle donne son avis préalablement sur les risques. D’autre part, selon que la suspension relève de la directive ou du règlement, le dossier sera suivi par deux directions générales différentes : respectivement, la DG Environnement ou la DG Santé et Consommation (SANCO). Lorsqu’on connaît les craintes exprimées sur les OGM par Stavros Dimas, commissaire européen à l’environnement, la DG compétente n’est pas sans conséquence...
La DG SANCO a indiqué à Inf’OGM qu’une vraie question de base juridique se pose : en effet, le maïs MON810 est autorisé en vertu de la directive 2001/18 et a été notifié selon le règlement 1829/2003. Mais il semble que la question ne se soit pas posée lorsque l’Allemagne décidait l’année dernière de suspendre la commercialisation des semences de MON810 : pour l’Allemagne, c’est la clause de sauvegarde qui a été mise en œuvre.
C’est donc la première fois qu’une telle double notification se produit. La décision reviendra dans les tous prochains jours aux commissaires eux-même. Cela ne viendrait-il pas du bras de fer Borloo- Barnier sur la question de la clause de sauvegarde, Barnier étant plus réticent vis-à-vis de cette clause ?

Les 5, 6, et 7 février, les sénateurs examinaient le projet de loi sur les OGM. Pour la majorité UMP et la Commission des affaires économiques, ces trois jours ont été l’occasion d’amender le projet de loi dans un sens qui ne satisfait pas les organisations écologistes et certaines organisations professionnelles : Greenpeace qualifie de "sanglante” la reprise en main du dossier par le Sénat, la FNAB estime que le Sénat confond “intérêt des puissants et intérêt des générations futures”...
Les députés donneront leur avis sur ce texte début avril. En attendant, Inf’OGM analyse pour vous les principaux changements introduits dans ce projet de loi.

Haute autorité : moindre prise en compte de la société civile, et nouveau comité de surveillance

Dans le projet de loi initial, la Haute autorité était composée de deux comités : le “comité scientifique” compétent à la fois dans le cadre de l’utilisation confinée et dans le cadre de la dissémination volontaire des PGM (culture en plein champ), et le “comité économique, éthique et social”, compétent pour rendre des avis uniquement sur la dissémination volontaire des PGM. Puis un “collège de la Haute autorité”, composé du président des deux comités et du président de la Haute autorité, devait, sur le fondement des avis des deux comités, rendre l’avis de la Haute autorité.
Rebaptisée “Haut conseil des biotechnologies” - le terme “autorité” induisait un réel pouvoir de décision alors que cette commission n’a qu’un pouvoir d’avis - cette commission a subi quelques changements notoires dans son mode de fonctionnement et ses compétences. Tout d’abord, le “comité économique, éthique et social” est rebaptisé “comité de la société civile”, et voit ses attributions revues à la baisse. Alors qu’il était prévu qu’il puisse donner des avis au même titre que le comité scientifique, il ne peut désormais que formuler des “recommandations”. Ces recommandations et l’avis du comité scientifique sont ensuite transmis au ministre compétent. Ces modifications caractérisent la volonté du Sénat d’amoindrir la portée des considérations économiques et sociales au sein de ce Haut conseil.
D’autre part, le Haut conseil n’est plus compétent pour élaborer les méthodes d’évaluation des risques environnementaux des PGM et ses modalité de saisine sont restreintes. En vertu du projet de loi initial, il pouvait en effet être saisi par “toute personne” (comme au temps de la CGB). Désormais, seules certaines associations (consommateurs, protection de l’environnement) et certains syndicats peuvent le saisir.
Enfin, les sénateurs ont placé la surveillance des PGM en dehors du champ de compétence du Haut conseil. Ils ont pour cela créé le “comité de surveillance biologique du territoire” qui vient remplacer le Comité de biovigilance. Ce dernier, créé en 1998, était l’organe officiel de surveillance des cultures transgéniques. Mais, faute du décret fixant son organisation et ses missions précises, il était toujours provisoire et ne remplissait pas les missions qui lui étaient confiées (cf. Inf’OGM n°84) Le Comité de surveillance biologique du territoire sera consulté sur les protocoles et méthodologies d’observation, et formulera des recommandations sur les orientations à donner à la biovigilance.

Les règles de coexistence : confusion avec le seuil d’étiquetage à 0,9%

Auparavant absent du projet de loi, le mot “coexistence” est désormais inscrit dans le titre du chapitre II du projet. Initialement restreintes à la mise en culture des PGM, les conditions techniques de la coexistence s’appliquent désormais également à la récolte, au stockage et au transport des PGM mis en culture. Outre cet aspect, le Sénat a considérablement assoupli les règles de coexistence. D’une part, les distances d’isolement seront définies par le ministre de l’Agriculture et uniquement par nature de culture. Les considérations climatiques et pédologiques ne figurent donc plus dans le projet. D’autre part, selon la rédaction initiale du projet de loi, les conditions techniques avaient pour objectif d’“éviter la présence accidentelle” de PGM dans d’autres productions. Désormais, l’objectif de ces règles est clairement revu à la baisse, surtout pour les distances qui “doivent permettre que la dissémination entre les cultures soit inférieure au seuil défini par la réglementation communautaire”. On voit bien là la volonté d’amalgamer le seuil de présence accidentelle et le seuil d’étiquetage des OGM (0,9%). Or le seuil d’étiquetage n’a aucune vocation à s’appliquer au seuil de présence fortuite d’OGM dans les produits... Un seuil de présence fortuite n’a jamais été défini par l’UE. La seule disposition communautaire sur ce point est l’article 26 bis de la directive 2001/18 qui permet à un Etat de prendre les mesures nécessaires pour éviter la présence accidentelle de PGM dans d’autres produits (0% donc). La formulation adoptée par le Sénat n’a donc pas de signification particulière et elle est source d’insécurité juridique.
Sur les règles de responsabilité, il semble que la réparation partielle du préjudice issu d’une contamination a satisfait les sénateurs. Pour rappel, la loi prévoit une responsabilité sans faute du seul cultivateur de PGM, pour une contamination d’une culture voisine supérieure à 0,9%. Le préjudice est basé sur la différence entre le prix de la culture non GM et le prix de la culture GM.
A noter, le registre parcellaire des cultures demeure public.

Le 18 février, le Conseil des ministres européens de l’Agriculture n’a pas atteint la majorité qualifiée nécessaire à une autorisation ou un refus d’autorisation sur plusieurs OGM. Il s’agit de dossiers d’autorisation concernant quatre maïs et une pomme de terre, même si pour la pomme de terre, la majorité simple était réunie contre l’autorisation [16]. Selon la représentation permanente de la France au Conseil de l’Union européenne, la France s’est abstenue sur les cinq autorisations. Il revient désormais à la Commission européenne d’autoriser ces OGM.
Pour les maïs, les utilisations soumises à autorisation concerne l’alimentation animale et humaine et la transformation, aucune ne couvre la culture :
- le maïs MON863xNK603 (toxique pour certains coléoptères et tolérant le glyphosate) : l’évènement transgénique est déjà autorisé en tant qu’additif alimentaire, et dans l’alimentation animale ;
- le maïs MON863xMON810 (toxique pour certains coléoptères et la pyrale) : pour l’alimentation animale, le dossier a fait l’objet d’une demande de renouvellement ;
- le maïs MON863xMON810xNK603 (toxique pour certains coléoptères et la pyrale et tolérant le glyphosate) : il s’agit d’une première demande en Europe sur toutes les utilisations confondues ;
- le maïs GA21 (tolérant le glyphosate) est déjà autorisé pour les additifs alimentaires et l’alimentation animale.
Pour la pomme de terre, il s’agit de l’« Amflora » EH92-527-1 génétiquement modifiée pour produire de l’amidon. Le projet d’autorisation concerne des usages précis dans l’alimentation humaine et animale : les aliments pour animaux produits à partir de la pomme de terre, les denrées alimentaires contenant la pomme de terre, consistant ou produite à partir de celle-ci dans la limite de la présence fortuite inférieure à 0,9% et les aliments pour animaux contenant ou consistant en celle-ci dans la limite de 0,9%. Si l’autorisation est octroyée, la pomme de terre sera autorisée dans l’alimentation humaine, mais juste un peu ! C’est la première fois qu’on autoriserait explicitement une PGM pour l’alimentation humaine ou animale à des seuils inférieurs à 0,9%. Rappelons que cette pomme de terre est en attente d’une autorisation de la Commission pour la culture. En novembre 2007, Barbara Hellferich, porte-parole de la DG environnement, nous indiquait que l’autorisation serait prise "dans quelques semaines" (cf. Inf’OGM ACTU n°3, UE - Les procédures d’autorisation vont bon train...). A l’heure actuelle, elle n’est toujours pas inscrite à l’agenda de la Commission. Les industriels souhaitent avoir une autorisation pour l’alimentation animale afin de pouvoir utiliser les résidus (peau et restes de pulpe). La demande sur l’alimentation humaine est destinée à prévenir d’éventuelles contaminations. Rappelons que la pomme de terre contient un gène de résistance à deux antibiotiques (kanamycine et néomycine), tout comme le MON863. Pour mémoire, les gènes conférant une résistance à la kanamycine avaient au départ été approuvés comme marqueurs de sélection en génie génétique du fait que cet antibiotique n’était plus utilisé pour traiter des maladies. Cependant, il s’avère que la kanamycine a toujours des applications pharmaceutiques en médecine humaine et en médecine vétérinaire.

Le 20 février, l’Association Générale des Producteurs de Maïs (AGMP) a déposé deux recours contre l’arrêté de suspension du maïs MON810, l’un en annulation, l’autre en référé-suspension. La procédure de référé-suspension est une procédure d’urgence permettant, à toute personne qui y a un intérêt, de demander la suspension de l’application d’une décision administrative, le temps que le juge administratif puisse statuer sur la demande d’annulation. Dans un communiqué de presse [17], l’AGPM fait valoir que « la décision prise par le Gouvernement est susceptible de causer rapidement de graves préjudices dans les zones où le maïs conventionnel est exposé à des attaques de pyrale et sésamie ». La Confédération Paysanne et FNE ont d’ores et déjà annoncé qu’elles pourraient intervenir devant le juge pour défendre l’interdiction [18]. L’audience en référé se tiendra le 12 mars à 10 heures.

Le 22 février 2008, l’entreprise Dow Agroscience a annoncé avoir retiré du marché aux Etats-Unis certains lots de semences de maïs hybride potentiellement contaminés par un maïs transgénique non autorisé à hauteur de 0,3% [19]. Aucun détail quant à l’origine de la contamination ni les évènements ayant amené à sa découverte ne sont fournis, que ce soit par l’entreprise ou par les autorités états-uniennes saisies du dossier. Le maïs GM en cause est le maïs résistant aux insectes 59132, cousin du maïs 59122 qui est autorisé commercialement aux Etats-Unis et en cours d’autorisation en Europe. Selon l’entreprise, les deux maïs contiennent les deux mêmes protéines Bt, cry34Ab1 et cry35Ab1. Conséquence directe de cette similitude : les autorités états-uniennes ont réagi en indiquant qu’une mesure de tolérance allait être appliquée [20] Les premières informations disponibles font seulement état d’une contamination remontant à 2006 et 2007. La surface de culture concernée par cette contamination aux Etats-Unis serait de 21 448 hectares en 2007. Le maïs 59122 a déjà fait parler de lui en avril 2007 puisqu’il était importé illégalement en Europe via l’Irlande et les Pays-Bas (cf. Inf’OGM n°86, UE - Du maïs GM illégal ). Cette contamination s’ajoute donc aux précédentes (maïs 59122, maïs Bt10, riz LL601) qui sont originaires des Etats-Unis. A la différence des trois précédentes, celle-ci n’a donc pas officiellemet atteint l’Europe. La réaction des autorités européennes est attendue.

Un eurobaromètre (sondage réalisé à l’échelle européenne) sur le clonage va être conduit et ses résultats rendus publics au second semestre 2008, a annoncé le Commissaire à la Santé des Consommateurs, Markos Kyprianou [21]. La conduite de ce sondage n’est pas le fruit du hasard mais plutôt de la conjoncture états-unienne sur le dossier des biotechnologies. Fin 2006, l’Agence états-unienne pour l’Alimentation et les médicaments (FDA) avait rendu public un avis qu’elle vient d’ailleurs de confirmer en janvier 2008 et selon lequel elle considérait les produits issus d’animaux clonés sans risque pour la santé. Malgré la commercialisation rendue donc possible par cette décision, les professionnels de l’élevage ont accepté de respecter un moratoire informel, sans raison particulière autre que celle officieuse de sonder les débouchés commerciaux. Le débat fait toujours rage aux Etats-Unis puisque la FDA ne demande pas à ce que les produits issus d’animaux clonés soient étiquetés en tant que tel. Cette absence d’étiquetage a amené le sénateur Carol Migden de l’Etat de Californie à déposer une proposition de loi pour cet état, imposant un tel étiquetage [22]. Anticipant donc une future commercialisation de ces produits issus de bovins, d’ovins et de porcs clonés, la Commission européenne a demandé à l’Agence européenne de Sécurité Alimentaire (EFSA) et au Groupe européen d’éthique des sciences et des nouvelles technologies (GEESNT) de lui fournir un avis sur l’aspect éthique et la sécurité alimentaire des produits issus d’animaux clonés. Et aujourd’hui, la Commission européenne dispose de deux avis contradictoires pour décider si l’Europe doit interdire ou autoriser la commercialisation de produits alimentaires issus d’animaux clonés (viande et lait principalement). Dans un rapport provisoire en anglais [23] soumis à consultation du public jusqu’au 25 février 2008 [24], l’EFSA affirme de son côté qu’il est « très improbable qu’il y ait une différence en termes de sécurité alimentaire entre les produits alimentaires provenant d’animaux clonés et de leur progéniture et ceux provenant d’animaux élevés de manière traditionnelle ». Le GEENST, de son côté, « ne voit pas d’arguments convaincants justifiant la production de nourriture à partir de clones et de leur progéniture [et] doute de la justification éthique du clonage des animaux à des fins alimentaires [du fait des] souffrances causées aux femelles porteuses [...] et aux animaux clonés » [25]. Aucune demande d’autorisation commerciale pour de tels produits n’a été déposée dans l’Union européenne.

Les entreprises Monsanto et Syngenta se sont retirées du programme d’Evaluation internationale des sciences et technologies agricoles en faveur du développement (IAASTD) car, à la lecture du projet de rapport final de ce programme, les deux entreprises, représentées par CropLife, se sont déclarées « préoccupés par l’orientation qui était donnée au projet et par le fait que notre contribution n’était pas convenablement prise en compte ». Suite au Sommet mondial de Johannesburg en 2002, l’IAASTD fut lancé par la Banque mondiale et les Nations unies avec pour objectif d’établir ce que pourrait être une agriculture durable. L’IAASTD a donc réuni une soixantaine de membres de la société civile, de gouvernements et d’institutions internationales pour discuter les connaissances scientifiques agricoles. « Nous nous attendions à voir des références à la phytotechnologie et au rôle potentiel qu’elle peut jouer », a déclaré Denise Dewars de CropLife [26]. Cette déception des entreprises porte notamment sur certains passages que l’on peut lire [27] - sans avoir le droit de les citer, le rapport étant provisoire - dans le résumé du rapport qui sera présenté à la séance plénière d’avril. Selon ce projet de rapport, l’évaluation des biotechnologies, dont la transgénèse, n’a pas été conduite au même rythme que leur développement et les données issues des évaluations ne sont pas unanimes quant aux avantages ou inconvénients. Les risques ou bénéfices liés à ces biotechnologies sont d’ailleurs encore à déterminer. Le rapport souligne également une hétérogénéité quant aux rendements des cultures GM, certaines donnant de meilleurs résultats que les cultures non GM, d’autres en donnant de moins bons. Concernant la propriété intellectuelle, que ce soit sur les PGM ou les transgènes, le rapport met en avant le risque de mainmise de quelques entreprises sur les ressources agricoles avec les conséquences que cela peut avoir dans les pays en voie de développement comme le freinage de la recherche publique ou la fin de la conservation des semences. Enfin, le rapport souligne les risques économiques en cas de contamination pour les agriculteurs victimes. Bob Watson, directeur du projet de création de l’IAASTD, s’est déclaré « très déçu » par ce retrait des entreprises, précisant que « s’ils peuvent prouver que nous n’avons pas été objectifs ou que le langage du rapport est partial, nous pouvons en discuter ». Pour Jan Van Aker, chargé de campagne OGM de Greenpeace International, « c’est une honte de se retirer d’une si bonne initiative, simplement parce que votre stratégie commerciale ne correspond pas à des principes scientifiques et que des experts ont exprimé une opinion plus équilibrée que la vôtre ».

Percy Schmeiser continue son combat contre Monsanto. En 2004, après avoir épuisé tous les recours judiciaires pour contester l’accusation de piraterie de Monsanto, Percy Schmeiser était condamné par la Cour suprême du Canada pour violation de droit de propriété intellectuelle, mais sans avoir à payer de dommages et intérêts. Lors d’une nouvelle contamination de ses champs, Schmeiser a décidé d’adopter une nouvelle stratégie juridique : il a demandé à Monsanto de retirer les plants de colza GM de son champ. Monsanto a accepté à condition que Percy Schmeiser signe un accord de confidentialité. Ce dernier a refusé et traîne maintenant Monsanto devant les tribunaux pour réparation de la contamination. Le procès aura lieu le 19 mars 2008, devant une cour locale du Saskatchewan. Il demande une réparation de 600$ canadien, équivalent au coût de l’élimination des plants de colza GM. 

Un article publié en 2003 par la revue British Food Journal [28] est aujourd’hui le sujet d’une forte controverse. Les résultats de l’expérience menée par l’équipe du Pr. Powell de l’université de Guelph au Canada montraient que lorsqu’ils pouvaient choisir entre un maïs Bt ou un maïs conventionnel, les consommateurs achetaient préférentiellement le maïs Bt. Les scientifiques expliquaient que « les consommateurs étaient plus préoccupés par l’utilisation d’insecticide que par le caractère transgénique d’une plante ». La polémique porte sur les conditions de l’expérience : un journaliste du Toronto Star, Stuart Laidlaw, a montré que des pancartes se trouvaient au-dessus des paniers présentés aux acheteurs. Sur le panier de maïs Bt était écrit : « Voici le résultat d’une production de maïs doux de qualité ». Sur le panier de maïs non transgénique était écrit : « Mangeriez-vous du maïs véreux ? » [29]. Suite à une longue période de controverse, d’échanges de lettres et de réponses depuis 2003, et sur la base des photographies de Stuart Laidlaw montrant les panneaux incriminés, quarante chercheurs viennent d’adresser une lettre au journal lui demandant de retirer l’article ainsi que le prix de « meilleur article de l’année » qui lui a été remis en 2004. Les signataires considèrent que l’absence d’information dans l’article quant à la présence de ces panneaux relèvent de la fraude flagrante.

Des scientifiques de l’Inra à Dijon ont étudié [30], avec des chercheurs de l’Institut technique français de la betterave industrielle, les flux de gènes de betteraves transgéniques résistantes à un herbicide sur des dispositifs surveillés en plusieurs lieux et sur plusieurs années. Leur première conclusion est que les plantes montées à graine produisent la majorité (86%) des graines résistantes aux herbicides et retrouvées dans les champs. Le flux direct de pollen de ces plantes montées à graine vers les betteraves sauvages présentes dans le même champ ainsi que dans des jachères voisines compte pour très peu (0,4%) dans la dissémination des graines résistantes, mais les descendants de ces hybrides entre les betteraves à sucre et les betteraves sauvages ont en revanche représenté une fraction non négligeable des graines résistantes (13,6%). Des graines résistantes aux herbicides issues des betteraves sauvages ont été retrouvées jusqu’à 112 mètres du plus proche donneur de pollen transgénique, et des flux de pollen de plants GM ont été enregistrés jusqu’à 277 mètres sur des betteraves mâle-stériles disposées aux alentours. En conclusion, les scientifiques considèrent que l’utilisation de variétés non sujettes à la montée à graines et la destruction de ces plantes montées à graine sont deux mesures absolument nécessaires pour minimiser les flux de gènes.