Le gouvernement grec a décidé, le 23 mars 2008, de renouveler son moratoire sur le maïs transgénique Mon810, et sur les 70 variétés qui sont dérivées de cet événement de transformation. Ce moratoire sur la vente et la culture de ces semences, décidé il y a trois ans, sera donc reconduit pour deux ans, a annoncé le ministre grec de l’Agriculture, Alexandros Kondos : “cette nouvelle décision est fondée sur les mêmes bases légales et scientifiques, mais inclut de nouvelles données scientifiques et découvertes, notamment sur la santé humaine et l’apiculture”. Le ministre précise qu’en Grèce, 27 000 apiculteurs produisent environ 16% du miel européen. Greenpeace a demandé au ministre qu’il interdise aussi les semences de coton transgénique. Plusieurs variétés de coton GM sont en effet autorisées dans l’UE pour l’alimentation animale [1].
Alors que le Parlement débattait des conditions de mise en culture des PGM, les Régions et communes françaises se mobilisaient contre les PGM.
A la veille de la Présidence française de l’Union européenne (du 1er juillet au 31 décembre 2008), la France présentera une contribution sur la question des OGM au Conseil des ministres européens de l’environnement du 5 juin prochain. Cette contribution donnera lieu à une discussion formelle. Les principaux axes de réflexions avaient été présentés par la France aux autres ministres le 3 mars dernier :
réforme de l’expertise introduisant pluridisciplinarité et transparence ;
rapprochement des critères d’évaluation des PGM avec ceux utilisés pour l’évaluation des produits phytosanitaires ;
prise en compte de l’impact agronomique des PGM ;
et définition au niveau européen de seuil d’étiquetage des semences contenant des OGM.
Ces axes de réflexions avaient été alors accueillis positivement par les autres Etats [2]
Interviewé par Libération [3], le président sénégalais, Abdoulaye Wade, a déclaré avoir « donné l’autorisation de la culture de coton GM ». Quant au maïs transgénique, le Président Wade a précisé « Je ne suis pas contre. Les Etats-Unis en mangent depuis longtemps. Or le Sénégal n’est pas le gardien de la santé du monde ».
Repris par le site internet Afrik.com [4], cette déclaration est accompagnée de quelques informations sur les OGM... où malheureusement, comme souvent, se mêlent vérités et promesses. On peut ainsi lire : « Dans le domaine agricole, les plantes génétiquement modifiées possèdent, entre autres, des propriétés de résistance à des insectes ravageurs des cultures, et peuvent s’adapter à des conditions extrêmes telles que la sécheresse, la salinité, le froid ou les attaques de parasites ». Mais, on le sait, une PGM ne résiste pas aux insectes mais les tuent en produisant elle-même un insecticide, et les plantes GM, adaptées à la sécheresse ou à la salinité, ne sont encore que des promesses. Les seules PGM aujourd’hui vendues dans le monde sont celles qui tolèrent un herbicide, ou produisent un insecticide.
Les commissaires européens ont eu une réunion déterminante le 7 mai dernier sur la question des OGM. Plusieurs points étaient à l’ordre du jour...
Le 14 mai 2008, le Conseil fédéral a prolongé le moratoire décidé en 2005, suite à la votation populaire [5].
Les Parties au Protocole de Carthagène se sont retrouvées à Bonn, du 12 au 16 mai 2008 [6]. Il s’agit de la quatrième réunion internationale (appelée MOP4) pour la mise en place du Protocole. En effet, le protocole a été signé en 2001, à Montréal, mais chaque article, chaque disposition demandaient à être précisés pour devenir applicables. L’avancée la plus importante de ces négociations a été l’acceptation, par l’ensemble des Parties au Protocole, de la nécessité de mettre en place un régime contraignant de responsabilité. Ce point était à l’ordre du jour des débats depuis plus de quatre ans, mais de nombreuses délégations refusaient un régime contraignant, lui préférant la souplesse d’un régime volontaire. A Bonn, ce sont les pays en développement, comme la Malaisie, les Philippines, la Colombie et les autres membres du « Groupe partageant le même esprit » (Like-minded Group, environ 80 Etats d’Afrique, d’Amérique latine et d’Asie), qui ont porté cette demande. Gene Campaign, une ONG indienne, regrette cependant que son pays, bien que membre de ce groupe, bien que concerné en premier lieu par les OGM, n’ait pas soutenu la mise en place d’un tel régime obligatoire.
Si le principe a été accepté, tout reste à faire. Les négociateurs se sont donc mis d’accord sur un calendrier : l’instrument légalement contraignant pour la responsabilité et la réparation en cas de dommages sera discuté en octobre 2010 lors de la prochaine réunion des Parties au protocole prévue à Nagoya (Japon). Entre temps, deux réunions intermédiaires ont aussi été planifiées, une en Malaisie et une au Mexique. Ainsi, cet accord satisfait les organisateurs de la MOP. Les ONG, à l’instar de Greenpeace, considèrent, au contraire, que ces négociations sont un échec, n’ayant pas réussi à déterminer des règles claires en cas de dommages liés aux OGM. Les ONG dénoncent aussi l’attitude du Japon, du Pérou et du Brésil qui ont empêché l’adoption de telles règles.
Du 19 au 20 mai, le secrétariat de la Convention d’Aarhus organisait à Cologne une rencontre consacrée aux OGM. Rédigée sous l’égide de l’ONU à destination des pays de la région Europe, cette convention [7] établit des règles relatives à l’information, la participation du public au processus décisionnel et à l’accès à la justice en matière d’environnement. Le but de la rencontre était l’échange de bonnes pratiques et plusieurs entités étaient représentées : des Etats de l’Union européenne (Belgique, république Tchèque, Finlande, France, Pays-Bas, Lettonie, Lituanie), la Commission européenne, la Norvège, et des Etats du Caucase (Arménie, Géorgie, Ukraine...). La rencontre, à laquelle Inf’OGM participait comme observateur, a mis en exergue les difficultés des Etats du Caucase à mettre en oeuvre des dispositifs d’information et de participation du public : bien que les législations proclament le droit à l’information sur les OGM, elles ne déclinent pas ces principes. Dans ce contexte, les Etats de l’UE faisaient figure de bons élèves en la matière... Et notamment la France, bien que sa consultation électronique ait été déclarée, par un tribunal français, incompatible avec la Convention d’Aarhus. Argument : tout le monde ne dispose pas d’un ordinateur ni d’une connexion internet [8]. La rencontre a également permis de souligner que l’amendement OGM de cette convention, adopté en 2005, n’est pas encore entré en vigueur faute de transposition par un nombre suffisant d’Etats. A ce sujet, les services des ministères nous ont indiqué que cette transposition était en cours de préparation... Cet amendement prévoit l’information et la participation du public « précoce et effective » relativement aux décisions sur la dissémination des OGM. Dans le cadre des discussions, pendant un atelier, le danois Veit Koester, membre du comité d’application de la convention d’Aarhus, a souligné que pour lui, la procédure de participation du public sur les autorisations de la Commission européenne est « très mauvaise » et cela pour les mêmes raisons que la consultation française : du début à la fin, cette procédure requiert un ordinateur.
Le projet de loi sur la responsabilité environnementale [9] est examiné en urgence par le Parlement : au Sénat du 27 au 29 mai, à l’Assemblée nationale, courant juin. La procédure d’urgence ne permet qu’une seule lecture dans chacune des deux assemblées. Déposé au Sénat il y a un an [10], ce texte n’avait pas été inscrit au calendrier du Parlement. Récemment, le gouvernement l’a ressorti des cartons, Présidence française de l’Union européenne oblige... En effet, cette loi transpose la directive relative à la prévention et la réparation des dommages environnementaux [11] et la France a déjà un an de retard dans sa transposition. Les ONG FNE, LPO et la Fondation Nicolas Hulot ont dénoncé la procédure utilisée, le manque d’ambition du texte et l’introduction de nombreux « cavaliers législatifs », c’est-à-dire de dispositions qui n’ont pas de liens directs avec la responsabilité environnementale, mais qui ont pour but de transposer d’autres directives.
Cette directive pourra s’appliquer aux dommages causés par les OGM : l’utilisation confinée et la dissémination volontaire d’OGM font partie des activités énumérées ouvrant droit à réparation. Mais les dommages qui peuvent ouvrir droit à réparation sont très précisément définis (y compris dans la directive) : le dommage doit présenter un certain seuil de gravité et pour ce qui est des OGM seule l’atteinte à une espèce protégée pourra ouvrir droit à réparation. Le caractère restrictif de ces conditions limite l’intérêt du texte dans le domaine des OGM.
La loi OGM a été votée par le Parlement les 20 et 22 mai. Mais la procédure de réglementation n’est pas terminée. En effet, l’application de la loi suppose l’adoption de plusieurs décrets sur une dizaine de notions déterminantes. Ces décrets, qui seront eux-mêmes déclinés par des arrêtés, concerneront notamment :
le Haut conseil des biotechnologies (composition, fonctionnement...) ;
la définition du « sans OGM » ;
la définition des règles de coexistence (pour les distances, le transport, la récolte) ;
le régime de responsabilité (modalités d’application qui devraient concerner également les garanties financières) ;
le Comité de surveillance biologique du territoire (composition, attributions, règles de fonctionnement) ;
les textes relatifs à la transparence sur le registre de localisation parcellaire des cultures, l’information des voisins et les informations ne pouvant rester confidentielles ;
les seuils d’étiquetage des semences.
Les ministères travaillent déjà à leur rédaction, et Inf’OGM a d’ores et déjà appris que le décret relatif au Haut conseil des biotechnologies paraîtra avant les vacances, dès que la loi sera promulguée... Le Haut conseil devra être consulté pour les autres ("sans OGM" et « règle de coexistence » notamment).
Alors que la promulgation de la nouvelle loi sur les OGM mettra fin au processus de transposition de la directive communautaire sur les OGM, le recours de la Commission contre la France, pour manquement à la transposition de cette directive, poursuit son chemin. Rappels des faits : début 2007, la Commission a demandé à la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) de sanctionner financièrement la France pour la non transposition pendant plus de cinq ans de la directive sur les OGM, non transposition constatée par deux fois par la CJCE (mais qui ne prévoyait pas de sanctions financières). Cette fois, la Commission souhaitait condamner la France à verser une somme forfaitaire de 38 millions d’euro (46 000 euro par jour de retard à compter du jour où l’arrêt de 2004 a été rendu jusqu’à sa pleine exécution, ou bien jusqu’à la décision dans l’affaire en cours), et d’une astreinte journalière de 366 744 euro par jour de retard dans l’exécution de la décision qui sera prise par la CJCE. Depuis 2005, la Commission a en effet décidé de durcir sa politique à l’égard des Etats réfractaires dans la transposition des directives et elle souhaite sanctionner les retards prolongés. L’audience a eu lieu le 12 mars 2008 et le 5 juin, l’avocat général a rendu ses conclusions [12]. L’avocat général reconnaît les manquements de la France (sur la clause de sauvegarde notamment), mais de manière assez surprenante, il ne propose pas à la Cour de condamner la France à une somme forfaitaire, car pour lui il n’y a pas de « circonstances aggravantes » et car la non-transposition n’a pas « affecté des intérêts publics ou privés de manière inacceptable ». Il propose donc à la Cour de ne condamner la France qu’à une astreinte de 235 764 euro par jour de retard qui courra à compter du jour du prononcé de la décision dans l’affaire en cours. In fine, si la CJCE suit les conclusions de l’avocat général, la condamnation à la seule astreinte risque d’exonérer la France de toute sanction financière, puisque la prochaine promulgation de la loi mettra fin à la non-transposition française. Ce sera une bonne nouvelle pour le contribuable, mais une mauvaise nouvelle pour tous ceux qui prônent une application rigoureuse et diligente de la législation environnementale ! La date du délibéré de la CJCE n’est pas encore fixée. Affaire à suivre...
Le 5 juin 2008, à Chartres, le tribunal correctionnel a décidé de ne pas suivre les conclusions du Procureur et a donc relaxé 58 Faucheurs volontaires. Ces derniers avaient fauché une parcelle de maïs transgénique le 18 août 2007 à Poinville (Eure-et-Loir). Le procureur de la République avait requis des peines de 3 mois d’emprisonnement avec sursis et 500 euro d’amende, pour tous les prévenus et il avait ajouté une amende de 300 euro pour 23 Faucheurs qui avaient refusé un prélèvement ADN. Le tribunal a relaxé les prévenus de tous les chefs d’inculpation. Le président du tribunal, Denis Roucou, a qualifié la décision de « largement motivée ». Le parquet n’a pas encore fait savoir s’il ferait appel du jugement.