n°164 - juillet /septembre 2021

Vaccination contre la Covid-19 : des zones d’ombre

Par Annick Bossu

Publié le 12/09/2021

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Les vaccins sont présentés par les entreprises, les médias et les politiques comme LA solution à la pandémie actuelle. Mais le discours scientifique les concernant est tronqué. Il nous a semblé important de retracer quelques grandes lignes relatives aux vaccins les plus utilisés, ceux à ARN et ADN [1]. De quoi sont-ils composés ? Quels impacts ont-ils sur l’individu et sur la population mondiale ? Au vu des mutations et surtout des recombinaisons du virus, que penser de la vaccination ? Quelles sont les zones d’ombre ?

Près de 250 vaccins contre la Covid sont à l’étude. Trois générations de vaccins existent : les plus anciens sont les vaccins à virus atténués (non utilisés dans le cas de la Covid car pouvant être dangereux) ou à virus inactivés ; la deuxième génération est dite à protéine « recombinante » : elle utilise en fait la protéine servant d’antigène, et dans la quasi totalité des vaccins, il s’agit de la protéine Spike de l’enveloppe du virus ; la dernière génération utilise le matériel génétique qui code pour cette protéine qui sera donc synthétisée dans les cellules humaines. Les vaccins déjà utilisés ou les plus avancés à l’heure où nous écrivons sont consignés dans le tableau ci- dessous.

Tableau des différents vaccins contre la Covid-19
Tableau des différents vaccins contre la Covid-19
Crédits : Tableau élaboré par Annick Bossu d’après Christian Vélot et Bruno Pitard

Nous traiterons essentiellement des vaccins utilisés actuellement en Europe, ceux à acides nucléiques qui ont reçu une autorisation de mise sur le marché (AMM) « conditionnelle », c’est-à-dire en attendant que « des données à long terme sur l’efficacité et la sécurité soient disponibles » [2]. Les informations relatives à certains de ces vaccins sont accessibles, elles le sont moins pour d’autres, ce qui pose un problème démocratique et éthique important.

Les produits hybrides pour vacciner

Les vaccins à ARN messager (ARNm) sont bien documentés. L’ARN messager (ARNm) a d’abord été expérimenté comme vaccin contre la grippe (1993) chez les souris puis en thérapie génique contre les cancers (1995). Depuis, de nombreuses études ont été menées utilisant l’ARNm soit pour soigner (thérapie) soit pour préparer des vaccins (prévention) mais pour l’espèce humaine dans ce dernier cas, les taux d’anticorps en réponse aux vaccins étaient insuffisants, n’atteignant pas le niveau de ceux observés chez l’animal [3].

Après l’arrivée de la Covid et de financements importants, le vaccin à ARNm a été optimisé. Il y a deux parties dans ce vaccin : la séquence de l’ARNm codant la protéine antigénique Spike et le vecteur.

L’ARNm du vaccin est synthétique. En janvier 2020, une séquence numérisée de l’ARN d’un virus SRAS-CoV-2 (31 000 nucléotides [4] a été diffusée sur Internet par le laboratoire P4 de Wuhan. À partir de ces seules données numérisées, le pdg de la start-up Moderna a assuré construire son vaccin en 42 jours [5]. On peut en effet, à partir de séquences numérisées, construire des séquences physiques d’ADN en apportant les nucléotides nécessaires, les enzymes et une source d’énergie. L’ADN choisi est celui qui code pour la protéine Spike de l’enveloppe du virus. Cette protéine permet l’entrée du virus dans les cellules de l’hôte. Cet ADN de Spike est intégré dans des plasmides bactériens (petites molécules d’ADN circulaires) et les bactéries se reproduisent en fermenteur, produisant de très grandes quantités d’ADN. L’ADN de Spike est ensuite extrait des plasmides et transcrit en ARN grâce à une enzyme [6].

La séquence d’ARNm destinée au vaccin est optimisée en remplaçant certains nucléotides naturels par des nucléotides artificiels, ce qui permet à l’ARNm lui-même de ne pas être détruit par le système immunitaire. Des codons [7]

rares sont remplacés par des codons synonymes (qui ont le même effet), ce qui permet d’augmenter la synthèse de la protéine Spike. Deux autres mutations sont introduites modifiant légèrement la forme de cette protéine pour qu’elle soit encore plus immunogène. La protéine Spike produite par le vaccin n’est donc pas « naturelle ». Certains virus à ARN possèdent une enzyme qui permet au virus de se répliquer dans la cellule de l’hôte : l’idée des futurs vaccins à ARNm est d’y ajouter la séquence codant pour cette enzyme ce qui amplifierait sa réplication.

L’ARNm est encapsulé dans un vecteur lipidique qui est une nanoparticule synthétique destinée à protéger l’ARNm du système immunitaire de la personne vaccinée. Cette nanoparticule est de composition lipidique comme la membrane cellulaire pour permettre son entrée dans les cellules. Du polyéthylène glycol (possiblement allergisant) est ajouté pour éviter que ces nanoparticules se « collent » entre elles [8].

Ainsi, les vaccins à ARN sont des produits artificiels issus de la biologie de synthèse actuelle dont on ne connaît pas les conséquences mais dont on sait qu’elle est basée sur une connaissance mécaniste du vivant.

Les vaccins à ADN sont moins bien documentés que ceux à ARN. Pour le grand public, ils ne s’appellent pas vaccins à ADN mais vaccins à vecteur viral. Les esprits critiques y verront une technique d’acceptation sociale de ces vaccins, le mot ADN faisant peur. Ces vecteurs viraux sont destinés à véhiculer l’ADN vaccinal jusque dans le noyau des cellules humaines. Ce sont des adénovirus (virus à ADN) dits « désarmés » : notamment, ils ne peuvent plus se répliquer, ils ont perdu leur virulence, mais ils continuent à infecter les cellules. L’ADN contenu dans le virus vecteur est recombiné entre une partie de l’ADN de l’adénovirus « désarmé » et celui de la protéine antigénique Spike

 [9]. L’ADN de la protéine Spike est obtenu et multiplié de la même façon que pour les vaccins à ARNm. On ajoute à cet ADN de Spike une séquence d’ADN étrangère pour booster la production de la protéine. Une autre technologie de vectorisation de l’ADN recombiné est en phase préclinique à l’Inserm de Nantes. Le vecteur viral est remplacé par un vecteur synthétique contenant un plasmide bactérien recombiné avec l’ADN codant la protéine Spike

 [10].

Face B
Face B
Crédits : Christophe Noisette, https://lairederien.net

Ces vaccins vont-ils agir sur notre propre ADN ?

Selon les instances de santé, les vaccins à ARNm ne sont pas susceptibles d’agir sur notre propre ADN. D’une part car l’ARNm n’est pas présent dans le noyau des cellules où se trouve l’ADN mais dans leur cytoplasme (partie de la cellule entre la membrane et le noyau), et d’autre part car l’ARN (molécule à un seul brin) ne peut s’intégrer dans l’ADN (molécule à 2 brins). L’ARNm est dégradé mais une partie échappe à cette dégradation par des mécanismes complexes non encore parfaitement élucidés. Une intégration dans l’ADN humain n’est pas possible sauf si l’ARN est préalablement converti en ADN (transcription inverse). Pour cela, les cellules recevant le matériel génétique vaccinal doivent disposer d’une enzyme appelée transcriptase inverse. Une telle enzyme peut être apportée par un virus appartenant à la famille des rétrovirus (comme le VIH) ou à partir de séquences d’ADN déjà présentes dans notre génome et correspondant à des éléments transposables : des rétrotransposons [11]. Des études sont en cours [12] pour étudier ces possibilités d’intégration. Même si l’AMM conditionnelle pour les vaccins de Pfizer et Moderna dit que l’ARNm qu’ils contiennent se retrouve dans beaucoup de types cellulaires dont les gamètes [13], cela est en faible quantité. Pour toutes ces raisons, en l’état des connaissances actuelles, pour l’ARNm vaccinal les possibilités de modifier le génome humain sont jugées très faibles. Concernant le virus SRAS-CoV (et non le vaccin), des études récentes montrent que son matériel génétique peut s’intégrer dans l’ADN après rétrotranscription [14].

Le cas des vaccins à ADN est problématique puisque l’ADN du vaccin intègre le noyau des cellules et pourrait se recombiner avec l’ADN de l’hôte. Cela est souvent contredit par certains chercheurs qui affirment que les cellules ayant intégré l’ADN vaccinal vont mourir. Cependant les cellules musculaires qui reçoivent l’injection ont une durée de vie très longue (15 ans). La fiche du vaccin Astra Zeneca à ADN indique pourtant : « Aucune étude de génotoxicité ou de cancérogénicité n’a été réalisée. Il n’est pas attendu que les composants du vaccin présentent un potentiel génotoxique » [15]. Autant de légèreté ne saurait convenir, d’autant plus que les fabricants de vaccins ont été exonérés de leur responsabilité morale et financière en cas d’effets secondaires. Reste donc à se poser la question de l’éventuelle modification génétique ou épigénétique de nos cellules sous l’effet de ces vaccins à ADN.

Par ailleurs, le fait que les vaccins de par le monde aient reçu une AMM provisoire signifie que les évaluations obligatoires ne sont pas terminées : la vaccination mondiale est une expérimentation à grande échelle et le fait d’étendre la vaccination sur de grandes populations exposent celles-ci à des fréquences augmentées de recombinaisons virales.

Des conséquences vaccinales à considérer

En effet, les virus se recombinent : les virus à ADN entre eux et les virus à ARN entre eux. Les coronavirus sont les champions de la recombinaison et par contre mutent peu (grâce à une enzyme de correction des erreurs efficace lors de leur réplication). Selon certains chercheurs, les « variants » sont essentiellement des virus recombinés, une faible proportion étant mutée. Il faut deux virus dans une même cellule pour qu’il y ait recombinaison : si des personnes sont infectées par le virus sans symptômes de la Covid et se font vacciner, des recombinaisons seront possibles et des variants peuvent apparaître [16] : a-t-on pris pleine mesure de ce fait, alors que la vaccination s’étend sur de grandes populations ?

Les cas de réinfections au Brésil laissent présager que l’immunité acquise lors d’une première infection serait passagère ou non adaptée à un nouveau variant. En sera-t-il de même après la vaccination ?

Des chercheurs sud-africains rapportent en janvier 2021 dans une prépublication scientifique [17] que « la vitesse et l’ampleur de l’échappement immunitaire vis-à-vis des anticorps neutralisants préexistants, observés avec le variant sud-africain 501Y.V2, soulignent le besoin urgent de pouvoir rapidement adapter les vaccins, de même que la nécessité d’identifier dans le virus des cibles moins susceptibles de muter et pouvant servir d’antigènes vaccinaux ».

Adapter les vaccins aux variants sera donc complexe. Le risque de voir les vaccins accélérer les mutations et surtout les recombinaisons virales à l’origine de nouveaux variants qui pourraient prendre le pas sur les souches anciennes devrait nous obliger à reconsidérer la pertinence de la vaccination de masse.

Les vaccins à ARN ou ADN sont des « prouesses » techniques mais nous n’avons aucun recul sur leurs impacts. Ils sont construits avec une connaissance du virus encore incomplète notamment concernant son origine [18] [19] [20]. Les interactions de ces vaccins synthétiques avec les organismes qui les reçoivent devraient être étudiées sur un temps long et à l’échelle de très grandes populations. La Covid-19 expose à des cas graves de la maladie ; il serait souhaitable de proposer toutes les mesures préventives et thérapeutiques et non pas la seule vaccination pour résoudre cette pandémie. Chaque personne pourrait alors faire un choix éclairé.

[1Pour recontextualiser la vaccination, son principe et son mode d’action ainsi que certaines notions sur les vaccins à ARN messager ou à ADN et certains points de vocabulaire, se référer à :

Annick Bossu, « Des vaccins jamais utilisés chez l’humain pour sortir de la COVID-19 ? », Inf’OGM, 10 décembre 2020 et https://criigen.org/rapport-dexpertise-sur-les-vaccins-genetiquement-modifie/

[2Voir « Le téléservice « Vaccin Covid » de l’Assurance Maladie » https://professionnels.vaccination-info-service.fr

[3« L’aventure scientifique des vaccins à ARM messager », Marc Gozlan, Le Monde, 14 décembre 2020

[4Les nucléotides sont des sous-unités de l’ADN de quatre catégories notées A, T, C, G.

[5Voir « Vaccin : comment Moderna a réussi à vendre une idée contre une pluie de milliards ? », L’Humanité, 11 Décembre 2020, Thomas Lemahieu

[6« How Pzifer Make Its Covid-19 Vaccine », The New York Times, 28 avril 2021

[7Un codon de l’ARN est une suite de trois nucléotides codant un acide aminé donné.

[10« Nanotaxi® pour les vaccins ARN et ADN », Bruno Pitard, Med Sci (Paris), 35 10 (2019) 749-752

[11« Séquences provenant d’éléments génétiques mobiles, face cachée du génome humain », Julie Medina et Hervé Perron, Med Sci (Paris). 33(2) : 151–158

[12« L’aventure scientifique des vaccins à ARM messager », article cité

[13Committee for Medicinal Products for Human Use (CHMP), Assessment report, Comirnaty, Common name : COVID-19 mRNA vaccine (nucleoside-modified) Procedure No. EMEA/H/C/005735/0000, 19 February 2021, EMA/707383/2020 Corr.(p.54)

[17« SARS-CoV-2 501Y.V2 escapes neutralization by South African COVID-19 donor plasma », Constantinos Kurt Wibmer et al., bioRxiv 2021.01.18.427166, Publié dans Nature Medicine

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