n°52 - avril 2004

“Régions sans OGM” : du moratoire européen aux moratoires régionaux ?

Par Thierry Raffin

Publié le 31/03/2004

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Depuis quelques mois est pronostiquée la fin du moratoire européen de facto sur les OGM qui tient depuis 1999. Les coups de boutoir assénés par la Commission européenne contre ce moratoire ne manquent pas : mise en valeur du renforcement de la réglementation européenne, malgré les lacunes sur la question de la responsabilité en cas de dommages, impossibilité de résoudre juridiquement les problèmes de la coexistence ; le recours devant l’OMC par les Etats-Unis contre ce qui leur apparaît une politique protectionniste (à l’égard des sacro-saintes règles du libre échange). Même si les forces de résistance à l’invasion des OGM tentent de faire encore durer ce moratoire, il est possible que la Commission européenne finisse par emporter la décision faute de positionnement clair et cohérent des Etats membres.

Mais ce moratoire, même s’il s’achève “juridiquement” dans les mois à venir, aura eu le temps de distiller ses effets socio-économiques. On peut penser à la lumière de l’actualité de ces dernières semaines qu’il pourrait en fait se disséminer plutôt que disparaître. Même si la Commission a réaffirmé son opposition à l’instauration de “zones sans OGM” (cas de l’Autriche qui souhaitait déclarer la Haute- Autriche, zone sans culture transgénique, Inf’OGM n°45), cela n’a eu pour effet que de susciter un appel pour le droit des régions européennes à se déclarer sans OGM. Un réseau des régions européennes a commencé à se constituer (Inf’OGM n°47). En France, le basculement à gauche de la majorité des Régions, et l’initiative médiatique de Ségolène Royal encourageant les maires à prendre des arrêtés d’interdiction de cultures OGM (Cf. page 2), pourraient attiser ce mouvement de dissémination du moratoire en Europe. C’est aussi ce que reconnaît le rapport de la Commission Agriculture du Parlement européen sur la coexistence : “un refus volontaire ou régionalement limité de cultiver des OGM […] peut constituer la mesure la plus efficace et la plus rentable” pour la coexistence des cultures (Inf’OGM n°48).

La première victoire juridique d’un arrêté d’interdiction de culture transgénique pris par le maire de Mouchan (Gers) illustre que la démarche commence à être entendue par le tribunal administratif en France (Inf’OGM n°50). Ce mouvement d’acceptabilité des “zones sans OGM” pourrait toucher d’autres pays ou régions européennes. Avec des “régions sans OGM”, une autre Europe pourrait être dessinée, source de nouvelles pratiques politiques et sociales régénérant la démocratie à l’articulation du local et du territoire.

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