n°11 - juillet / août 2000

Partie Législation

Par Béatrice BRASSART

Publié le 01/07/2000

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Brésil : Le 8 août, le tribunal régional fédéral de la 1ère région (district fédéral) a de nouveau réfusé d’autoriser la culture à but commercial du soja RoundUp Ready de Monsanto.

Communiqué de presse du TRF, 8 août 2000

Suite à une plainte conjointe de Greenpeace et l’Institut Brésilien pour la Défense des Consommateurs (IDEC), la 6ème juridiction de la Cour Fédérale du Brésil a interdit la culture et la commercialisation d’OGM sans que des études préalables d’impact environnemental soient réalisées. Le gouvernement fédéral a fait appel devant la Cour Fédérale Régionale.

Gazeta Mercantil, 29 juin 2000

Par ailleurs, l’IDEC a fait analyser 41 aliments par les laboratoires suisse Interlabor Belp AG et autrichien Umwelbundesamt. 10 de ces produits – sauce au bacon Bac’os, crème de maïs vert de Knorr, aliments pour enfants Prosobee, … – contenaient du soja transgénique RoundUp Ready qui n’est autorisé ni à la culture, ni à la commercialisation.

AgraPress, 2768, 3 juillet 2000, Greenpeace.

En juillet, le gouvernement brésilien a autorisé l’importation de maïs transgénique d’Argentine, destiné à l’alimentation strictement animale. Mais, le 28 juillet, il a par contre refusé un navire argentin contenant 54 tonnes de maïs transgénique. Ce maïs devait être transformé au Brésil et servir à la production de pochoclo, et donc à l’alimentation humaine.

Gazeta mercantil, 10 juillet 2000 et …, le 2 août 2000

Le Centre de contrôle sanitaire de Sao Paulo a décidé, le 2 août, de retirer de la vente dans son Etat neuf aliments contenant des OGM : chips de Gourmand, crème de maïs vert de Knorr, crème au soja de Nestlé, …

www.uneterre.net/revuepresse.htm

Grande Bretagne : Le ministre de l’environnement a déclaré à la chambre des Communes qu’il n’y a aucune manière pour éviter qu’un champ cultivé avec des OGM ne pollue un champ cultivé de manière traditionnelle : afin de minimiser ce risque, il a demandé à ce qu’on réévalue les distances de séparation entre les champs OGM et non OGM. Pour les Amis de la Terre, il est clair qu’un tel débat est « une perte de temps ».

The Guardian, 14 juin 2000

Le gouvernement a annoncé le 5 juin la création de la « Agriculture and Environment Biotechnology Commission » (AEBC). Son rôle est de conseiller le gouvernement sur les aspects scientifiques, éthiques et environnementaux des OGM, en parallèle avec la « Food Standards Agency » qui s’attache à la sécurité des aliments transgéniques, et de la « Human Genetics Commission » chargée de l’impact des manipulations génétiques sur l’homme.

The Guardian , 21 juin 2000

Italie : Le ministre de l’agriculture, A.P. Scanio, a déclaré que son pays devrait développer agriculture sans OGM, seul moyen pour la paysannerie italienne de se maintenir sur le marché mondial. Ainsi, il a été décidé de suspendre la commercialisation de 4 variétés de maïs transgénique (dont les variétés Bt11 et Mon810).

Reuters, 18 juillet et 7 août 2000

France : Au sein de l’AFNOR, une commission de normalisation a été créée afin d’élaborer la norme française relative à la méthode d’analyse de détection des OGM dans les aliments. Le document devrait être publié fin septembre.

Japon : Le gouvernement a autorisé 3 OGM : un riz tolérant au glufosinate créé par Aventis, un coton Bt de Monsanto Japon uniquement pour la culture en serre et un micro-organisme : le Bacillus subtilis utilisé pour la production industrielle par Nihon Chemicla d’une enzyme appellée Mannose isomerase .

MAFF n°370, 4 août 2000

Brevet : Le gouvernement indien a décidé de contester juridiquement un brevet obtenu par une société texane, RiceTec, sur le riz basmati, croisé avec un riz américain au grain long. Le gouvernement pour plaider sa cause a dû réaliser un dossier de 50.000 pages de preuves scientifiques. Il a aussi déposé une plainte contre l’utilisation abusive de l’appelation « riz basmati ». Seul le riz cultivé dans la région basmati peut en avoir le nom. Il s’agit pour ce gouvernement d’une appellation d’origine contrôlé. ActionAid a lancé une campagne pour soutenir ce gouvernement.

The Observer, 25 juin 2000

L’OCDE a publié deux rapports, remis au G8 en juillet, qui réaffirment que les OGM approuvés sont aussi sains que les aliments traditionnels. Elle estime que l’acceptation des OGM par l’opinion publique dépendra surtout de la capacité des gouvernements à expliquer et à communiquer.

Un autre rapport de l’OCDE (mai 2000) reconnaît « qu’il existe peu d’études économiques sur l’évaluation des coûts et avantages associés aux risques et à la réglementation en matière de sécurité des aliments ». Ce rapport suit celui issu de la conférence d’Edimbourg (fév-mars 2000) qui faisait état d’un certain nombre de doute à propos de l’innocuité des OGM et de l’équivalence substantielle. On peut lire en page 12 : « …le doute qui plane actuellement sur les possibilités de transfert d’allergènes inconnus lors d’une transformation génetique montre, s’il en était besoin, qu’il est nécessaire de rester attentif et d’affiner en permanence les protocoles ».

Moratoire

Le gouvernement allemand a appelé l’industrie génétique à s’engager dans un moratoire sur la culture des OGM à des fins commerciales, jusqu’en 2003, pour permettre de réaliser des études d’impact environnemental. La ministre française de l’environnement, Dominique Voynet, s’est également prononcée en faveur d’un tel moratoire européen. Elle estime que la nouvelle version de la directive 90/220 n’est pas assez contraignante, notamment au niveau de la responsabilité des firmes de biotechnologie. L’UE n’a pas autorisé de nouvel OGM depuis octobre 1998. La ministre compte profiter de la présidence française de l’Union pour faire avancer ses positions. L’Autriche, le Danemark, l’Italie, la Grèce, le Luxembourg et peut-être la Belgique seraient prêts à soutenir cette le moratoire.

Reuters, 22 juin 2000

La Tasmanie est le premier Etat australien à mettre en place un moratoire (de 12 mois) sur les essais d’OGM en champs et cela malgré un avertissement (fin mars) du gouvernement fédéral refusant à cet Etat le droit de ne pas autoriser les OGM sur son territoire. Le gouvernement de Tasmanie a donc pris l’option de ne pas tenir compte de cet avertissement. La Tasmanie avait déjà utilisé les lois de quarantaine pour refuser des élevages de saumons transgéniques.

Food Chemical News Daily , 26 juillet 2000, The Age.

L’Arabie Saoudite a décidé d’interdire l’importation d’OGM. En mars, elle avait déjà interdit l’importation d’huile de soja thaïllandaise en apprenant qu’elle contenait des OGM.

Reuters , 3 août 2000

Pollutions et législations sur les semences

Maïs : Le 28 février 2000, la Direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes (DGCCRF) détectait que des lots de semences de maïs importés des USA étaient contaminés par des OGM. Le 3 mars, ces résultats furent contestés par Golden Harvest, le semencier américano-hollandais incriminé. De nouvelles analyses de la DGCCRF ont alors été entreprises aux mois d’avril et de mai, confirmant la contamination. Mais ce n’est que suite à un article paru dans Sud Ouest que la DGCCRF a confirmé que 4800 hectares avaient été ensemencés avec du maïs contaminé (entre 0,1 et 0,55%) par des OGM dans 23 départements français du sud-ouest – le Lot-et-Garonne étant le plus touché avec 2 571 hectares. Les OGM détectés se présentaient sous la forme des évènements de transformation Bt176, Mon 810 et T25 (autorisés en France), Bt11 (autorisé aux USA, mais pas à la culture en Europe). Depuis déjà deux ans, des taux de contamination de l’ordre de 1 à 3 pour mille avaient été détectés sur des bateaux à Bordeaux. Contrairement au colza vendu par Advanta (Cf Inf’OGM n°10), le gouvernement n’a pas demandé la destruction des hectares contaminés. Plusieurs syndicats agricoles en avait pourtant demander l’arrachage et Greenpeace a décidé de porter plainte contre Golden-Harvest afin d’éviter de créer un précédent pour l’agriculture française.

Soja : 46 hectares de soja contaminés par du soja transgénique (entre 0,8 et 1,5%) ont été découverts dans le sud est de la France. Le gouvernement a ordonné la destruction de ces parcelles car la culture de soja transgénique est interdite en Europe. Les agriculteurs seront indemnisés. Pendant le week-end du 26-27 août, des champs contaminés ont été fauchés.

AFP, 5 août 2000,

La Tribune, 7 août 2000

Suisse : Une ordonnance du Conseil fédéral, entrée en vigueur le 1er juillet, détermine un seuil de 0,5% pour la contamination des semences traditionnelles par des OGM. La tolérance de 0,5% est limitée aux OGM dont la compatibilité avec l’environnement a été testée dans un pays où « les conditions environnementales et les exigences légales sont comparables à celles de la Suisse », précise le Département de l’économie. Dans une déclaration commune publiée par l’Union suisse des paysans, écologistes, professionels agricoles et associations de consommateurs ont réagi favorablement : plus de deux tiers des semences utilisées en Suisse sont en effet importées. Par contre, Greenpeace s’est opposé à ce seuil qui légitime la contamination génétique de notre environnement et de l’agriculture suisse actuellement exempte de plantes transgéniques.

AP & Reuters, 5 juin 2000

Europe : Le 19 juin, à Bruxelles, s’est tenue une réunion du Comité permanent pour les semences (comité de gestion qui dépend de la Direction Générale de l’Agriculture) afin de débattre des mesures envisageables au niveau européen pour éviter de nouvelles contaminations par des OGM. La Commission a suggéré un taux de contamination tolérable inférieur à 0,5% pour les OGM autorisés dans l’UE et de 0% pour les variétés non autorisées. A ce comité, le nouveau ministre italien de l’agriculture a plaidé pour la mise en place d’un moratoire sur l’utilisation des OGM dans l’agriculture en attendant la nouvelle directive sur les semences transgéniques préparée par la Commission. Les propositions définitives de ce comité pour les semences seront élaborées à l’automne 2000. Pour Greenpeace, « les semences ne sont pas comparables aux produits alimentaires. Ce sont des organismes vivants, qui se reproduisent et se multiplient. Accepter un seuil de contamination des semences conventionnelles par des OGM, c’est accepter la contamination progressive de toute l’agriculture et de notre environnement ».

Communication de la Commission, 13 juillet 2000

Brevetabilité du vivant remise en cause

L’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a adopté une recommandation qui invite l’Union européenne à mettre en place un moratoire sur la directive 98/44 afin de pouvoir la renégocier. L’un de ses membres, le professeur Mattéi a souligné l’ambiguïté et les contradictions d’un texte dont l’élaboration avait suscité dix ans de débats au sein des institutions européennes et que les Verts avaient été pratiquement les seuls à contester lors du vote final du parlement européen, le 12 mai 1998. Le Belge Philippe Monfils, l’un des rares à défendre la directive au sein du Conseil, au nom de la sécurité juridique dont aurait besoin la recherche scientifique, a déclaré que « retarder son entrée en vigueur serait une hérésie car alors la recherche se ferait ailleurs, les Américains auraient la haute main sur la santé des Européens ». Greenpeace, dans un communiqué, salue cette initiative et invite aussi les membres de l’UE a voté un moratoire sur le brevetage des gènes.

Conseil de l’Europe, 29 Juin 2000 : compte-rendu de séance et avis.

France : Le 19 juin, le groupe Science – Société de l’Académie des Sciences, l’Académie des Sciences morales et politiques et l’Académie nationale de Médecine ont émis un avis sur à la directive 98/44 pour en montrer l’inutilité et l’aspect contradictoire avec la loi de bioéthique de 1994. En méconnaissant la différence entre découverte et innovation ainsi qu’entre brevet de produit et brevet de procédé, cette directive permet « d’obtenir de fait une protection industrielle de toute séquence de gène, totale ou partielle ». Le texte précise que la généralisation de ce système « sera facteur d’augmentation du coût des médicaments qui pourraient être dérivés de l’utilisation de la connaissance du génome humain ». C’est pourquoi, les Académies souhaitent que l’on profite de la révision de la convention de Munich du 5 octobre 1973, qui régit la délivrance des brevets européens, afin d’y inclure « un texte régissant la brevetabilité des inventions biotechnologiques ». Ce texte devra donc réaffirmer « qu’une invention ne peut avoir pour objet ce qui préexiste dans le monde naturel […] et l’appropriation d’éléments du corps humain étant plus inadmissible encore que celle de tout autre élément ».

Avant de prendre la présidence de l’Union européenne, le président de la République française et le gouvernement ont, conjointement, mis en garde la Commission contre les risques qu’il y aurait à transposer en l’état la directive 98/44. Jacques Chirac a écrit au président de la Commission européenne M. Prodi, en insistant sur trois principes : la non-commercialisation du corps humain, le libre accès à la connaissance du génome et le partage des connaissances. De son côté, le gouvernement a précisé à la Commission que « le souci des autorités françaises est d’effectuer cette transposition dans le respect des principes éthiques d’intégrité et de non-patrimonialité du corps humain qui concourent à garantir le respect du principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité humaine ».

Le Monde, 24 juin 2000 et 2 juillet 2000

Gadamer, philosophe, a déclaré publiquement qu’il fallait être très vigilant par rapport à la directive 98/44.

Afp, 2 juillet 2000

G8 et bioéthique

A Bordeaux, fin juin, la réunion des Ministres de la recherche du G8, à laquelle s’étaient joints le Brésil, la Chine, le Mexique et l’Inde, consacrée à la bioéthique, s’est achevée sans déclaration commune. Cependant, considérant que le génome humain « est patrimoine commun de l’humanité », selon les termes de la Déclaration de l’UNESCO, une sorte de consensus général s’est dégagé contre la prise directe de brevets sur les gènes. Ainsi, les données brutes issues du séquençage doivent rester dans le domaine public. Ne seront considérées comme brevetables que les véritables innovations établies à partir de la structure des gènes. Ceci laisse une marge à l’interprétation. Le Ministre français de la recherche, Roger-Gérard Schwartzenberg, a déclaré : « Il faudra donc parvenir à mieux préciser les critères d’inventivité qui permettront la prise de brevet ». De nombreuses divergences existent entre les offices des brevets qui tiennent à la définition de « l’identification de la fonction », d’autant qu’un gène peut avoir plusieurs fonctions. Quant à la question de la légitimité des recherches sur l’embryon humain, les divergences légales au sein de la Communauté international sont importantes. En effet, elles sont strictement interdites en France alors qu’elles sont autorisées, sous plusieurs conditions, aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne, en Espagne, en Suède ou au Danemark.

Le Monde, 26 juin 2000

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