n°51 - mars 2004Tribune

Le verre à moitié vide ou à moitié plein de la réglementation européenne sur l’étiquetage et la traçabilité

Par Arnaud Apoteker

Publié le 01/03/2004

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La nouvelle réglementation européenne sur l’étiquetage et la traçabilité des OGM entre en vigueur le 18 avril. Elle est censée permettre l’information des consommateurs sur l’utilisation d’OGM dans l’alimentation et sert de prétexte à la Commission européenne pour considérer que le moratoire sur les nouvelles autorisations d’OGM n’a plus lieu d’être, ignorant par là-même les nombreuses questions encore en suspens autour de la coexistence, de la contamination des semences ou de la responsabilité.

D’un côté, ces nouveaux règlements européens renforcent les conditions de l’étiquetage : les produits, ingrédients ou additifs issus d’OGM devront maintenant être étiquetés, même si l’OGM n’est plus détectable dans le produit final et c’est la traçabilité qui permettra cet étiquetage. Concrètement, cela signifie que de nombreux produits étiquetés “issus d’OGM” pourraient apparaître dans les magasins dès le 19 avril, comme les huiles de soja ou de colza et les ingrédients ou additifs issus de soja ou de maïs tels que le sorbitol (E 420), le mannitol (E 421) ou l’isomalt (E 953), etc. Certes nous n’allons pas à partir d’avril consommer plus d’OGM, mais ceux qui étaient jusqu’à présent cachés (et qui représentent des quantités très faibles), vont être dévoilés par cette réglementation. Bien entendu, cela permettra aux consommateurs de les refuser et de montrer leur détermination à empêcher l’avènement d’un monde transgénique. Mais ces produits sont en réalité des sous-produits de la fabrication de tourteaux pour l’alimentation animale. L’autre avancée importante de la nouvelle réglementation est justement l’étiquetage de l’alimentation animale, le débouché actuel majeur des OGM. Ainsi, les éleveurs pourront maintenant nourrir leurs animaux sans OGM et ne pourront plus se réfugier derrière l’argument de l’ignorance de la nature OGM des rations qu’ils achètent. Mais on bute très vite sur la grande lacune de la réglementation : la traçabilité s’arrête là et les animaux nourris aux OGM et les produits issus de ces animaux (lait, beurre, œufs, viande, etc.) échappent à l’étiquetage. Par cet artifice, les décideurs aident les entreprises de biotechnologie à écouler leurs OGM en masse et à l’insu du public. Cette réglementation est donc insuffisante pour permettre un réel choix du consommateur, qui devra, comme en 1998, lorsqu’il n’y avait aucun étiquetage, regarder les listes de produits avec et sans OGM de Greenpeace afin de faire pression sur les industriels. Il est donc urgent que le législateur complète la réglementation, soit en obligeant l’étiquetage pour les animaux et produits animaux, soit en permettant un étiquetage “positif” pour les animaux et produits d’animaux nourris sans OGM. Un autre chantier à ouvrir afin de nous permettre de vivre encore sans OGM en Europe.

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