n°10 - juin 2000

EUROPE – Directive 98/44 = obtention de brevets contestée.

Par Eric MEUNIER

Publié le 31/05/2000

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La directive 98/44 qui réglemente l’obtention de brevets

liés aux inventions biotechnologiques, comporte en elle une

contradiction qui pourrait rendre légal le brevetage du

vivant. Les Etats-membres de l’Union Européenne ont en

principe jusqu’au 30 juillet 2000 pour transposer la

directive 98/44 dans leurs législations nationales. L’Italie,

les Pays-Bas et la Norvège ont déposé un recours devant

la cour européenne de justice contre cette directive.

Les 15 et 16 avril, le Conseil national interrégional (CNIR)

des Verts français a adopté une motion d’urgence sur le

brevetage, comme “négation du patrimoine de l’Humanité ».

Le CNIR demande aux députés ver ts de « dénoncer de

manière claire tout projet de transposition de cette directive

européenne dans le droit national, qui ne pourrait être

qu’une nouvelle compromission avec le capitalisme mondial

et un déni des principes mêmes qui fondent l’écologie

politique ».(1)

Le 4 mai, la Commission de la Science et de la Technologie

de l’Assemblée parlementaire française a décidé de

soutenir l’appel contre la brevetabilité des gènes humains,

lancé le 6 avril dernier par deux médecins, membres de

l’Assemblée du Conseil de l’Europe, Jean-François Mattei et

Wolfgang Wodarg

1

. Elle organisera également une réunion

extraordinaire de 4 Commissions (science & technologie,

questions juridiques & droits de l’homme, questions

sociales, santé & famille et agriculture) lors de sa

prochaine session qui aura lieu fin juin afin de demander

un moratoire immédiat sur l’application de cette directive et

la suspension de toute attribution de brevets sur le

génome humain. Cette action pourrait se concrétiser par

un amendement au rapport de M. Mattei sur les

biotechnologies, inscrit à l’ordre du jour de cette session.

Jean Pierre Berlan, membre du Conseil Scientifique d’ATTAC

et chercheur à l’INRA, signataire de l’Appel contre la

brevetabilité lancé à l’initiative du Sel de Paris2,

reconnaiît que l’appel de Mattei-Wolfang a “la vertu d’exister et de

troubler le train-train gouvernemental ». Mais il dénonce

« l’absurdité de la notion de gènes humains. Il estime que

cette notion est « typique de la fallace réductionniste du tout

génétique”. Pour lui, la seule raison valable de s’opposer à

la brevetabilité n’est ni éthique, ni humaniste, elle est

politique « parce que tout privilège est intolérable et

s’exerce à l’encontre de l’humanité, parce qu’il faut arrêter

la violence des marchés contre nos droits collectifs, parce

que tout simplement, le brevet du vivant confisque un

espace de liberté”.(2)

Mme Guigou, ministre française de la justice, a déclaré que

cette directive était incompatible avec les lois bio-éthiques

de 1994, le code de la propriété industrielle et avec le code

civil qui prohibe la commercialisation du corps humain.(3)

Le Comité consultatif national d’éthique a rendu, le 13 juin,

un avis qui s’oppose à la transposition de cette directive.

Au nom du “ libre accès à la connaissance (…), bien

commun de l’humanité“, les sages recommandent une

réécriture du texte.

L’association France Biotech, qui regroupe la majorité des

entreprises de biotechnologie, a manifesté sa

« consternation et son profond désaccord ». Pour elle,  » un

moratoire sur la brevetabilité des gènes en France aurait

pour effet de mettre le pays au ban des grandes nations

dans le domaine de la recherche médicale ».(4)

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