n°112 - septembre / octobre 2011

Consommer sans OGM : des régions se mobilisent pour informer les citoyens

Par Pauline VERRIERE

Publié le 10/10/2011

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Si le Code de l’environnement affirme « la liberté de consommer et de produire avec ou sans OGM […] » [1], les consommateurs sont bien en peine lorsqu’ils veulent mettre en pratique cette liberté. Car en l’état actuel de la législation, l’information à destination des consommateurs est plus que parcellaire. Pour pallier ces lacunes, différentes initiatives fleurissent. Certaines régions, qui font de la promotion d’une agriculture de qualité et de proximité un des axes importants de leur politique, ont décidé de mettre en lien ces consommateurs avec des producteurs qui ont fait le choix de ne pas utiliser d’OGM. 

Dès lors qu’un produit contient volontairement des OGM, cela doit être obligatoirement spécifié sur l’emballage. Lorsque cela est « involontaire et techniquement inévitable », une présence de 0,9% (par ingrédient) est admise, seuil en dessous duquel l’étiquetage n’est pas obligatoire. C’est la réglementation européenne qui précise ces règles d’étiquetage.

Étiquetage : une réglementation incomplète

Cette obligation d’étiquetage omet cependant les produits issus d’animaux nourris aux OGM. Le lait, les œufs et la viande ne sont pas soumis à l’étiquetage, quand bien même l’animal dont ils sont issus aurait été nourri toute sa vie avec des plantes génétiquement modifiées (PGM), ou des produits (farine, tourteaux…) issus de celles-ci. Et c’est bien là que le bât blesse : l’Europe en carence de protéines végétales, nécessaires pour nourrir le bétail, importe massivement du soja notamment d’Amérique du Sud, lequel est majoritairement génétiquement modifié. L’absence de réglementation sur ce point ouvre une voie royale aux PGM, au mépris de la liberté des consommateurs qui souhaiteraient pouvoir faire le choix de consommer sans OGM. 

Greenpeace, depuis 1998, répertorie dans un guide [2] d’une part les marques de la grande distribution qui ne contiennent pas d’OGM (marquées en vert) ; d’autre part, celles dont le producteur, bien qu’ayant engagé une démarche en ce sens, ne peut encore certifier sa production sans OGM (en orange) ; et enfin, celles dont le producteur n’a pas engagé de démarche ou n’a pas souhaité communiquer de données à Greenpeace (en rouge). L’association a également édité en 2010 un guide similaire, propre à la région Alsace [3].

Des initiatives pour une meilleure information


Autre démarche intéressante : celle initiée par certains conseils régionaux. Forts d’une politique en matière d’agriculture durable et de leur prise de position sur la question des OGM (vœu, délibération et adhésion à la charte de Florence [4]]…), les conseils régionaux de Bretagne, Normandie et Pays de la Loire ont décidé, à l’aide du réseau Cohérence, de mettre en lien des consommateurs désireux d’une meilleure information, avec des producteurs régionaux qui ont fait le choix d’exclure les OGM de leur production. Ces régions ont donc financé des guides « Consommer sans OGM », disponibles sur Internet. Parmi tous les producteurs recensés, il s’agit principalement de producteurs biologiques ou de label de qualité dont le cahier des charges exclut les OGM. Les contrôles sont donc assurés par un organisme certificateur tiers.

La Normandie a choisi également de répertorier les producteurs qui participent à l’opération des Bons repas de l’Agriculture Durable, opération grâce à laquelle est réalisé l’approvisionnement des cantines des collèges et lycées en aliments locaux et de qualité. L’association Défis Ruraux, qui a mis en place cette opération, assure le contrôle des producteurs, dans le respect du cahier des charges qu’elle a mis au point. Ce guide accepte également de faire figurer les agriculteurs individuels qui s’engagent à fournir la preuve de la non utilisation d’OGM sur leur exploitation. Dans le cadre d’un projet plus global, la Normandie a également souhaité accompagner, pas à pas, les agriculteurs dans leur démarche vers le sans OGM. Elle leur propose des alternatives au soja, lequel est difficilement traçable, avec d’autres apports en protéines végétales, selon le type d’élevage. Ces alternatives permettent non seulement à l’agriculteur d’être indépendant face aux OGM mais plus généralement, d’être autosuffisant sur son exploitation. Le site normand répertorie également des témoignages d’agriculteurs qui détaillent notamment le type de ration donnée à leurs élevages.

Le guide de Bretagne, proposé à la fois en français et en breton, est également accompagné d’un visuel que les producteurs référencés peuvent apposer sur leurs produits, permettant d’être immédiatement identifiables par le consommateur.

Enfin le système est participatif, puisque tout consommateur qui découvre un produit local sans OGM peut le soumettre en vue de son inscription dans le guide.

L’objectif principal de ces guides n’est pas tant de donner une notoriété supplémentaire à des produits souvent déjà labellisés que surtout d’interpeler les consommateurs sur la question des OGM, l’absence d’étiquetage et de les inciter à se saisir de cette question. Sur ce point, le Secrétaire général du Réseau cohérence, Jean-Yves Griot, se dit satisfait par ces guides qui remplissent leur mission d’information auprès des consommateurs.

D’autres guides de ce genre devraient voir le jour : la région Centre, à l’initiative de la Confédération paysanne, a prévu de publier le sien à la rentrée 2011, et la région PACA a lancé des discussions à ce propos. Enfin, d’autres régions ou départements, comme le Gers, afin de mettre en valeur leur agriculture de qualité, ont mis en place un annuaire des agriculteurs bio. Autre moyen de trouver des produits sans OGM : l’agence Bio liste l’ensemble des agriculteurs bio français dans un annuaire.

Ces initiatives permettent de répondre au besoin des consommateurs qui souhaitent une meilleure information, dans l’attente d’une clarification par l’État français. En effet, depuis la loi de 2008 sur les OGM, un décret définissant le « sans OGM » est attendu. Il devrait enfin voir le jour d’ici la fin de l’année.

[1Article L. 531-2-1 du Code de l’environnement

[2 rubrique 778 

[3cf. note 2

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