Actualités

Canada – Le Parlement rejette le projet de loi sur l’étiquetage obligatoire des OGM

Par Marie Cheruy, Charlotte KRINKE

Publié le 18/05/2017

Partager

Le 14 juin 2016, un nouveau projet de loi [1] était déposé au Parlement afin de rendre obligatoire un étiquetage des OGM et des produits en contenant. Lors d’un vote qui a eu lieu le 17 mai, le Parlement a rejeté ce projet. Les consommateurs canadiens attendront donc encore l’étiquetage des OGM, dans le cinquième pays producteur mondial de plantes génétiquement modifiées (PGM), et premier pays à avoir autorisé la mise sur le marché d’un animal génétiquement modifié – le saumon d’AquAdvantage.

Le 14 juin 2016, Pierre-Luc Dusseault, député du Nouveau Parti Démocrate (NPD), déposait à la Chambre des communes un projet de loi d’initiative parlementaire visant à rendre obligatoire l’étiquetage des OGM au Canada. Selon lui, le NPD « milite depuis plusieurs années sur la mise en application d’une loi rendant obligatoire l’étiquetage des aliments GM. Le gouvernement libéral doit permettre aux Canadiens d’obtenir le plus d’information possible lorsqu’il est question d’aliments GM » [2].

Le projet de loi prévoyait d’insérer un nouvel article dans la Loi sur les aliments et les drogues [3] à la suite des dispositions concernant les étiquetages et les emballages non réglementaires. Si le texte avait été adopté, il « [aurait été] interdit de vendre tout aliment génétiquement modifié, à moins que son étiquette ne contienne les renseignements prévus par règlement ». Le projet de loi prévoyait également que le gouverneur en conseil (le représentant de la Reine au Canada) puisse, sur recommandation du Gouvernement, « par règlement, prendre les mesures nécessaires à l’application de la présente loi et, notamment,

b. 1) définir l’expression « génétiquement modifié » ;

b. 2) régir, afin d’empêcher que l’acheteur ou le consommateur d’un aliment soit trompé sur sa composition, l’étiquetage des aliments génétiquement modifiés
 ».

Sur ce point, le projet de loi reconnaissait que l’expertise scientifique sur cette question repose sur Santé Canada [4]. Il serait revenu à cette dernière de définir ce qu’est un aliment génétiquement modifié et de déterminer le niveau auquel l’étiquetage serait demandé.

Enfin, le projet de loi donnait aussi un pouvoir réglementaire au gouvernement pour définir les modalités d’étiquetage, l’endroit où l’étiquette devait être apposée, la grandeur de l’étiquette et la phrase qui devait y être inscrite.

Un échec programmé ?

Ce projet de rendre obligatoire l’étiquetage des OGM n’était pas le premier déposé au Canada. Les premières tentatives datent de la période 1999-2001. À cette époque, le projet de loi du député libéral Charles Caccia avait finalement été rejeté après avoir frôlé l’adoption. Ce même député a re-déposé une proposition en 2002. En 2008, un député du Bloc québécois relançait le sujet, sans succès. Et en 2013, un député du NPD présentait une motion en faveur de l’étiquetage obligatoire, toujours en vain.

Thibault Rehn, de l’association québécoise Vigilance OGM, estimait que, bien que Pierre-Luc Dusseault avait la chance de pouvoir présenter son projet de loi (les projets sont tirés au sort pour établir un ordre de passage durant la législature en cours), il y avait peu de chance que ce projet devienne loi. En effet, un projet de loi doit passer par de nombreuses étapes, que cela soit à travers la Chambre des communes ou le Sénat, où le NPD n’a pas beaucoup d’appuis.

Une première étape avait déjà été franchie avec la première lecture à la Chambre des communes le 10 mars. Mais le projet de loi n’a pas résisté à l’étape du vote à la Chambre des communes lors de la deuxième lecture, qui a eu lieu le 17 mai. Le projet de loi a en effet été rejeté à 216 voix contre 61.

Le député M. Dusseault pensait pourtant que le contexte était favorable à l’adoption de son projet de loi. En effet, le 15 décembre 2016, le Premier ministre libéral, Justin Trudeau, avait affirmé à propos de l’étiquetage obligatoire des aliments génétiquement modifiés qu’il y était ouvert et qu’il était en train de travailler sur la question. Pour le député M. Dusseault, il s’agissait donc d’une occasion unique « pour [le Premier ministre], pour les députés du gouvernement, de même que pour les députés de l’opposition, d’aller de l’avant et de passer de la parole aux actes » [5].

Malgré le rejet du projet de loi par les députés le 17 mai, les sondages [6] montrent depuis plus de vingt ans que les canadiens sont favorables à l’étiquetage des OGM dans leur alimentation.

Une norme volontaire d’étiquetage existe déjà

La réglementation canadienne [7] permet actuellement « l’étiquetage volontaire de tous les aliments, avec ou sans OGM, à condition que l’information fournie sur l’étiquette soit véridique, non trompeuse, claire et factuelle ». La Norme nationale du Canada sur l’étiquetage volontaire et la publicité [8] visant les aliments issus ou non du génie génétique, adoptée en 2004, a pour vocation d’encadrer et d’uniformiser l’information apposée volontairement sur les étiquettes.

Selon Thibault Rehn, interrogé en juillet 2016, aucun produit volontairement étiqueté comme contenant des OGM n’est en circulation au Canada, mais cela pourrait changer avec l’étiquetage obligatoire au Vermont, état étasunien voisin, dans la mesure où celui-ci est maintenu.

Non-GMO Project


Le Non-GMO Project [9] est une organisation nord-américaine à but non lucratif qui propose une certification et une labellisation des aliments et produits sans OGM. Environ 35 000 produits sans OGM de plus de 2 500 marques, représentant 16 milliards de dollars de ventes annuelles, sont labellisés. Son objectif est de fournir aux consommateurs l’information leur permettant de faire le choix ou non de consommer des OGM.

Les contrôles sont effectués en interne et semblent, selon Thibault Rehn, de l’association québécoise Vigilance OGM, assez rigoureux. L’organisation ne se contente pas de contrôler les semences mais vérifie également les cultures et les produits ce qui implique pour les marques utilisant le label, des efforts pour éviter les contaminations croisées. Cependant, il est possible d’utiliser le label pour des produits n’ayant pas d’équivalent GM.

[3PROJET DE LOI C-291, Loi modifiant la Loi sur les aliments et drogues (aliments génétiquement modifiés), Première lecture le 14 juin 2016

[4Santé Canada est un ministère fédéral responsable, avec l’Agence canadienne d’inspection des aliments, des politiques relatives à l’étiquetage des aliments en vertu de la Loi sur les aliments et drogues. Santé Canada établit les règlements, les normes et les politiques encadrant la santé, la sécurité et la qualité nutritionnelle des aliments vendus au Canada.

[5Débats de la Chambre des communes, Compte-rendu officiel, 10 mars 2017.

Actualités
Faq
A lire également